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Sur le terrain

Emploi : La Banque royale du Canada mise sur la diversité

Sur le terrain | publié le : 05.10.2020 | Ludovic Hirtzmann

La première banque du Canada mise sur la diversité et s’engage à fortement augmenter les quotas de ses cadres issus des minorités visibles. Une bonne pratique non dénuée d’intérêts.

« La Royal Bank of Canada (RBC) reconnaît que depuis trop longtemps le racisme et les préjugés systémiques touchent de façon disproportionnée les personnes autochtones et de couleur, ce qui diminue considérablement la capacité de ces communautés à saisir les occasions d’avancement économique et social », a indiqué récemment la Banque royale du Canada dans un communiqué. La « Royale », comme l’appellent familièrement les Canadiens, compte plus de 84 000 employés. C’est aussi la première banque en importance du pays tant selon son chiffre d’affaires que pour ses effectifs. Selon l’agence Bloomberg, seuls 10 % des hauts cadres des six grandes banques canadiennes sont issus des minorités visibles (autres que les autochtones). La Banque royale, un peu meilleure élève que les autres établissements financiers en termes de diversité, compte seulement 20 % de minorités visibles dans ses rangs parmi les cadres. Un chiffre qu’elle veut faire passer à 30 % de ses embauches de cadres. « Nous attribuerons 40 % des emplois d’été […] en mettant l’accent sur le recrutement au sein des collectivités noires et autochtones », note la banque. L’initiative intervient dans la foulée du mouvement Black Lives Matters et dans un pays lui aussi touché par des bavures policières restées impunies sur des Noirs, notamment à Toronto où se trouve le siège social de la RBC. Une enveloppe de 100 millions de dollars canadiens (64 millions d’euros) sera ainsi allouée aux créateurs d’entreprises noirs. La banque s’engage à publier ses résultats sur la diversité et écarte un effet de mode. « Nous établirons dès 2021 des objectifs annuels mesurables pour l’embauche de stagiaires et de nouveaux employés noirs et autochtones », précise l’entreprise.

Mentorat et création d’entreprises

À l’instar de nombreuses entreprises canadiennes, cette bonne pratique d’inclusion n’est pas dénuée d’intérêts commerciaux. Objectif ? « Que nos équipes réunissent plus de points de vue différents et qu’elles offrent des possibilités de carrière à un groupe d’étudiants plus diversifié », précise la RBC. Les banques canadiennes emploient ainsi aux comptoirs de leurs agences de nombreux Asiatiques, Latinos, Indiens, afin que ceux-ci s’adressent dans la langue de leur clientèle d’origine étrangère pour mieux les fidéliser. À la RBC, ces non-cadres représentaient 36 %. À la Banque de Montréal, les DAB s’affichent en anglais, puis en chinois et enfin en français !

Soutien aux jeunes amérindiens

Dans une récente entrevue à Bloomberg, la DRH de la RBC, Helena Gottschling, a confié : « Bien que nous ayons fait des progrès et nous pouvons le constater dans notre bassin de relève, nous devons faire davantage pour renforcer ces bassins afin d’avoir une plus grande diversité ». Concrètement, la Royale doit aussi d’ici 2025 consacrer 50 millions de dollars canadiens (32 millions d’euros) dans des actions de mentorat auprès de 25 000 jeunes de groupes ethniques sous-représentés dans les entreprises. Dans le cadre du programme de mentorat Dialogue sur la diversité, la banque a créé un mentorat entre un cadre supérieur considéré comme un leader et un jeune d’une minorité visible pour apprendre à ce dernier comment devenir un dirigeant. 4 500 employés ont participé au programme. La RBC va aussi aider les jeunes Amérindiens, une population oubliée au Canada, qui ne représente que 1,32 % des employés de l’entreprise, un chiffre en baisse constante depuis quelques années. Certains rares exemples sont devenus des modèles pour la RBC. Tel Shute. Cette jeune amérindienne de la tribu ojibwé a vécu 17 ans dans sa réserve, avant d’obtenir un diplôme de l’université Ryerson de Toronto en gestion d’entreprise et en finances. « J’ai découvert que j’avais une passion pour la finance », a confié Shute au quotidien The Globe and Mail. Spécialiste des prêts hypothécaires, des services bancaires personnels et commerciaux, elle travaille aujourd’hui dans la plus grande succursale de la RBC à Toronto. Cette politique d’aide par des quotas n’est pas sans susciter des interrogations. Dans la plus grande ville du pays, Toronto, bastion du multiculturalisme avec ses six millions d’habitants, 52 % de la population est issue d’une minorité visible. Il en va de même à Vancouver. Les minorités dites visibles constituaient 6 % de la population du Canada en 1986. Elles formaient 22 % de la population lors du recensement de 2016. Louable, la politique d’inclusion à la canadienne est parfois décalée de la réalité. Les Chinois originaires de Hong Kong ne sont pas forcément une population pauvre ou en difficulté professionnelle. Shute conclut : « Pour moi, l’inclusion consiste à bâtir un environnement dans lequel tout le monde est à l’aise. »

Auteur

  • Ludovic Hirtzmann