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Sur le terrain

Formation : Le textile vosgien mutualise sa Gestion RH

Sur le terrain | publié le : 16.12.2019 | Pascale Braun

Après des décennies de fonte des effectifs, les adhérents du Syndicat textile de l’Est recommencent à recruter. L’organisation professionnelle a mutualisé les services d’une DRH pour évaluer les besoins des entreprises et recréer des compétences disparues.

Comment embaucher une brodeuse, un noueur ou un bonnetier quand aucune école ne forme plus à ces métiers ? Pour ne pas être pris de court, le Syndicat textile de l’Est, qui regroupe 36 sociétés dans la vallée vosgienne, a demandé un diagnostic territorial financé par la Direccte, puis recruté une DRH chargée d’estimer les besoins de ses membres. Engagée en janvier 2019 à mi-temps pour une durée d’un an, la consultante indépendante Christine Goddyn a, dans un premier temps, affiné et validé le constat des services de l’État : après quatre décennies de crise qui ont vu fondre ses effectifs, passés de 30 000 à 3 000 emplois, le textile vosgien embauche à nouveau. En analysant – tout en veillant à leur confidentialité – les réponses des 26 entreprises ayant rempli son questionnaire, Christine Goddyn a recensé 148 postes à doter sur la période 2019-2021. « La moitié de ces recrutements portent sur la maintenance et les postes support, déjà difficiles à pourvoir. L’autre moitié concerne des emplois de production et requièrent des compétences introuvables en l’état », indique la consultante spécialisée dans la mobilité professionnelle, le recrutement et la GPEC.

Diagnostiquer les carences

Les anciens bonnetiers, tisserands ou teinturiers sont, pour la plupart, partis à la retraite et aucune école locale n’a choisi de faire perdurer des formations dans ces métiers qui semblaient condamnés. Or, la filière vosgienne, qui doit son salut à un positionnement haut de gamme exigeant une grande technicité, risque à présent de voir sa renaissance compromise par un manque de savoir-faire. Le Syndicat textile de l’Est a donc missionné sa DRH non seulement pour diagnostiquer les carences, mais aussi pour y répondre à court et moyen termes. Un appel à candidatures, étayé par de petites vidéos promotionnelles sur les réseaux sociaux, repris par la plateforme spécialisée Frenchtex et relayé par Pôle emploi a permis de rassembler 300 curriculum vitae. « Nous avons été ravis par cet afflux, alors même que les enquêtes d’opinion laissaient apparaître une mauvaise image des métiers du textile sur le plan national. Pour maintenir l’attachement des Vosgiens à leur filière textile, nous avons organisé des journées portes ouvertes et des rencontres dans les lycées que nous poursuivrons en 2020 », indique Laurence Rayeur, secrétaire générale du Syndicat textile de l’Est.

Les CV reçus ne correspondaient pas tous, tant s’en faut, aux attentes. La formation prévue pour 2019 se limitait de surcroît à 15 personnes. Après une première sélection pour vérifier les prérequis et les fondamentaux – une expérience du travail d’équipe et de la production et la compréhension des consignes élémentaires –, Christine Goddyn a retenu 25 personnes sur la base des compétences par habileté, puis planifié des « speed-jobing » avec les employeurs. Au terme de ces rencontres, 14 stagiaires ont intégré une formation de sept semaines réalisée sur mesure par le CFA papetier de Gérardmer. Douze de ces candidats, qui avaient au préalable découvert les entreprises à l’occasion d’une Préparation opérationnelle à l’emploi collective, ont signé leur contrat dès l’issue de leur formation, soit en CDD, soit en intérim, soit dans le cadre d’un contrat de professionnalisation.

Cette initiative de recrutement collectif représente un coût global de 85 000 euros, dont 40 000 euros de frais de formation pris en charge à 80 % par l’ex-Opcalia Textile-Mode-Cuir.

Plus fort ensemble

La réforme de la formation professionnelle prévue par la loi de septembre 2018, qui a affilié cette branche à l’opérateur interindustriel Opco 2i, a ouvert une période de flottement. Mais la filière textile espère voir reconduire les financements liés au maintien des savoir-faire. « Nous avons prouvé notre capacité à coopérer et à créer des formations, ce qui n’aurait pas été possible voici quelques décennies, lorsque prévalait la concurrence. J’y vois le succès du label Vosges Terres Textile, qui a convaincu les entreprises qu’elles étaient plus fortes ensemble », estime Paul de Montclos, PDG de la société de linge de table haut de gamme Garnier Thiebaut, basée à Gérardmer et président du Syndicat textile de l’Est. Initiée voici dix ans, cette « AOC industrielle » a essaimé dans cinq autres régions françaises.

Auteur

  • Pascale Braun