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Le fait de la semaine

Santé : Coronavirus : les entreprises françaises se préparent

Le fait de la semaine | publié le : 10.02.2020 | Gilmar Sequeira Martins

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Santé : Coronavirus : les entreprises françaises se préparent

Crédit photo Gilmar Sequeira Martins

L’épidémie de coronavirus 2019-nCoV qui touche la Chine contraint les entreprises à stopper leur activité mais leur donne aussi l’occasion de revoir leurs plans de continuité d’activité, voire de lancer des actions de solidarité.

L’épidémie de coronavirus 2019-nCoV s’étend. Apparue en décembre dans la région de Hubei, en Chine, elle a déjà infecté plus de 25 000 personnes et causé près de 500 décès. Devant une affection dont la vitesse de propagation semble très rapide puisque de nombreux cas sont vite apparus dans d’autres points du globe, les pouvoirs publics ont pris des mesures drastiques. Mais les entreprises présentes sur place (par exemple PSA, Renault, Sanofi et même Club Med qui possède sept villages en Chine) ont dû également adopter des mesures radicales, à l’instar de l’équipementier automobile français Delfingen dont les deux sites de production chinois, employant chacun 80 personnes (sans aucun expatrié), sont situés précisément dans la région la plus atteinte par l’épidémie. « Concernant le site de Wuhan, nous nous sommes conformés aux mesures dictées par les autorités locales, explique Christophe Clerc, vice-président de l’entreprise. L’usine est pour l’instant fermée et aucune date de réouverture n’est prévue. Elle devrait le rester au moins jusqu’au 14 février. Notre priorité absolue est la préservation de la santé de nos collègues locaux. Nous avons interdit à nos salariés tout déplacement en Chine ou en provenance de ce pays à destination d’autres sites. Parmi nos salariés chinois, trois personnes seraient atteintes par le virus et neuf sont actuellement en observation. » Pour les entreprises soumises au droit français, les enjeux liés à une contamination comme celle déclenchée par le coronavirus 2019-nCoV sont importants. Le Code du travail prévoit en effet des obligations conséquentes à l’article L4121-1. L’employeur est en effet tenu de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». Ce même article indique que ces mesures passent par des « actions de prévention des risques professionnels », des « actions d’information et de formation », enfin « la mise en place d’une organisation et des moyens adaptés ». Cet article prévoit que « l’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ». Il doit garantir la sécurité ainsi que l’intégrité physique et mentale de ses salariés. Une obligation qui prendrait toute sa mesure si l’épidémie venait à s’étendre en France.

Évaluer les risques

Compte tenu de ces obligations, « la première étape consiste donc à évaluer les risques afin de combattre [la cause] à la source mais, dans le cas d’une épidémie, l’employeur n’a pas prise sur un tel phénomène, comme cela pourrait être le cas face au risque d’incendie », rappelle Laetitia Ternisien, avocate du cabinet Jeantet. L’employeur doit cependant « informer les salariés, rappeler les bonnes pratiques, les former et mettre à leur disposition des équipements comme des masques ou des gels hydro-alcooliques afin de limiter la propagation de l’épidémie ».

Pour autant, l’obligation de cesser l’activité n’est pas, ou pas encore, d’actualité. « La question ne se pose que si l’épidémie prend des proportions telles qu’une grande partie de la population est touchée », rappelle l’avocate. Avant ce stade, l’employeur peut proposer à ses salariés d’adopter le télétravail pour éviter les contacts propices à la propagation de l’épidémie. « La décision de procéder à une cessation d’activité est laissée à l’appréciation de l’employeur et elle ne peut pas lui être reprochée, de même que le fait de ne pas avoir imposé le télétravail, ajoute Laetitia Ternisien. Si dans une entreprise de 300 salariés, une centaine de personnes sont contaminées, la question de la cessation d’activité deviendra naturellement d’actualité. » La spécialiste précise toutefois que « la cessation d’activité doit être envisagée comme un dernier recours quand aucune autre solution n’est envisageable ».

Chez les DRH, l’inquiétude est réelle mais reste mesurée, estime Laurence Breton-Kueny, vice-présidente de l’ANDRH et animatrice de la commission santé qualité de vie au travail : « Aujourd’hui, nous ne sommes pas dans la même situation qu’en 2009 où avait été déclaré un état de pandémie grippale qui avait conduit la Direction générale du travail à diffuser une circulaire [DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 – NDLR]. Pour l’instant, nous en sommes au stade des recommandations aux employeurs. »

Actions de solidarité

Bien que lointaine, cette pandémie grippale de 2009 peut avoir des répercussions positives aujourd’hui. À l’époque, beaucoup d’entreprises avaient constitué des stocks de masques FFP2 qui permettent de protéger le porteur contre les risques transmissibles par voie aérienne. Les entreprises sont donc mieux préparées qu’en 2009, estime la représentante de l’ANDRH. Pour autant, « la problématique reste la même, se préparer et prendre les mesures nécessaires notamment en actualisant les plans de continuité d’activité ». Ce précédent peut cependant selon Laurence Breton-Kueny constituer une opportunité dans la situation actuelle. Elle conseille aux entreprises de revoir ces stocks et de vérifier la validité des masques, « tout en sachant que ces derniers peuvent rester valables après la date de péremption mentionnée sous certaines conditions », ajoute-t-elle.

C’est dans cette voie que Delfingen s’est engagée. Constatant les difficultés dans lesquelles se trouvent les employés de ses sites chinois, l’entreprise a lancé une action de solidarité. « Nos collègues en Chine sont dans une situation critique, indique Christophe Clerc. Ils nous disent avoir des difficultés à accéder à certains médicaments et à des masques. Nous ne pouvons rien faire pour les médicaments, mais nous allons leur envoyer des masques dans les jours à venir. » Un acte de solidarité qui rappelle que l’économie garde encore une dimension bien humaine.

Indemnités journalières dès le premier jour

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Un décret publié le 1er février prévoit des dérogations « pour les personnes faisant l’objet d’une mesure d’isolement du fait d’avoir été en contact avec une personne malade du coronavirus ou d’avoir séjourné dans une zone concernée par un foyer épidémique de ce même virus et dans des conditions d’exposition de nature à transmettre cette maladie ». Le texte prévoit d’ouvrir le droit aux indemnités journalières sans que soient remplies les conditions d’ouverture de droit relatives aux durées minimales d’activité ou à une « contributivité minimale ». Il prévoit également de ne pas appliquer les délais de carence, afin de permettre le versement des indemnités journalières dès le premier jour d’arrêt.

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins