Le service militaire n’a pas disparu en France ! Désormais basé sur le volontariat, il propose à des jeunes en rupture de ban une remise à niveau, puis des débouchés dans les métiers en tension.
Réveil au clairon, lit au carré, rangers cirés et pompes en rythme… Les jeunes Français ont perdu jusqu’au souvenir des rituels du service militaire. Depuis 2015, plusieurs centaines de 18-25 ans ont pourtant renoué avec ces traditions spartiates, non plus pour s’initier au parcours du combattant, mais pour retrouver celui de l’insertion et de l’emploi. Lancé par François Hollande en personne en 2015, le service militaire volontaire (SMV) a débuté sous forme expérimentale dans un quartier de l’armée de terre à Montigny-lès-Metz. Concluant, le dispositif s’est pérennisé jusqu’à s’inscrire dans la loi de programmation militaire 2019-2025. Il accueille dorénavant 500 à 600 stagiaires pour une durée de huit mois dans les centres de Brétigny-sur-Orge, La Rochelle, Brest, Ambérieu-en-Bugey et Montigny-lès-Metz et dans un détachement de Châlons-en-Champagne. Depuis sa création, il a formé 3 700 volontaires de 20 ans en moyenne, dont trois quarts d’hommes. Arrivés sans aucun diplôme pour 66 % d’entre eux, ces jeunes en galère, souvent au bord de la rupture, présentent un taux d’insertion de 74 %. « Hébergés, nourris et encadrés 24 heures sur 24 et 365 jours par an, les jeunes apprennent le savoir-être et le savoir-faire. À la sortie, tous ceux qui ont suivi le stage sont assurés d’avoir un logement et un travail », résume le lieutenant-colonel Olivier Le Droucpeet, chef du centre du service militaire volontaire de Montigny-lès-Metz. L’armée popularise le SMV auprès des missions locales et de Pôle emploi, mais aussi via les réseaux sociaux, par flyers ou à l’occasion des journées défense et citoyenneté. Elle n’impose pas d’autre sélection que celle de la visite médicale, qui élimine d’emblée un petit tiers (30 %) des candidats. Un tiers des inscrits ne franchit pas le pas de la caserne. Les autres s’engagent, sous statut militaire, dans un parcours qui débute par un mois de remise à niveau physique, suivi d’une formation au permis de conduire que décrochent 70 % d’entre eux. Ils enchaînent sur une remise à niveau scolaire assurée in situ par des enseignants détachés de l’Éducation nationale, sur une période d’observation en entreprise (PAE) et par des formations professionnelles externalisées.
En cinq ans, l’armée a affiné le dispositif pour l’ajuster aux besoins des entreprises locales. Le 1er régiment du service militaire volontaire de Montigny-lès-Metz a ainsi coopéré avec 542 entreprises représentant une cinquantaine de métiers, de la logistique à la restauration en passant par l’agriculture, la mécanique ou la sécurité. Les réseaux d’entreprises connaissent à présent le dispositif et en font l’éloge. « En trois ans, nous avons recruté une demi-douzaine de ces jeunes, tant pour répondre au manque de main-d’œuvre que par souci d’insertion. Savoir qu’ils ont été recadrés par l’armée nous inspire confiance », témoigne Fabrice O’Brien, gérant de l’entreprise de peinture thionvilloise O’Déco. Les employeurs découvrent des parcours souvent chaotiques marqués par la rupture familiale, la phobie scolaire ou l’errance dès le jeune âge. Ils se réjouissent d’autant plus de la réussite de jeunes revenus de loin. Généralement recrutés en contrat d’apprentissage, les SVM, suivis par une assistante sociale durant les premiers mois, parviennent souvent à décrocher un contrat à durée indéterminée. « L’encadrement militaire a pour seul objectif de préparer leur sortie et leur insertion dans le secteur privé. Les employeurs qui recrutent des jeunes augmentent leurs chances de répondre aux appels d’offres publics, qui imposent souvent à leurs prestataires des clauses d’insertion », souligne Jean-Christophe Nguyen Van Sang, officier de réserve citoyenne de l’armée de terre affecté en avril dernier au service militaire volontaire.
Le 7 juillet, l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) et le SMV ont signé une convention qui facilitera l’intégration des jeunes grâce au vaste chantier du déploiement du très haut débit. Prenant le relais de l’armée, les 230 collectivités s’engagent non seulement à recruter des SVM, mais aussi à les accompagner dans leur recherche de logement et à favoriser leur intégration dans des formations qualifiantes.