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DRH : le triple défi

Chroniques | publié le : 31.08.2020 |

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DRH : le triple défi

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Benoît Serre Partner au BCG, Vice-président délégué de l’ANDRH

La rentrée ne se passera pas comme nous l’avions espéré. Alors que septembre devait être le moment de la reprise la plus normale possible, l’évolution de la situation sanitaire a conduit le gouvernement à imposer des mesures renforcées de protection sanitaire.

Il y a bien entendu les masques généralisés mais aussi l’ensemble des mesures de ce texte qui vient réduire encore un peu plus nos chances de reprendre l’activité dans un contexte propice. C’est ainsi. On peut seulement regretter que les pouvoirs publics aient choisi la mode jacobine d’un protocole unique s’appliquant à tant de situations différentes et non comparables.

Il eut sans doute été préférable, fort de la responsabilité et de l’adaptabilité dont les entreprises ont fait preuve depuis plus de six mois, de se limiter à leur faire confiance pour protéger leurs collaborateurs tout en créant les meilleures conditions locales de reprise.

Ce n’est pas le choix qui a été fait et pourtant les DRH ont démontré leur professionnalisme et leur sérieux. Ce sont près de 7 000 accords de reprise qui ont été signés entre mai et juin, preuve s’il en était besoin que le dialogue social de proximité est le seul qui marche vraiment dans le contexte perturbé des prochains mois.

Cela étant, septembre marque la rentrée de la fonction RH qui va faire face à au moins trois défis difficilement compatibles entre eux.

Le premier est bien évidemment de faire appliquer et surtout respecter le protocole sanitaire ; ce d’autant plus fortement que le gouvernement a annoncé sa volonté de multiplier les contrôles envoyant ainsi un message de défiance là où dans nos entreprises nous recherchons surtout à instaurer et à renforcer la confiance.

Le second est sans doute le plus essentiel : recréer le collectif de travail entre des collaborateurs qui ne se sont parfois pas vus depuis six mois. Cet enjeu est majeur car il détermine le retour de la dynamique d’entreprise et de projets dont nous avons impérativement besoin pour relancer nos activités. Cela se fera dans un contexte où les moments de convivialité, d’échanges et d’intelligence collective seront difficiles à organiser et à faire vivre. Il en va de même pour l’intégration des nouveaux collaborateurs, notamment les plus jeunes, qui vont devoir rejoindre des organisations perturbées, incomplètes et sous tension. Le DRH est au cœur de cet enjeu et doit créer le lien indispensable à l’existence de la réalité humaine de l’entreprise. En relevant ce défi, les DRH doivent faire appel à l’ensemble de leurs expertises sociale, managériale, organisationnelle, de communication et même de cette intuition de la dynamique collective si propre à cette fonction.

Enfin, les DRH devront gérer les conséquences sociales de la crise économique désormais installée. Près de 300 plans sociaux sont d’ores et déjà annoncés, les problématiques de trésorerie s’amoncellent, la reprise de la consommation est hasardeuse et bon nombre de chaînes de valeur sont désorganisées durablement. Une fois de plus, la fonction RH aura la lourde responsabilité de piloter cette réalité économique en instaurant notamment un dialogue social responsable et exigeant tout en gérant les conséquences souvent individuelles de décisions difficiles et nécessaires.

Trois défis majeurs qui se contredisent apparemment mais, à y regarder de plus près, ils constituent la matrice d’une transformation profonde de nos organisations, du management et des modes de travail. Ces transformations protéiformes ne peuvent se concevoir sans un rôle central non pas d’exécutant mais de stratège de la fonction RH. Plus que jamais, nous avons besoin dans cette période de liberté d’innover, d’agir et de transformer. L’ensemble des acteurs sociaux comme l’État, si régulateur, doivent le comprendre, sans quoi le défi économique prendra le pas sur l’innovation sociale et humaine.