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Sur le terrain

Organisation du travail : Avec le travail à distance, Arrakis retrouve son âme

Sur le terrain | publié le : 16.11.2020 | Caroline Crosdale

L’entreprise de biotechnologies Arrakis Therapeutics multiplie les réunions à distance, en petit et grand comité.

La société américaine Arrakis Therapeutics a découvert les joies du télétravail en pleine pandémie. Michael Gilman, le dirigeant de cette startup biotech du Massachusetts devait finaliser ses négociations de partenariat avec le laboratoire suisse Roche au mois de mars. « Leurs représentants avaient prévu de prendre l’avion et de venir chez nous pendant trois jours, se souvient-il. En fait, nous avons tout fait par vidéo et nous avons bouclé l’affaire en un jour et demi ! » « Le travail à distance se révèle très efficace, ajoute-t-il un peu surpris. Au lieu de nous retrouver dans une salle de conférence anonyme dans un cabinet d’avocats, nous étions tous dans nos cuisines et nos salles à manger. Le cadre est plus intime. On ressent une certaine empathie pour l’autre, on essaie de l’aider à résoudre ses problèmes. »

Et l’on gagne en productivité. C’est ainsi que la direction d’Arrakis Therapeutics, à la pointe des recherches sur l’acide ribonucléique, a conclu un accord de partenariat de 190 millions de dollars avec le groupe pharmaceutique helvète et a fait plonger dans le même temps ses 54 employés dans le travail à distance. Le laboratoire a dû complètement fermer pendant le confinement, puis il a repris ses activités au ralenti, avec toujours une bonne partie de ses troupes chez elles. Pour sauvegarder la culture de l’entreprise, les réunions sur Zoom ont explosé. Chaque vendredi, toute la compagnie est conviée pour déguster ensemble virtuellement une pizza ou boire un verre. Le mercredi, c’est la réunion des cadres dirigeants. Le style « happy hour » à l’américaine ayant fait long feu, on ne se contente plus d’une rencontre au comptoir sur écran d’ordinateur, on improvise des interactions plus sophistiquées. C’est ainsi que les cadres de la maison ont eu droit à une leçon de mélanges de cocktails. Un vrai barman a officié et les internautes, qui avaient reçu les ingrédients nécessaires chez eux, ont pu apprendre à réaliser un gin smash.

Fertilisation croisée

Cette jeune entreprise fondée en 2015 a besoin de renforcer son esprit maison. Son nom Arrakis étant inspiré de la planète désertique du roman Dune, elle ne peut laisser l’un ou l’autre s’isoler et prendre ses distances avec ses collègues. La participation de tous est encouragée. Elle veut jouer collectif et éviter la fuite de ses chercheurs vers une autre startup du Massachusetts. En cette période de travail à domicile, il est aisé d’organiser un rendez-vous avec le chasseur de têtes de la concurrence. Michael Gilman veille donc au grain. En plus des réunions usuelles entre les chefs de service et les équipes, il facilite les rencontres virtuelles en petit comité de cinq personnes pour parler de tout et de rien. Le choix des interlocuteurs est laissé au hasard. « C’est de la fertilisation croisée », dit le scientifique. Arrakis Therapeutics a aussi créé un club culturel dont les employés se retrouvent tous les 15 jours afin d’imaginer de futures activités communes. Et les parents disposent d’une chaîne sur Slack pour échanger sur leurs enfants. Comment les occuper à la maison ? Comment faire l’école à distance ? Les scientifiques comparent leurs expériences.

Ces différentes initiatives resserrent sans doute les liens entre les salariés qui sont là depuis quelques années. Mais cela suffit-il pour les nouveaux venus ? Arrakis Therapeutics est en pleine croissance. Depuis le début de l’épidémie, 15 personnes ont été recrutées. Six nouveaux embauchés arrivent dans les prochaines semaines et 11 postes sont encore ouverts. L’ensemble du processus de recrutement se gère en ligne. Michael Gilman n’a ainsi vu Erik Spek, son nouveau vice-président en charge des affaires juridiques, que sur écran d’ordinateur. Mais il espère que les arrivants vont se fondre dans le moule en leur faisant suivre un parcours d’initiation virtuelle. Les chercheurs, tout particulièrement, apprennent la jeune histoire de la société, ses protocoles de sécurité et la façon de faire d’Arrakis dans le développement de médicaments.

Ce basculement du bureau vers les foyers des uns et des autres a montré que l’organisation était beaucoup plus flexible qu’on ne l’imaginait. « J’ai gagné 40 minutes de sommeil par jour, se félicite le dirigeant de la startup. Et nous nous sommes habitués aux conférences vidéo. À l’avenir, quand nous serons sortis de la crise, ces vidéos remplaceront le téléphone », conclut-il. Pas question de revenir en arrière. Zoom fait déjà partie des outils essentiels. Même si les employés s’en lassent. Après avoir testé plusieurs formules, la direction d’Arrakis a interdit les réunions de service lorsque certains membres de l’équipe sont au laboratoire. Leur temps de laboratoire, forcement limité, est jugé trop précieux !

Auteur

  • Caroline Crosdale