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Les DRH au cœur de la crise

Avez-vous tiré des leçons sur le management ?

Les DRH au cœur de la crise | Les enseignements de la crise | publié le : 29.06.2020 |

Marine Henin-Duprez (Bonduelle) : La recherche d’un nouveau modèle de leadership faisait déjà partie des préoccupations de Bonduelle avant la crise et, évidemment, la séquence que nous venons de traverser va être l’occasion d’intensifier ces réflexions. L’objectif est de déterminer comment l’expérience vécue pourra renforcer le sens du collectif au sein de l’entreprise.

Olivier Carlat (Veolia) : L’expérience n’a fait que renforcer ma volonté d’aider, d’accompagner nos managers. Experts dans leur domaine, ils ont dû, pendant la crise, répondre à des situations et des questions qui sortaient de leur champ habituel, et cela, dans une totale incertitude. Nous devons mieux préparer les managers à ce genre de situation de stress, en cultivant leur bienveillance et leur capacité d’écoute, envers les collaborateurs mais aussi envers eux-mêmes. Aujourd’hui, ils se trouvent dans une phase ardue, celle de réengager les équipes et de recréer du collectif, d’articuler des décisions de court terme et une réflexion et une agilité pour penser leur modèle économique dans cette phase transitoire et dans l’après-crise.

Jean Agulhon (Groupe RATP) : Les managers ont peut-être appris une autre vision de la responsabilisation et de l’empowerment de leur équipe. Le fait de constater que l’activité a pu se poursuivre, sans leur présence physique, peut peut-être augmenter leur confiance et les amener à confier de plus en plus de missions à leurs collaborateurs. Les managers de la RATP, comme l’ensemble du personnel, se sont engagés sans compter et nous avons réussi à gérer la cohabitation et la collaboration entre les salariés exploitants et les salariés en télétravail. À travers cette pratique du télétravail, nous avons, les uns les autres, expérimenté une autre relation à la responsabilisation et nous avons été amenés à approfondir notre rapport au travail. Ce sont deux thématiques managériales qui ont émergé et qui resteront dans le radar de nos préoccupations, sans pour autant que nous changions de management. Il y a un peu plus d’un an, nous avons procédé à une refonte de notre référentiel de management autour de trois rôles clés, tournés vers le coaching, le leadership et l’entrepreneuriat. Ces trois dimensions ont été mises en œuvre pour manager à distance. Il a également fallu avoir l’esprit d’initiative pour mettre en place des dispositifs inédits et être en soutien constant de ses équipes.

Frédérique Giavarini (Groupe Fnac Darty) : J’ai toujours été convaincue que les managers de proximité avaient un rôle majeur à jouer. Et cette période a renforcé ma conviction que les modes de management devaient évoluer, ne serait-ce que pour mieux satisfaire les attentes des nouvelles générations et accompagner les nouvelles formes de travail. Cette période fait mieux percevoir les raisons qui rendent nécessaires la plus grande responsabilisation des équipes, leur autonomie et le besoin de plus de sens au travail.

Dominique Podesta (Heppner) : La chaîne managériale s’est révélée efficace. Elle a su faire preuve d’une grande souplesse et se réinventer avec agilité. C’est grâce aux managers de proximité que nous avons pu maintenir l’activité, car ils ont su communiquer auprès de leurs collaborateurs, les rassurer, les impliquer, réinventer leur relation pour ceux qui travaillaient à distance avec leur équipe, et fait en sorte que l’organisation se mette en place. Chez Heppner, les décisions concernant les clients et l’organisation du travail sont délocalisées, c’est aussi ce qui nous a permis d’être agiles.

Serge Derick (BPCE) : De manière générale, j’espère que les entreprises vont changer leur mode de management, en adoptant une plus grande proximité, pour encore plus de confiance et d’autonomie.

Xavier Chéreau (PSA) : L’un des facteurs clés de succès est de repenser le leadership – le rôle du leader dans sa capacité à animer et fédérer l’ensemble de ses équipes, avec les nouveaux de modes de travail, comme le télétravail. Nous avons d’ailleurs décidé de revoir toutes les formations managériales dans cet esprit.

Jérôme Leparoux (Daher) : Cette crise a fonctionné comme une loupe grossissante sur les pratiques de chacun et sur la manière dont les modes de management étaient reçus par les équipes. Les managers les moins à l’aise dans le pilotage par objectifs ou ceux qui ont besoin de davantage de contrôle ont pu parfois se trouver en difficulté face à leurs équipes. Ils étaient en général favorables à l’arrêt du télétravail. À l’inverse, ceux qui favorisent spontanément un fonctionnement en réseau, basé sur la confiance, ont trouvé dans le télétravail un terrain d’expression plus large, et ont parfois montré des réalisations inédites. Une chose est sûre, l’injonction ne fonctionne plus ! Le management doit donc continuer à se réinventer en misant sur l’incitation et la recherche de sens. Et la manière dont les employeurs – et les managers – se sont comportés durant la crise fera une vraie différence lorsque le marché du travail sera revenu à la normale.

Rémi Boyer (Korian) : Le management s’est resserré, ressoudé, tout comme les équipes qui ont été soutenues par leur environnement proche, par exemple par des petites attentions comme des bouquets de fleurs de la part de partenaires locaux. Globalement, nous avons constaté la très grande résilience de l’entreprise. J’étais très impressionné par sa capacité à se concentrer intégralement sur son métier de base : le soin. Les salariés n’ont pas compté leur temps… Une enquête interne montre que la fierté de soigner est toujours première.

Une communication interne adaptée et renforcée

Différentes initiatives ont été prises pour informer les salariés sur l’évolution de la situation et les mesures mises en place. À la RATP et chez Veolia, la communication interne a également eu pour objectif de valoriser le travail des personnes qui contribuaient à la continuité d’activité. Le président de Veolia s’est adressé directement aux collaborateurs par vidéo, à plusieurs reprises. Cette période a permis d’expérimenter des outils digitaux qui perdureront certainement après la crise, mais, aussi, de prendre en main des outils qui avaient été lancés sans trop de succès et qui ont donné lieu à de nouveaux usages. À la RATP, plus de 2 000 utilisateurs se sont emparés du réseau social d’entreprise pour partager des émotions, ce qui n’était pas dans la culture de la régie, mais également échanger des bonnes pratiques et se soutenir les uns les autres. Chez Generali, une publication hebdomadaire « Feel good », consacrée aux bonnes nouvelles et aux informations pratiques, comprenant des reportages ou des témoignages de salariés a été créée. Chez Schneider, toutes les entités ont organisé des open lines sur l’ensemble de la France. Le groupe Daher a privilégié le SMS pour communiquer avec ses collaborateurs. Le dispositif a été complété par un « sharepoint », un petit site internet dédié, sur lequel étaient diffusées des informations, notamment le contact des représentants du personnel.