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Les start-up en France : un feu de paille ?

Les clés | À lire | publié le : 09.03.2020 | Lydie Colders

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Les start-up en France : un feu de paille ?

Crédit photo Lydie Colders

Dans Start-up mania, le journaliste économique Michel Turin livre une enquête à charge, bien documentée, sur le « mythe extravagant » des start-up, brocardant « ce fantasme » de l’avenir promu par Emmanuel Macron. Un regard sans concession sur les dessous « de la french tech », des financements à l’amateurisme des entrepreneurs.

Sur un ton caustique, Michel Turin critique dans son livre cette fièvre du financement des start-up qui a gagné la France, alors que les profits et l’emploi seraient loin d’être au rendez-vous. Aujourd’hui, « la moindre création d’entreprise est labellisée start-up, qu’elle fasse ou non appel aux technologies les plus disruptives », et même si le projet tient surtout « du storytelling », pointe-t-il. Le journaliste n’est pas le premier à soulever ce problème, mais son enquête fouillée a l’intérêt d’étudier le cas français.

Un taux d’échec record

Décryptant finement les circuits de financement (capital-risqueurs ou fonds d’investissement, y compris créés par de grands groupes), il montre, chiffres à l’appui, que si les levées de fonds français augmentent (4 milliards d’euros en 2018), au niveau européen, « la France reste un nain » en matière d’économie numérique, « alors que la frénésie générée par la start-up nation frise le ridicule ». Car le taux d’échec des start-up serait de 80 % dans les deux ans, selon ses sources. Que ces jeunes créent des applications, investissent le marché de la formation professionnelle, du bien-être ou du coworking (l’enquête regorge de cas dans le quartier du Sentier à Paris), les start-up seraient donc loin d’apporter « une contribution significative au marché de l’emploi », encore moins durable selon lui. L’auteur craint ainsi que cet argent risqué qui coule à flots en France sur des projets peu viables ne provoque à terme « une bulle spéculative », venue des États-Unis…

Le journaliste tourne aussi en dérision ce culte de l’entreprenariat version start-up qui gagne les grandes écoles. Ou critique leurs codes et leurs conditions de travail Importés des États-Unis : « Beaucoup de start-up n’ont pas la moindre culture d’entreprise. Elles se contentent de singer les codes des Gafa », note-t-il. Soit un leader décontracté mais ultra « présent », un faux management collaboratif qui ne romprait pas « avec le taylorisme », des jeunes bac + 5 « embauchés en CDD pour exécuter des tâches répétitives » et « une ambiance de travail prétendument décontractée » qui masque une pression intense ou des horaires à rallonge. Si cette partie manque un peu de faits, dans l’ensemble, cet envers du décor « de la start-up nation » est rondement mené et instructif.

Auteur

  • Lydie Colders