La société spécialisée dans le traitement documentaire et l’envoi du courrier avait largement anticipé la généralisation du travail à distance. Elle a toutefois éprouvé ses limites lors du confinement.
Il y a des entreprises qui étaient davantage préparées que d’autres à basculer massivement en mode télétravail. Quadient était de celles-là. Créée sous le nom de Neopost, cette société spécialisée depuis plus de 80 ans dans le traitement documentaire et l’envoi du courrier a même pu anticiper le passage au travail à distance quelques jours avant l’annonce du confinement. La formalisation du télétravail est intervenue en 2018 lors du transfert du siège social de Nanterre à Rueil-Malmaison (92), le nouveau site offrant des conditions d’accès plus réduites. Un accord collectif a été alors signé prévoyant un jour de télétravail par semaine avec une possible extension en cas de situations exceptionnelles comme lors des grèves de décembre 2019 contre la réforme des retraites.
Des grèves qui ont servi en quelque sorte de galop d’essai. « Ce mouvement social a fait sauter un certain nombre de barrières psychologiques sur le bien-fondé du télétravail de la part de la direction et du management, se souvient Sébastien Amara, DRH chez Quadient France. En interne, le personnel pensait que l’opposition au recours au travail à distance venait de la DRH alors que les freins étaient d’ordre technique ou managérial. »
Mi-mars, Quadient France était donc prête pour placer les 381 collaborateurs du site de Rueil-Malmaison en télétravail. Les salariés éligibles ont été équipés d’un ordinateur portable et d’une solution logicielle de softphonie qui, comme son nom l’indique, transforme un ordinateur en téléphone grâce à la voix sur IP (VoIP).
Si la bascule a été une réussite sur le plan technique, le confinement a montré les limites du digital, selon Sébastien Amara. « Nous restons des êtres sociaux. Il y a un besoin de vivre ensemble, d’échanger physiquement pour rappeler le sentiment d’appartenance à une communauté. Avec le télétravail, l’ambiance au travail ou les échanges spontanés et informels sont difficilement reproductibles. »
Le DRH a vu des collaborateurs vivre difficilement le confinement du fait des conditions matérielles de l’exercice du télétravail ou des contraintes familiales. Par ailleurs, tous les employés n’avaient pas le même niveau de maturité. « Si les techniciens et les commerciaux travaillaient déjà à distance, d’autres catégories du personnel découvraient la pratique pour la première fois. Le télétravail étant appelé à s’inscrire dans la durée, nous allons mener des formations sur le management à distance. »
Une formation qui devrait se faire en présentiel. Alors que Quadient dispose d’une plateforme d’e-learning pour former sa population disséminée sur tout le territoire, le DRH a vu la difficulté d’assurer le développement des compétences comportementales en distanciel.
Depuis le déconfinement, le retour dans les locaux se fait progressivement et sur la base du volontariat. Une infoconsultation prévoit actuellement deux jours de présence sur site par semaine. Pour la suite, des réflexions sont en cours sur l’évolution du modèle d’organisation et l’équilibre à trouver entre télétravail et présentiel.
La distanciation sociale imposée par les mesures sanitaires a permis de distinguer plus concrètement les actions nécessitant du présentiel de celles pouvant être effectuées à distance. Le DRH prévoit aussi de faire un sondage pour prendre le pouls du terrain.
Selon Sébastien Amara, la question financière du télétravail va rapidement se poser. Qui prend en charge les différents coûts associés ? « Je ne suis pas sûr que le télétravail coûte moins cher pour une entreprise. » En attendant, le DRH voit le travail à distance comme un facteur d’attractivité. « Avant, le télétravail était la bonne surprise pour les nouveaux arrivants. Demain, il sera quasi obligatoire pour tous les postes éligibles. »