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Gestion des effectifs : EDF a préparé en amont l’extinction du site de Fessenheim

Sur le terrain | publié le : 02.03.2020 | Mathieu Noyer

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Gestion des effectifs : EDF a préparé en amont l’extinction du site de Fessenheim

Crédit photo Mathieu Noyer

La fermeture de la centrale déclenche un processus de reclassement de plus de 600 salariés, dans lequel le temps est à la fois un allié et une contrainte.

Fessenheim s’éteint… et ses effectifs avec. La fermeture de la plus vieille centrale nucléaire française a commencé à devenir réalité le 22 février, par la mise à l’arrêt du premier de ses deux réacteurs – le second suivra le 30 juin. Elle va connaître un processus de plusieurs années, durant lesquelles la technique et les RH emprunteront deux courbes parallèles de gestion du déclin, aussi précises l’une que l’autre. Côté emploi, cette pente descendante est jalonnée de seuils : de 645 aujourd’hui, le nombre de salariés passera à 450 à la fin de cette année, puis à 300 en 2023 et à 60 en 2025. L’échéance dans trois ans correspond à la fin du retrait du combustible, la présence d’une source radioactive exigeant ce niveau incompressible d’effectifs. Le rendez-vous dans cinq ans correspond, lui, au début du démantèlement de la centrale, qui laissera sur place ce nombre résiduel d’agents EDF, dans des métiers comme la mécanique ou la robinetterie, pendant une quinzaine d’années.

En somme, EDF dispose de temps pour reclasser son personnel. « C’est à la fois une chance et une difficulté. D’un côté, l’entreprise n’a pas la pression de devoir trouver une solution à tout le monde en même temps. Mais de l’autre, les salariés ont aussi leur propre calendrier, en fonction de leurs projets personnels et familiaux, commente Anne Laszlo, déléguée CFE Énergies (branche de la CFE-CGC) à Fessenheim. Il s’agit de faire coïncider au mieux l’un et l’autre. »

Pour y parvenir, EDF a lancé dès 2018 un « dispositif individualisé » d’accompagnement des salariés. En leur mettant à disposition en amont les services RH de la centrale et du groupe, mais aussi des psychologues et assistances sociales, il donne les moyens de construire un parcours serein en plusieurs étapes : gestion des « conséquences psychologiques de la fermeture du site », élaboration du projet de mobilité professionnelle ou géographique, mise en œuvre de celle-ci – assortie d’aides financières – gestion de fin de carrière des seniors, et prise en compte des besoins d’emploi du conjoint. Un total de 2 500 entretiens ont déjà été menés par les conseillers en mobilité d’EDF.

Cellule pour les sous-traitants

La direction dresse la liste des compétences clés à conserver jusqu’à un certain temps. « Elles sont liées aux contraintes d’organisation pour l’application du Plan d’urgence interne, par exemple la nécessité de radioactivistes jusqu’à l’évacuation complète du combustible », souligne-t-elle. Elle a également choisi, d’ores et déjà, les 60 qui resteront pour le démantèlement, « parmi 150 candidats », précise-t-elle. En parallèle, elle recueille les vœux des salariés. Hormis quelques « très rares cas » de démissions pour projet personnel selon les syndicats, l’alternative consiste à rejoindre une autre centrale nucléaire ou à intégrer une autre entité d’EDF dans la région.

Ces reclassements sont suivis par une commission paritaire trimestrielle. « Le premier cas de figure ne pose pas de problème : l’ingénieur ou le technicien mobile est demandé, et reconnu pour ses compétences, relate Anne Laszlo. Le second est un peu plus compliqué. » Selon les syndicats, il faut gérer « un changement de culture, bien qu’on reste dans la même grande maison » et les places peuvent manquer pour satisfaire la demande, du fait de restructurations récentes comme chez Enedis, ou de vagues d’embauches opérées dans les dernières années, en l’occurrence dans la branche hydroélectrique très implantée en Alsace au bord du Rhin. « Mais les choses peuvent encore bouger, c’est dans quelques années qu’on pourra dresser le bilan, », estime Anne Laszlo.

Fessenheim, ce sont aussi des sous-traitants à titre permanent, avec leur personnel de gardiennage, logistique, entretien ou prestations spécialisées en milieu nucléaire. Ces effectifs vont également décliner selon un processus planifié et parallèle. Les seuils se situent à 150 personnes à la fin de cette année (contre 280 fin 2019) puis à 100 en 2023. À leur intention, une « cellule d’aide au redéploiement » fonctionne depuis l’an dernier. Elle associe l’État, Pôle emploi, EDF, la région Grand Est, la chambre de commerce et d’industrie d’Alsace et le Groupement des industriels de la maintenance qui réunit ces sous-traitants du nucléaire. Elle est animée par le cabinet Altedia. Dotée de 470 000 euros, elle a suivi 166 salariés depuis son installation, pour la préparation à la recherche d’un nouvel emploi et l’orientation vers des formations. Ce second cas de figure a concerné 60 personnes pour l’heure.

Auteur

  • Mathieu Noyer