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Sur le terrain

Organisation du travail : L’armée rationalise son site logistique de vêtements

Sur le terrain | publié le : 27.01.2020 | Lucie Tanneau

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Organisation du travail : L’armée rationalise son site logistique de vêtements

Crédit photo Lucie Tanneau

Passer d’une méthode artisanale à une méthode industrielle : c’est ce qu’a réalisé le centre logistique de vêtements de l’armée de Châtres. Les fiches de postes, process et conditions de travail ont été revus lors du déménagement du site.

Dans l’entrepôt géant (36 000 m2 de stockage), le ballet des chariots est impressionnant. À Châtres (Aube), le tout récent Établissement logistique du commissariat des Armées (Éloca), entrepôt de nouvelle génération dédié à la distribution des effets militaires, a été inauguré début novembre dernier. En stock : 12 millions d’articles et 7 000 références pour habiller les trois armées (terre, mer, air : soit 220 000 personnes) en treillis, tenues de combat, de pompier, chemiserie pour les sorties… Le projet de rationalisation date de 2016. Il existait alors 14 Éloca. Il n’en reste que cinq dont trois gèrent l’habillement, c’est-à-dire la réception des commandes, le stockage et la livraison partout dans le monde. Le site de Châtres qui emploie 11 militaires et 90 civils (ouvriers d’État, fonctionnaires techniques ou administratifs, salariés sous contrat) est le plus important. Il a récupéré la gestion de l’armée de l’air et de la Marine nationale qui avaient auparavant leurs propres centres logistiques. « L’ancien bâtiment occupait un site de 33 hectares soit 40 bâtiments dédiés à la logistique, sans chauffage, et avec des pertes de charges fréquentes et un travail parfois en extérieur dans des conditions difficiles », précise le commandant Xavier Bomba, directeur depuis 2017. « Aujourd’hui, le site logistique, construit à proximité pour éviter les mobilités, s’étend sur 36 000 m2 et les bureaux administratifs et la cantine sur 700 m2. » Le déménagement a été l’occasion de revoir l’ensemble des process et métiers. « Nous avons été accompagnés par des consultants d’Ernst and Young pendant 18 mois afin de faire les études en amont avec une contrainte : l’activité ne devait jamais s’arrêter », explique Xavier Bomba. Les études ont permis de confronter la logistique civile au milieu militaire. L’Éloca de Châtres livre 150 points en métropole (et devrait bientôt en approvisionner 400) comme un grossiste, un semi-grossiste, ou parfois un vendeur au détail. La chaîne d’approvisionnement a été rationalisée, de même que les relations avec les fournisseurs et le cadencement. 30 millions à 40 millions d’euros ont été investis. « Nous avons mis en place un nouvel outil pour optimiser le déplacement des stocks : le personnel a été formé, notamment à la commande numérique, par les consultants. » Les salariés ont aussi été formés au nouveau système d’information (les responsables par les éditeurs de logiciel, les opérateurs sur place).

Les fiches de postes revues

Il a fallu faire face à certaines réticences. Avec une moyenne d’âge de 50 ans et des salariés ayant parfois 30 ans d’ancienneté, les mauvaises habitudes reviennent vite. « Nous avons fonctionné par ateliers de 12 personnes pour retravailler les process métiers et les fiches de postes ont ensuite été revues », décrit le commandant. Avec un double objectif : gagner du temps et améliorer la qualité de vie au travail. « Nous avons, par exemple, fait modifier les cartons d’emballage de nos fournisseurs afin de limiter les TMS : avant les salariés étaient obligés d’ouvrir les cartons au cutter, ce qui occasionnait parfois des coupures, ou des dégradations sur les effets. Aujourd’hui, les cartons s’ouvrent sans outils donc plus rapidement et avec moins de risque. » Les conditions en entrepôt ont aussi été améliorées avec du chauffage (seulement la nuit pour limiter le bruit), des tapis antifatigue neufs pour limiter les maux occasionnés par les heures à piétiner, la suppression de la pointeuse afin de favoriser le management de contact, un système d’enregistrement des commandes numériques (qui évite le stylo à prendre et poser des centaines de fois par jour). Des processus travaillés avec la médecine du travail et des ergonomes. Des sessions obligatoires de réveil musculaire seront aussi mises en place pour l’ensemble des salariés (administratif, stockage et expédition et sur la chaîne) dès 2020. « Les formations aux gestes et postures ne restent jamais longtemps en tête, on a donc décidé de former deux personnes par service afin d’assurer cet exercice chaque matin sur le temps de travail », réagit Xavier Bomba.

« Les nouvelles manières de faire ont suscité une certaine anxiété, mais la plus grande appréhension portait sur le fait de passer d’une cantine à un self-service et la transition s’est bien passée donc les autres changements ont été plus faciles », s’étonne le directeur du site. « Il reste des process à améliorer, mais l’équipement et les pratiques ont réellement été modernisés ». Comme un passage au 21e siècle, en 18 mois.

Auteur

  • Lucie Tanneau