logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Sur le terrain

Question de droit : Obligation de loyauté et démonstration d’un préjudice tiré d’une activité non concurrente d’un salarié en arrêt maladie

Sur le terrain | publié le : 09.03.2020 | Laurent Beljean

L’obligation de loyauté est inhérente à la relation contractuelle, de sorte qu’elle n’a pas besoin d’être stipulée expressément dans le contrat de travail pour être applicable et opposable au salarié. Cette obligation emporte notamment la conséquence qu’un individu ne peut pas exercer une activité concurrente à son employeur durant une période de suspension de son contrat de travail.

Si la réalisation d’une activité concurrente entraîne manifestement un préjudice au détriment de l’employeur du seul fait de cet exercice, la fourniture d’une activité non concurrente est sanctionnable dès lors que celle-ci cause un préjudice à l’employeur.

Ce préjudice peut-il simplement consister en le versement d’un salaire pendant la suspension du contrat de travail ?

Une salariée, embauchée 25 ans plus tôt en tant que secrétaire commerciale par une entreprise de vente de bijoux, était placée en arrêt de travail à compter du mois de janvier 2012 pour une durée de six mois. Durant cette période, il était constaté par huissier que cette dernière exerçait une activité au sein d’une autre société. La salariée était licenciée pour faute grave en raison d’un manquement manifeste à son obligation de loyauté.

Cette dernière saisissait la juridiction prud’homale de différentes demandes, tendant notamment à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée faisait valoir que l’activité de l’entreprise au sein de laquelle on l’avait vue n’était pas concurrente de celle de son employeur.

De son côté, l’employeur arguait qu’il avait subi un préjudice en versant à la salariée une indemnité complémentaire à l’allocation journalière de sécurité sociale alors que celle-ci travaille pour une autre entreprise.

La cour d’appel estimait le licenciement pour faute grave fondé, considérant que l’employeur avait subi un préjudice suffisant par le versement du complément de salaire.

À tort selon la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 26 février 2020, estime que l’exercice d’une activité pour le compte d’une société non concurrente à celle de l’employeur pendant un arrêt de travail ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté. Il s’agit en conséquence pour l’employeur de démontrer un préjudice particulier qui ne saurait résulter du seul paiement pendant l’arrêt de travail des indemnités complémentaires aux allocations journalières.

La position de la haute juridiction a de quoi interpeller, puisqu’un salarié pourrait alors cumuler le versement du maintien de son salaire pendant un arrêt maladie avec la rémunération résultant de son activité pour le compte d’une autre société non concurrente à son employeur. Souhaitons que la décision soit tout autre si l’employeur justifie d’un préjudice tiré de la désorganisation subie par son entreprise du fait de l’absence pour maladie de son salarié.

Auteur

  • Laurent Beljean