Alors que les entreprises américaines réembauchent, après avoir détruit plus de 22 millions de postes en mars et avril, les syndicats américains se battent pour le « right to recall », autrement dit, le droit, pour un salarié, à être rappelé à son poste par son employeur – et aux mêmes conditions qu'avant. Mais la tentation pour les entreprises est grande de proposer des conditions moins avantageuses, en termes de salaire, à leurs anciens salariés, voire directement de chercher de nouveaux candidats pour un poste.
Les syndicats poussent pour une législation au niveau fédéral pour garantir le droit au retour des salariés licenciés pendant la crise sanitaire. Selon une analyse de la Réserve fédérale américaine, en association avec l'université de Chicago, 10% des entreprises qui recrutent de nouveau le font en effet à partir de candidatures extérieures, plutôt que de rappeler leurs anciens salariés. Et si elles rappellent leurs anciens salariés, c'est à de moins bonnes conditions. C'est notamment le cas dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, en particulier à Las Vegas, où les entreprises cherchent à profiter de la crise pour rogner le salaire de leurs anciens employés. La représentation locale du syndicat du secteur indique que dans certaines chaînes de casinos, les anciens salariés se voient présenter un nouveau contrat avec un salaire horaire inférieur de trois ou quatre dollars par rapport au précédent. La fédération patronale, l'American Hotel and Lodging Association, ne veut pas entendre parler de garantie sur les emplois ni sur les salaires. « Ce type de contraintes crée une charge supplémentaire alors que les employeurs tentent comme ils peuvent de relancer leur activité », déclare ainsi Troy Flanagan, chargé des relations sociales pour la fédération.
Parmi les salariés les plus touchés se trouvent les minorités, noires et hispaniques, qui constituaient jusqu'à présent l'essentiel de la main-d'œuvre dans le secteur de l'hôtellerie-restauration. Selon les statistiques officielles, sur l'ensemble de l'économie, les Latinos ont perdu 6 millions d'emplois entre février et avril et n'en ont regagné qu'à peine la moitié, tandis que les Afro-Américains ont perdu 3,5 millions de postes sur la même période, et n'en ont regagné que 1,3 million.