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Les RH au cœur du monde d’après

Chroniques | publié le : 25.05.2020 |

Benoit Serre Partner et directeur associé du BCG – VP de l’ANDRH

Depuis trois mois, la fonction RH met en œuvre des compétences et des qualités parfois ignorées. Pour certains, cette mission se résumait à recruter, licencier et gérer les organisations syndicales. Cette méconnaissance pouvait même aller jusqu’à interroger l’utilité de la fonction à l’heure de l’Intelligence artificielle et de la disparition inéluctable des corps intermédiaires.

Tout cela semble antédiluvien. Les DRH ont accompagné les directions générales et les salariés, organisé le télétravail, structuré l’activité partielle, protégé les équipes, aménagé les espaces et maintenu le dialogue social. Dans cette séquence inédite, la fonction RH démontre ses qualités de rigueur, d’expertise, de bienveillance, de patience, de résilience, de détermination, d’anticipation et de compréhension.

Forte de cela, elle demeurera au cœur des débats sur le futur du travail, de l’entreprise et de son organisation. Les RH sont attendus à juste titre sur leur gestion de la crise économique et sociale qui s’annonce terrible comme « négociateurs de l’impossible » autant que comme stratèges des décisions à prendre sur le fond et sur la forme.

La primauté de l’humain s’est imposée et il faudra maintenir cette réalité.

Pour accompagner les transformations qui se profilent, les DRH auront à évoluer dans leur approche du métier et dans leur positionnement dans l’entreprise. Selon une enquête de l’ANDRH, ils sont 89 % à avoir formé un duo efficace avec leur direction générale. Le juste équilibre dans les décisions entre impératif social et réalité économique est l’enjeu des prochains mois. Le DRH doit incarner demain celui ou celle qui les conjugue au nom de l’intérêt collectif et du respect individuel. Il doit jouer ce rôle de temporisation responsable auprès des directions générales.

Les entreprises entrent dans une ère nouvelle où les tendances connues subissent une soudaine accélération : la responsabilité sociale et sociétale, la meilleure prise en compte des équilibres de vie, la protection sanitaire des salariés, la reconnaissance et le partage de la performance collective.

Tous ces éléments plaident pour une révolution de l’expérience salarié.

L’essor annoncé du télétravail aura un impact immense sur le modèle de management, plus fondé sur la confiance que jamais. L’aménagement des espaces de travail, avec notamment le flex office, changera le rapport au lieu et donc à l’entreprise. Si demain, la majorité des salariés sont en télétravail plusieurs jours par semaine, l’entreprise deviendra prioritairement un espace de rencontre, de partage et de collaboration. Cela change la relation du salarié à son employeur tout en faisant porter de nouvelles responsabilités sur l’employeur.

Créer la convivialité sans renoncer à l’exigence, favoriser la liberté d’organisation sans réduire la capacité à travailler ensemble. Voilà un premier enjeu pour les DRH.

Avec un corps social dont l’approche du travail sera différente se posera inévitablement la question du contrôle et de la sécurisation des conditions de travail. Ces thèmes souvent au cœur des échanges avec les représentants du personnel devront être revus dans leur intégralité. Il faudra éviter que des règles monolithiques n’empêchent une organisation du travail que chacun anticipe comme plus souple, plus respectueuse des différences et plus diverse.

Trouver le juste équilibre entre la règle commune et la liberté individuelle sera difficile. Un autre défi pour les DRH.

Enfin des choix de réorganisation et de restructuration seront à faire. Au-delà des impératifs économiques, les entreprises ne disposent pas toujours de la flexibilité d’organisation, de qualifications et de compétences pour s’adapter au bon rythme. Les DRH doivent permettre cette agilité souvent incompatible avec la réalité des processus sociaux. Il y a là un enjeu d’innovation dans le dialogue social et dans la construction de solutions adaptées qui pourraient orienter les nécessaires réformes pour que dialogue social et adaptation des entreprises se conjuguent au bon rythme.

Innovation, respect de l’individu, responsabilité collective, performance économique et responsabilité sociale sont au cœur de la fonction RH car c’est par leur mise en œuvre que nous sortirons de cette crise qui modifie les paradigmes et accélère les tendances observées. Les DRH ont prouvé leur solidité professionnelle, la meilleure des bases pour être acteur du « monde d’après »