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« L’adaptabilité des entreprises doit être mise en avant »

Le point sur | publié le : 24.02.2020 | Judith Chétrit

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« L’adaptabilité des entreprises doit être mise en avant »

Crédit photo Judith Chétrit

Depuis plus de 15 ans, l’Association française des aidants milite pour la reconnaissance du rôle des proches aidants. Sa directrice, Clémentine Cabrières, note que les entreprises s’emparent davantage du sujet, mais qu’il reste des écueils.

Quel est le cadre de votre intervention auprès des entreprises ?

Notre association traite du sujet de la conciliation de la vie personnelle et professionnelle, en ayant notamment une action auprès des services d’action sociale au travers de la réalisation d’enquêtes, de conférences et de formations en présentiel et en ligne. Pour certaines, nous intervenons dès la mise en place de la réflexion, pour d’autres lorsqu’il y a déjà un cadre. Depuis 2012, le sujet a beaucoup évolué et il y a une plus grande prise en considération par l’ensemble de la société et des entreprises, surtout les plus grandes qui ont des moyens organisationnels d’accompagnement. Toutes les études montrent que ce qui guette les proches aidants est le surmenage. Ce qui explique pourquoi le sujet a pu en partie migrer de l’action sociale vers les départements ressources humaines ou RSE. Il faut toujours s’adapter aux populations de métiers, au positionnement et à la culture de l’entreprise.

Quels sont les chantiers prioritaires ?

Le premier sujet pour les aidants est le temps. C’est ce qu’ils demandent avant tout dans un climat de confiance et d’écoute. Souvent, il y a un ensemble de dispositifs mis en œuvre, comme le télétravail, les aménagements horaires, les RTT ou une organisation plus flexible du collectif de travail sans que cela ne soit spécifiquement fléché vers les aidants. Il faut aussi faire attention au vocabulaire utilisé quand on s’adresse à des proches aidants, surtout lorsqu’une multiplicité d’acteurs dans l’entreprise s’emparent du sujet. Le ton ne doit pas être injonctif ou prescriptif pour une inscription à une formation ou l’appel à une ligne de téléassistance, par exemple : c’est le libre choix qui doit primer et la capacité des personnes à agir et à choisir.

Sur quoi porte votre vigilance ?

Nos formations portent sur la relation d’aide et sur le rôle et la place de chacun. Car cette triangulation qui se joue déjà au domicile entre la personne aidée, l’aidant et le professionnel de santé peut aussi se retrouver dans l’entreprise qui listerait une série de choses à faire. Ce n’est pas en proposant un ensemble de services ou en externalisant auprès d’une plateforme qu’une entreprise peut dire qu’elle a répondu à un sujet qui est vivant et dynamique. Comme dans le champ de la formation et des compétences, il faut mettre en avant la notion d’adaptabilité et de parcours pour la question des salariés aidants car ces personnes évoluent aussi dans leur cheminement avec une différence en fonction de l’évolution de la dépendance liée à l’âge, à la maladie ou au handicap. Il faut également réussir à faire dialoguer des acteurs qui n’ont pas les mêmes cultures professionnelles.

Jusqu’où les entreprises peuvent-elles améliorer le repérage des situations d’aidants ?

L’autre enjeu est celui de l’image et des représentations. Par exemple, lorsqu’une entreprise met au point un dispositif particulier pour la journée nationale des aidants, en octobre, cette mobilisation peut être utile car visible mais elle peut aussi desservir l’entreprise si elle s’accompagne de frustrations de la part de certains salariés qui ne se sentiraient pas accompagnés le reste du temps. Le repérage peut être aussi contre-productif s’il conduit à la stigmatisation et non à la prise en compte d’une diversité de situations. Il faut prendre la notion de statut avec d’extrêmes précautions car celui-ci donne des droits mais aussi des obligations qui peuvent être moralisatrices sur la manière dont chacun peut choisir d’accompagner un proche. Chaque situation génère des choix différents. C’est pourquoi, avant de travailler avec une entreprise, nous devons nous assurer qu’il y a un engagement et un questionnement de sa part.

Auteur

  • Judith Chétrit