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« Le travail du manager est très ingrat, il faut beaucoup donner ! »

Le point sur | publié le : 01.06.2020 | L. Z.

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« Le travail du manager est très ingrat, il faut beaucoup donner ! »

Crédit photo L. Z.

Ce professionnel gère une quinzaine de personnes, sur les 2 500 que compte la société internationale de courtage d’assurance en France. Il a privilégié la qualité de la relation d’équipe et l’engagement, selon des modalités adaptées au travail à distance. Pour lui, les collaborateurs et leur bien-être doivent être au cœur de la stratégie d’entreprise.

Comment avez-vous géré la crise et en particulier le confinement ?

Il est apparu à la direction que même avec une baisse de l’activité, il était important de maintenir les collaborateurs au travail, sans avoir recours au chômage partiel. Certes, nous avons encouragé la prise de congés, mais, dans cette période anxiogène, nous avons eu le souci d’obtenir le même niveau de sérénité et d’engagement de la part des collaborateurs. Pour nous, les principes de management, faits d’informations sur la direction à donner et d’écoute des collaborateurs, qui nous guident lorsque nous sommes en présentiel, en mettant l’accent sur la qualité de la relation d’équipe, ont été les mêmes à distance. Seules les modalités ont changé. Et bien sûr, il a fallu redoubler d’efforts. Le travail du manager est très ingrat, il faut beaucoup donner ! Et c’était d’autant plus ardu que les managers étaient eux aussi en confinement et isolés.

Concrètement, comment cela s’est-il passé ?

La direction a d’abord mis en place des séances d’informations claires, via Webex, sur l’activité de l’entreprise et les perspectives, auprès des 2 500 collaborateurs. Les managers ont ensuite servi de relais, pour démultiplier les occasions d’informations et d’interrogations, d’autant plus importantes que nous n’étions pas en présentiel. Il fallait, alors que le « physique » est porteur d’informel, recréer cette relation. Et si d’ordinaire, nous avions ces réunions une fois par mois, nous avons augmenté la cadence, pour la porter à une fois par semaine. Au-delà des informations à donner et à recueillir, j’ai proposé aux membres de l’équipe de mener eux-mêmes la suite de la réunion. Il s’agit, comme dans le télétravail, de montrer la confiance de l’entreprise envers les salariés. Certains ont ainsi lancé des défis aux autres collaborateurs, pour manifester, par exemple, leur attachement à la protection de l’environnement, en envoyant des photos d’achats de denrées alimentaires en vrac ou auprès de petits producteurs sur Whatsapp. Nous avons également mis en place un « speed dating », une fois par semaine, précisément pour échanger avec les collaborateurs, non seulement sur le travail, mais aussi sur des sujets personnels. Par exemple, nous avions des collaborateurs en télétravail dans de petits appartements. Une solidarité s’est installée : d’autres, partis en confinement à la campagne, leur ont donné les clés de leur logement pour qu’ils soient plus confortables. Je dois dire que j’ai été ravi de cette solidarité spontanée ! Nous avons également utilisé un questionnaire afin de jauger le moral des troupes, avec des questions qui changeaient toutes les semaines. D’après une enquête que Willis Towers Watson a mené à l’échelle mondiale, seuls 35 % des entreprises ont pratiqué le « pulse survey ». C’est dommage, d’autant qu’il est clair qu’à l’avenir, le télétravail sera plus largement déployé et que la relation même au travail va changer. Les sociétés ont donc tout intérêt à sceller des accords de télétravail, de même qu’à garder des moments de socialisation pour les équipes. Bref, il s’agit désormais de pratiquer le « change management ». Et les collaborateurs leur en sauront gré ! Les nôtres, en tout cas, semblent avoir apprécié tous ces efforts, si l’on en juge par leurs retours. Ils ont vraiment compris qu’ils étaient au cœur de la stratégie de l’entreprise.

Quels sont les prochains défis qui attendent les managers ?

Si le confinement a été une étape difficile, celle qui s’ouvre le sera encore plus, puisqu’après la crise sanitaire, il faudra gérer la crise économique. Au-delà de la confiance et de la stimulation à créer ou à renforcer, les entreprises vont devoir aller à l’essentiel. Et c’est la préservation de l’emploi. À cet égard, je pense qu’il va falloir redéfinir les critères de performance de l’entreprise, qui ne doivent pas servir qu’à calculer le montant des dividendes versés aux actionnaires. Si la RSE existe déjà, de nouveaux indicateurs de performance peuvent être mis en place. Il est ainsi tout à fait possible d’adopter de nouvelles mesures qualitatives pour juger par exemple de la performance des dirigeants. Certains, d’ailleurs, voient déjà leur propre bonus lié à l’engagement des collaborateurs.

Auteur

  • L. Z.