Pour accélérer la digitalisation des outils de formation, le groupe industriel a fait appel à une alternante de l’école numérique portée par le Medef Auvergne-Rhône-Alpes. Une expérience tant pour l’entreprise que pour cette ingénieure chimiste, intronisée « digital transformer ».
« La transformation numérique, beaucoup en parlent, peu le font. C’est un peu comme l’amour à l’adolescence. » C’est avec une pointe d’humour que Laurent Fiard, président du Medef Lyon-Rhône, présente The Nuum Factory. Face aux besoins croissants des entreprises dans le secteur IT, cette école du numérique portée par le Medef Auvergne-Rhône-Alpes et labellisé Campus Région du numérique a créé des parcours d’un an en alternance entièrement rémunérés et financés pour les jeunes diplômés, salariés ou en recherche d’emploi.
Issue de la première promotion, Hamida Chauvin a ainsi participé au développement d’outils de formation numérique pour les opérateurs d’Adisseo, la filiale du groupe de chimie chinois Bluestar spécialisée dans la nutrition animale. « Après avoir travaillé dans un laboratoire comme ingénieure chimiste, je me suis rendu compte qu’il me manquait quelque chose. Ce qui m’a plu tout de suite est que la Nuum Factory s’adresse à des bac + 5 et il n’est pas toujours évident de compléter son parcours métier à ce stade. Je voyais bien que le numérique était partout. Et en ne le comprenant pas, on peut vite se sentir dépassé. » Elle rejoint alors ce cursus de 600 heures de cours et de 65 % de temps passés en entreprise pour obtenir un diplôme d’expert en informatique enregistré au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP).
Au sein du groupe Adisseo, une équipe travaille depuis 2017 à la création d’une application sur tablette en utilisant des QR code pour rendre les formations interactives, les améliorer et remplacer les classeurs de photographies des équipements d’usines utilisés pour les nouveaux opérateurs. « Nous avons monté cette application maison. Personne ne travaillait dans la digitalisation, c’est une compétence clé que nous n’avions pas en interne. Et cela crée beaucoup de difficultés. Sur nos sites, nous avons également des contraintes spécifiques, car nous n’avons ni 4 G, ni wifi et devions toucher tous les domaines : la théorie, la technique, mais aussi les aspects de sécurité et d’environnement liés aux activités propres à la chimie », explique Paul Gaona, chef du projet de digitalisation de la formation chez Adisseo. « Nous voyons bien la difficulté des sociétés à se lancer concrètement dans le digital. Ceux qui ont vraiment des moyens vont y aller, mais il n’est pas simple d’appréhender tous les paramètres.
Le digital ébranle toute l’entreprise de haut en bas, nécessite l’implication de chacun et une bonne collaboration avec le service IT. Mais en pratique, les gens du métier et les informaticiens ne parlent pas forcément le même langage et dans notre cas, comprendre le génie chimique ne s’invente pas », poursuit-il. À la croisée des chemins entre l’ingénierie chimique et la digitalisation, le profil d’Hamida Chauvin devient alors une opportunité.
« Être digital transformer, c’est comprendre les besoins de l’entreprise et chercher comment y répondre », décrit Hamida Chauvin. Pour cela, saisir à la fois l’expertise des métiers et celle du digital a été un atout de poids. « Des chefs d’entreprise et des managers peuvent se trouver un peu démunis pour faire des choix stratégiques, car les deux domaines ne se comprennent pas forcément », ajoute celle qui se voit désormais poursuivre la voie qui allie la transformation digitale à ses connaissances en chimie. « Aujourd’hui, Adisseo n’a pas encore pris la décision d’investir dans cette compétence, mais l’entreprise a compris que pour faire de la digitalisation, il faut des personnes capables d’appréhender beaucoup de domaines. Quand vous vous lancez dans du digital, il faut que cela corresponde à un vrai besoin et que la démarche s’adapte à votre entreprise, à votre système informatique et aux salariés », poursuit Paul Gaona. Depuis la rentrée, une trentaine d’élèves ont rejoint la deuxième promotion de la Nuum Factory pour valoriser leurs études supérieures par une expérience concrète de transition numérique. Dans cette école du Medef, les programmes sont conçus par l’École privée des sciences informatiques (EPSI) et sont actualisés selon les attentes opérationnelles des PME et ETI installées dans la région.