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Entretien : « Il n’y a pas de mauvaise raison pour faire un service civique »

Le point sur | publié le : 20.01.2021 | Dominique Perez

Béatrice Angrand, présidente de l’Agence du service civique, estime que le dispositif répond aux aspirations de la jeunesse et représente une occasion d’acquérir ou de développer des compétences utiles sur le marché du travail.

Comment réagissez-vous suite à l’annonce du président de la République, en juillet 2020, d’augmenter de 100 000 l’effectif des services civiques ?

Dans le cadre du plan de relance, un volet est consacré aux jeunes, intitulé « un jeune, une solution », et un des axes de développement concerne l’engagement, dans lequel s’inscrivent les nouvelles opportunités pour le service civique. Cela signifie une reconnaissance de l’efficacité de cette politique publique, et de l’intérêt de cette expérience pour l’avenir des jeunes.

 
Comment pourriez-vous définir cette efficacité ?

Il s’agit d’une efficacité systémique. L’une des raisons de son développement est, que, surtout dans la situation actuelle de la jeunesse, le service civique peut être une réponse à la crise, en ce sens qu’il a des effets durables sur l’expérience. Un jeune en service civique qui a vécu une expérience positive acquiert des compétences, c’est d’ailleurs l’avis de 86 % d’entre eux d’après nos dernières études. Ces compétences les renforcent et sont très demandées dans le monde du travail. Il s’agit notamment de capacités à intégrer un collectif, à prendre la parole en public, mais aussi de gagner une confiance en soi, une capacité d’adaptation, une ouverture au monde, une capacité à évoluer dans un environnement socialement mixte…

 
L’une des volontés du dispositif était de favoriser cette mixité sociale, or seulement 13 % des bénéficiaires viennent de quartiers prioritaires de la politique de la ville ?

C’est vrai, mais on estime que 10 % des jeunes Français habitent dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Ce pourcentage correspond à la moyenne nationale donc on peut considérer d’après cet indicateur que c’est plutôt bien… Ce qui compte pour nous, ce sont aussi les lieux géographiques dont ils sont issus. Il y a des besoins considérables dans les zones rurales. Ce qui compte, dans tous les cas, est que le service civique puisse concerner les jeunes qui en ont le plus besoin. L’objectif de la mixité est très souvent tenu, au sein des collectifs. Ils sont souvent en groupes ou en binômes, et c’est là que l’on observe une mixité sociale. Quand on analyse les profils des jeunes, on s’aperçoit qu’ils sont représentatifs de la jeunesse française, il n’y a pas de surreprésentation de telle ou telle catégorie.

 
Le dispositif est régulièrement attaqué, concernant le statut des jeunes, hors du Code du travail, et les missions qui leur sont confiées, qui peuvent s’apparenter parfois à des emplois. Est-ce légitime ?

En 2019, 140 000 jeunes ont fait un service civique, or on s’attarde surtout sur des exemples précis, qui ne sont pas représentatifs. On ne peut pas nier qu’il y ait eu des dérives dans le quotidien des tâches effectuées, mais nous avons un rôle de vigie. Une circulaire a d’ailleurs été adressée à toutes les préfectures en janvier 2020 pour rappeler les fondamentaux du service civique. C’est également une excellente chose que nous puissions recruter 15 ETP supplémentaires pour absorber la montée en charge du dispositif.

 
N’y a-t-il pas confusion de la part des jeunes eux-mêmes ?

Aujourd’hui, beaucoup de jeunes subissent la précarité, l’isolement, des projets entravés. Ils devaient financer leurs études grâce à un job ou partir à l’étranger… Les trois quarts des projets se cassent la figure. Qu’ils cherchent d’autres opportunités, c’est plutôt normal et même plutôt bon signe. Ils ont aussi besoin de trouver un sens à cette période. Il n’y a pas de mauvaise raison de faire un service civique : parce qu’il y a une indemnité, parce que son amoureux en fait un aussi, et le plus souvent ils sont sensibles à une cause au départ. C’est ensuite le travail des structures qui les accueillent et le nôtre de les accompagner vers un projet d’avenir…

Auteur

  • Dominique Perez