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Les DRH au cœur de la crise

Avez-vous changé d’opinion sur le télétravail ?

Les DRH au cœur de la crise | Les enseignements de la crise | publié le : 29.06.2020 |

Dominique Laurent (Schneider) : Le télétravail a réussi un stress test majeur, ce qui est le cas dans la plupart des sociétés du CAC40. En revanche, onze mois de télétravail à ce rythme-là, cela ne marche pas, sauf à en sortir avec des RPS, parce que c’est très épuisant, même si les salariés se sont affranchis de servitudes comme les transports. Si on va vers plus de télétravail, il va falloir définir ce qu’on attend du télétravail et du travail présentiel. Bref, articuler ce que les Anglais appellent le work from office et le work from home. Le télétravail va modifier la façon de travailler au bureau. Si l’on ne parvient pas à réfléchir de façon constructive, alors les collaborateurs ne voudront pas revenir. Le télétravail de demain n’est pas celui d’aujourd’hui auquel on ajouterait juste un ou deux jours.

Jean Agulhon (RATP) : La crise a permis de changer le regard de certains sur la question du télétravail. Nous nous sommes aperçus que des postes et des types d’activités que nous estimions ne pas être éligibles au télétravail pouvaient finalement l’être. Notamment, des postes administratifs RH pour lesquels nous pensions qu’il fallait que les gens soient présents car les flux informatiques ne le permettraient pas. Or ces personnes ont télétravaillé durant le confinement de manière tout à fait efficace. De ce fait, je pense que nous allons élargir le spectre des postes éligibles et assouplir les conditions de mise en œuvre du télétravail et qu’il va se démocratiser.

Cathy Desquesses (Sodexo) : Le télétravail va se poursuivre. Il était déjà bien ancré dans la culture de l’entreprise car, chez Sodexo, les salariés qui peuvent télétravailler sont évalués sur la réalisation de leurs objectifs, le temps de présence dans un lieu de travail est à discrétion. On a vu, avec la crise, que le travail à distance pouvait fonctionner mais qu’il avait ses limites, car on a tous besoin d’un lien social.

Xavier Chéreau (PSA) : La crise a renforcé la nécessité d’aller plus loin et d’aller plus vite. On peut fonctionner de façon très efficiente, en travaillant beaucoup mieux, en conciliant mieux la vie privée et la vie professionnelle, en redonnant du temps utile, gagné sur le temps de transports, en réduisant la fréquence des trajets domicile-travail, en redonnant de la liberté de mouvement à chacun d’entre nous, y compris dans son choix d’habitation, car venir sur site un jour et demi par semaine permet de s’éloigner un peu plus et d’avoir des logements de meilleure qualité. Il va falloir également revoir nos espaces de travail, certes en réduisant notre empreinte immobilière et notre empreinte carbone. Mais au-delà de ça, il va falloir investir et travailler sur nos ambiances de travail pour qu’elles soient plus qualitatives. Le rapport au travail, au lieu de travail, le rapport à l’autre vont changer.

Marine Henin-Duprez (Bonduelle) : Jusqu’à présent, ce n’était pas une problématique inscrite au cœur des préoccupations de l’entreprise et il pouvait même, à certains niveaux, susciter quelque méfiance. Ce que nous venons de traverser et les nouvelles manières d’être et de travailler, l’énergie et la créativité suscitées par la confiance, vont sans doute changer les mentalités et nous inciter à réfléchir sur le développement du travail à distance.

Sylvie Peretti (Generali) : Je ne suis pas complètement certaine qu’il faille aller vers une solution télétravail à 100 %. On a besoin de liens pour porter nos valeurs. En outre, nous avons fait le constat inattendu qu’en situation de télétravail, les salariés ont tendance à se recentrer sur leurs seules compétences. Tout ce qu’ils pouvaient apprendre par le compagnonnage de leurs confrères n’existe plus en télétravail et il n’est pas possible de remplacer ce genre d’apprentissage informel par des modules e-learning. Le tout-télétravail présente le risque d’entraîner davantage d’effets négatifs que positifs. Toutefois, la période actuelle a décomplexé notre vision du télétravail, y compris pour les managers, et notre futur accord devra sûrement amener plus de souplesse et de flexibilité mais nécessitera d’avoir une réflexion plus poussée sur les futurs modes d’organisation du travail.

Olivier Carlat (Veolia) : Nous avons vécu pendant la crise un télétravail “atypique” dans un cadre imposé de confinement. Les équipes ont besoin de collectif. Les lieux présentiels pourront évoluer, mais le télétravail ne sera pas la norme. Certes, nous n’avons pas eu de problème de management dans le cadre du télétravail, mais je me méfie de cette réduction d’interface physique, d’échange et de mixité qui signifie un appauvrissement de l’intelligence collective et du sens du travail.

Dominique Podesta (Heppner) : La crise a mis en exergue des sujets à approfondir, et elle va certainement nous permettre aussi d’accélérer et d’enrichir un certain nombre de nos projets autour des équilibres de vie, du bien-être et de la qualité de vie au travail. Le télétravail en faisait partie, mais pas seulement. L’objectif est de trouver le juste équilibre entre la performance économique, la satisfaction du client et les attentes des salariés dans la gestion de leur vie professionnelle et privée, à la lumière de ce nous venons tous de vivre. Le monde du travail nous démontre aujourd’hui qu’on peut travailler à distance, et que cela présente des intérêts pour l’entreprise, pour les salariés et pour le client. C’est cela que nous devons ajuster et formaliser au mieux des intérêts de tous.