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« Inclure signifie déconstruire les normes »

Le point sur | publié le : 21.09.2020 | L. E.

Pour cet universitaire, promouvoir l’entreprise inclusive, vers laquelle nombre d’entre elles souhaitent tendre, suppose de sortir de certaines zones de confort. Un processus qui prendra du temps…

Vous avez écrit La société inclusive, parlons-en ! Il n’y a pas de vie minuscule (éditions Érès). Que voulez-vous dire avec ce titre ?

C’est une manière de rappeler le droit de chacun à bénéficier d’une place dans la société et à accéder à une activité professionnelle. Une forme de fragilité ne saurait à elle seule interdire à une personne – qui n’a pas choisi son destin – de faire œuvre à sa mesure. L’entreprise n’est pas un territoire privatif ou exclusif, un cercle fermé dont les personnes, prétendument hors norme et improductives, seraient a priori exclues.

Nombre d’entreprises désirent désormais ouvrir leurs portes. Qu’en pensez-vous ?

Je ne peux que les soutenir, car le travail a une dimension émancipatrice. C’est un double signe : à la fois de maturité et d’engagement concret contre les inégalités, auxquelles, de manière insidieuse, on a fini parfois par s’accoutumer. Emprunter cette voie bouscule les habitudes et la culture d’entreprise. Il est difficile de faire place à des profils dits atypiques, en reconnaissant leurs compétences, leurs talents individuels, qui demeurent, hélas, trop inaperçus, voire niés. Être inclusif exige de déconstruire certaines normes culturellement établies.

Pourquoi les entreprises acceptent-elles aujourd’hui de s’engager ?

Derrière le mouvement inclusif, il y a quelque chose de l’ordre d’un autre horizon désiré, d’une prise de conscience que l’on ne peut parvenir à « faire société » en ne s’intéressant qu’aux personnes « bien nées » et préservées d’une forme de vulnérabilité (15 % de la population mondiale est, à des degrés divers, en situation de handicap). Les exclusivités, les exclusions, dans les lieux professionnels et ailleurs, ne cessent de menacer notre devenir commun. En outre, selon le Bureau international du travail (OIT), les entreprises inclusives ont 60 % de chances supplémentaires d’optimiser leurs profits, leur productivité, leur créativité, leur capacité d’innovation, d’améliorer leur image, en accueillant des talents souvent ignorés.

Recourir à des quotas est-il nécessaire ?

Les quotas et autres injonctions agissent comme une douce violence : l’objectif est de faire bouger les lignes, de déclencher et d’accompagner le processus inclusif dans les différentes couches du tissu économique : toutes les familles d’entreprises sont concernées, des plus grandes aux plus petites. Cela invite également à reconsidérer la formation des dirigeants, des managers, des DRH. Mais on ne peut pas détacher la problématique de l’entreprise inclusive de l’éducation ou de la formation. Toute rupture de continuum a de fâcheuses conséquences.

Auteur

  • L. E.