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Activités sociales et culturelles : Les CSE embarrassés par leurs équipements touristiques

Le point sur | publié le : 06.07.2020 | Irène Lopez

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Activités sociales et culturelles : Les CSE embarrassés par leurs équipements touristiques

Crédit photo Irène Lopez

Les équipements touristiques détenus par les CSE constituent une destination de vacances pour beaucoup de salariés. Or, ils pèsent sur le budget des actions sociales. Au point, pour certains syndicats, de vouloir se séparer de ces structures coûteuses.

Plus que jamais, la destination France tient la corde pour les vacances d’été 2020. Un certain nombre de salariés et d’enfants de salariés rejoindront bientôt un équipement touristique géré par leur CSE. Selon un rapport parlementaire sur le financement des colonies de vacances de 2013, les CSE (à l’époque, c’étaient encore des comités d’entreprise) financent directement un quart des séjours d’enfants en France, soit davantage que les caisses d’allocations familiales. Certains centres de vacances sont de véritables joyaux. C’est le cas des équipements du CSE d’Air France qui a notamment acquis en 1988 la propriété de Lassy. Inaugurée le 1er juin 1996, cette ancienne propriété de l’Aga Khan, située dans un parc de 30 hectares, est l’un des sept villages détente du comité d’entreprise de la compagnie aérienne. En 2008, pas moins de 27 000 agents en ont profité. Figurent également au patrimoine du CSE 17 villages jeunes situés un peu partout dans l’Hexagone. Chaque année, 9 000 enfants de salariés d’Air France partent ainsi en colonie de vacances.

Le plus puissant des CSE, géré par la CGT (lire l’encadré) s’enorgueillit d’avoir « offert » 240 millions de nuitées aux salariés gaziers en 2019. « Nous sommes le premier pourvoyeur de vacances en France. 95 % des demandes de départs en vacances pour les enfants sont pourvues. Le coût restant à charge n’excède pas 15 % du coût total du séjour », déclare Laurent Heredia, secrétaire fédéral de la CGT Énergie. Près de 600 000 bénéficiaires des activités sociales (actifs et retraités) sont recensés au sein de la branche Énergie. Plus de 450 destinations figurent au catalogue des vacances. La caisse centrale d’activités sociales (CCAS) mise tout sur les séjours collectifs, soit au sein de ses équipements touristiques, soit via des allotements achetés auprès d’autres opérateurs. Son patrimoine comprend 241 centres de tourisme (47 en propriété et 194 en convention) et 237 accueils collectifs de mineurs (98 centres CCAS, 110 en convention et 29 à l’étranger).

La CGT y tient mordicus et balaie d’un revers de la main les thèses sociologiques qui prédisent la fin des vacances collectives. : « Nous avons constaté une augmentation de 70 000 nuitées en 2019 par rapport à 2018. Il n’y a donc pas de désaffection du collectif », indique Laurent Heredia. Ce que conteste Arnauld Prigent, encarté CFTC Engie : « Les vacances collectives ne sont plus aussi appréciées qu’auparavant. C’est notamment le cas des cadres qui sont peu enclins à partir en vacances avec leurs subordonnés. »

La CCAS d’EDF possède des équipements touristiques emblématiques comme un gros chalet situé aux Saisies (Savoie), construit pour les JO d’Albertville de 1992, ou encore le site de La Napoule (Alpes-Maritimes) qui offre une vue sur la baie de Cannes. Or, ces domaines d’exception vieillissent et coûtent cher à entretenir. Le domaine de Lassy d’Air France est aujourd’hui à l’abandon. Un repreneur serait sur les rangs à hauteur de 6 millions d’euros.

Un patrimoine, source de conflits

Ce patrimoine est d’autant plus coûteux que les budgets alloués aux CSE ne cessent de diminuer. « Nous avons perdu 100 millions d’euros de dotations budgétaires en 2013 », précise Laurent Heredia. « Nous avons déjà vendu des centres de vacances au niveau local. Ce n’est pas une volonté, mais une obligation financière. Nous préférons passer des partenariats avec Pierre&Vacances et proposer des chèques vacances aux salariés que d’entretenir des structures », souligne Arnauld Prigent.

La fin d’un modèle ? « Nous n’en sommes pas encore là, relativise Arnauld Prigent. À la CFTC, nous défendons les familles et tenons à leur permettre de partir en vacances, mais nous ne sommes pas contre le recours aux chèques vacances et la vente d’un patrimoine trop coûteux à entretenir. » Si la CFE-CGC souhaitait s’affranchir de tout le patrimoine détenu par la CCAS et favoriser des ventes à la découpe, la CGT a préféré opter pour une autre solution : « Nous avons créé des SCI. Ce statut permet aux agents d’EDF et GDF de profiter d’un lieu de villégiature (accueil de colonies de vacances, mais aussi des familles et amis d’agents), mais aussi d’ouvrir cette possibilité aux “extérieurs”. » C’est le cas du château de Sainte-Croix, dans l’Ain, qui appartient désormais aussi à la caisse mutuelle complémentaire et d’action sociale (CCMAS) de Lyon.

La gestion du domaine a été confiée à une association bien connue du tourisme social : Vacances Léo Lagrange.

Se séparer du patrimoine reste impensable pour la CGT. « Le vendre serait synonyme de licenciement du personnel qui y travaille et cela ne fait absolument pas partie de nos valeurs, estime Laurent Heredia. En outre, nous ne souhaitons pas substituer ces vacances dans nos équipements touristiques par des chèques vacances, car nous avons observé qu’avec ces derniers, les catégories sociales les plus basses ne partaient pas à hauteur des autres classes plus élevées. »

Les discussions vont bon train entre les syndicats sur le patrimoine de la CCAS. Mais un consensus les a au moins réunis sur l’ouverture des centres en cette période post-crise du coronavirus. Même en cas d’obligation de fermer les centres de vacances, la CGT avait décidé, pendant le confinement, de maintenir les contrats des employés saisonniers. Idem pour les acomptes versés aux partenaires du tourisme social. Pas question pour le syndicat de faillir à ses obligations.

La CCAS d’EDF toujours en tête

Si les CSE ont remplacé les CE depuis le 1er janvier 2020, leur financement reste sensiblement identique : 0,2 % de la masse salariale brute dans les sociétés de 50 à 2 000 salariés et 0,22 % dans les sociétés de plus de 2 000 salariés en ce qui concerne le budget de fonctionnement. Le budget des activités sociales et culturelles (ASC) est, lui, déterminé par accord d’entreprise. Certains CSE sont de véritables sociétés : ils gèrent des millions d’euros et emploient leurs propres salariés. C’est le cas d’EDF qui possède le plus grand CSE en France. Les loisirs du personnel sont gérés par la caisse centrale d’activités sociales (CCAS). Son budget avoisine les 400 millions d’euros et emploie plus de 2 000 salariés, selon les données de CSE-Guide.fr, la première communauté d’élus CSE de l’Hexagone. Viennent ensuite la SNCF (89 millions d’euros, 1 000 employés), la RATP (54 millions d’euros, 450 salariés) et Air France (45 millions d’euros et 265 salariés).

Auteur

  • Irène Lopez