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Sur le terrain

Question de droit : L’absence d’IRP sans PV de carence cause nécessairement un préjudice au salarié

Sur le terrain | publié le : 27.01.2020 | Laurent Beljean

Depuis quelques années, la jurisprudence opère une distinction en matière d’indemnisation des salariés au titre de l’exécution de leur contrat de travail, selon les types de préjudices invoqués. Si certains manquements de l’employeur rendent automatique l’existence d’un préjudice (dépassement de la durée maximale quotidienne ou hebdomadaire de travail, non-respect des temps de pause quotidiens), d’autres manquements de l’employeur nécessitent que le salarié démontre tout à la fois l’existence du préjudice et son importance.

Qu’en est-il en l’absence de respect par l’employeur de ses obligations en matière de représentation du personnel ?

Un salarié, chargé d’affaires au sein d’une entreprise de consulting, fait part à son employeur après plus de 18 ans d’activité de son intention de partir à la retraite. Durant son préavis, celui-ci saisit la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives principalement à l’exécution de son contrat de travail. Parmi celles-ci figure une demande de dommages-intérêts tirée du non-respect par son employeur de ses obligations en matière d’élection des représentants du personnel.

Pour sa défense, l’employeur arguait que le salarié n’avait jamais formulé de demande d’élections pendant ses 18 années de collaboration au sein de l’entreprise, et qu’il ne démontrait pas l’existence d’un préjudice du fait de cette carence. Cette argumentation était suivie par la Cour d’appel.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 janvier 2020, vient contredire les juges du fond. Les Hauts magistrats considèrent en effet que le salarié n’a pas à rapporter la preuve d’un quelconque préjudice pour obtenir des dommages-intérêts.

Autrement formulé, et dès lors que l’employeur n’a pas accompli, alors qu’il y est légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place des instances représentatives du personnel, il commet une faute causant nécessairement un préjudice aux salariés privés de la possibilité de disposer d’une représentation collective de leurs intérêts. Il importait peu dans cette affaire que le salarié soit resté muet sur cette carence pendant toute la durée de sa collaboration. Bien évidemment, il revient néanmoins à l’intéressé de démontrer l’importance de ce préjudice, qui ne peut être que de principe en l’absence d’éléments concrets.

On connaissait les conséquences d’une absence de représentation du personnel sans procès-verbal de carence en matière de licenciement collectif pour motif économique ou de rupture de contrat de travail pour inaptitude. À l’heure où les barèmes Macron semblent plafonner les indemnités pouvant être revendiquées du fait de la rupture des relations contractuelles, cette position jurisprudentielle pourrait venir compléter le préjudice total indemnisé au profit des salariés.

Auteur

  • Laurent Beljean