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« Les congés d’été ont fait partie du compromis de l’équilibre social »

Le point sur | publié le : 29.06.2020 | Judith Chétrit

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« Les congés d’été ont fait partie du compromis de l’équilibre social »

Crédit photo Judith Chétrit

Faut-il poser moins de congés dans le cadre d’un effort commun ? Comment concilier la crise avec le repos avant une rentrée présumée intense et l’incertitude planante de la résurgence du virus ? Traditionnelle compétence des services RH, la gestion des congés payés a pris une coloration particulière en 2020. Mais sans poser trop de soucis et intégrée dans une discussion plus globale sur l’aménagement des temps de travail, selon Benoît Serre, directeur associé du cabinet de conseil BCG et vice-président délégué de l’ANDRH.

Habituellement, chaque entreprise anticipe différemment la prise de congés payés. Au vu des derniers mois, est-ce que le sujet a été une préoccupation ?

Dans la plupart des cas qui me sont remontés, les partenaires sociaux ont posé le sujet des vacances sur la table avec la signature ou la négociation d’accords de reprise d’activité pour préparer le déconfinement. Au début, il n’y avait pas forcément de prise de conscience du symbolisme de ce sujet, mais il a fallu communiquer sur le thème dès avril pour dire ce qui allait probablement se passer et les règles de souhait et de prise de congés malgré l’incertitude de la crise sanitaire. Aujourd’hui, ce n’est plus un sujet. S’il peut devenir très sensible en interne pour les salariés, c’est aussi parce que les vacances d’été traduisent la projection et le retour à une vie normale. Dans certaines entreprises, après les ordonnances de fin mars, les salariés ont dû poser des jours de congés ou de RTT pour réduire l’ampleur ou retarder le passage à l’activité partielle. Devant être encadrées par un accord d’entreprise, ces mesures ont souvent été acceptées par les syndicats sous réserve d’un encadrement moindre des congés estivaux. Cela participe de l’équilibre social et du temps de latence que comptent se donner les entreprises durant l’été.

Quelle pouvait être la marge de manœuvre ?

La gestion des congés a dû sans doute être mieux calibrée et régulée pour cette année afin de pouvoir redémarrer correctement. La prise de décisions peut être aussi moins fluide que d’habitude. Dans des entreprises qui n’avaient pas encore demandé à leurs salariés leurs souhaits de congés avant le confinement, beaucoup d’entre eux ont préféré retarder cette décision, ce qui ajoute une complexité opérationnelle. Dans l’industrie, par exemple, le modèle de production norme beaucoup les ajustements éventuels. Dans des sociétés qui ont raté une saison commerciale au printemps, les ressources humaines peuvent aussi préférer miser sur un maximum de vendeurs plutôt que d’avoir des saisonniers, stagiaires et alternants. Mais il faut aussi prendre en compte le problème de la garde d’enfants pendant les congés d’été qui n’est certes pas nouveau, mais plus difficile aujourd’hui avec l’annulation des colonies de vacances ou l’hésitation à envoyer les petits-enfants chez leurs grands-parents en raison du risque sanitaire. Il y a aussi un autre biais qui a commencé à s’installer avec le télétravail prolongé par certains salariés. Certains pensent mixer télétravail et vacances jusqu’à septembre afin de pouvoir travailler depuis leur lieu de congés. Mais cela crée une distorsion interne et de possibles inégalités, car l’entreprise doit rapidement reconstituer son collectif depuis le déconfinement et retrouver un modèle de production et de productivité plus réaliste.

Quel a été finalement le curseur ?

Les arrangements se font en fonction du niveau d’activité anticipé ou à rattraper de l’entreprise. Il faut être surtout en mesure de justifier des réductions de congés si elles sont présentées ou négociées en CSE. Le problème n’est pas parfois tant le nombre total de jours de vacances que le fait que les semaines soient consécutives. Le fractionnement de congés peut être demandé par l’employeur. Si je ne peux pas la citer, une entreprise dans la grande distribution hors alimentaire propose, par exemple, aux salariés de ne pas prendre de congés la première quinzaine d’août en contrepartie d’un report et d’un abondement en jours de l’entreprise en août.

Auteur

  • Judith Chétrit