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Yvan William : La chronique juridique

Chroniques | publié le : 16.12.2019 | Yvan William

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Yvan William : La chronique juridique

Crédit photo Yvan William

Risques professionnels Devoir de prévenir, d’agir, mais aussi d’enquêter !

Vitesse et technologie ont sensiblement transformé la nature des risques professionnels et des réponses à apporter en matière de prévention. Bien qu’ils paraissent moins spectaculaires que les dommages physiques, les risques psychosociaux sont tout autant préjudiciables aux salariés et aux collectifs de travail.

La part d’interprétation subjective inhérente aux formes de violences morales trouble la perception du risque et de la responsabilité de l’entreprise et paralyse souvent l’action. Or, en matière de santé au travail, cette responsabilité est assortie d’une obligation de résultat qui impose à l’employeur de prendre toutes « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. » (article L. 4121-1 du Code du travail).

En cas d’incident au titre duquel la responsabilité de l’entreprise est invoquée, il lui incombe de démontrer que cet évènement est étranger à tout manquement à son obligation de sécurité (Cass. soc. 28/05/2014, n° 13-12.485). La charge de la preuve repose donc principalement sur l’employeur et le champ de mise en cause de son obligation de sécurité est de plus en plus vaste.

En matière de harcèlement moral, le législateur a imposé au salarié victime de présenter les éléments matériels laissant supposer l’existence d’un harcèlement. C’est ensuite à l’employeur de prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et que le comportement incriminé est justifié par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (Cass. soc. 08/06/2016, n° 14-13.418).

La prévention du harcèlement moral fait pour autant partie du plan général de prévention que l’employeur doit mettre en place au titre de son obligation de sécurité à l’instar des autres formes de violences au travail. Ce plan ne se limite ni à l’élaboration du document unique d’évaluation des risques professionnels ni à la mise en place d’une procédure spécifique d’alerte (Cass. soc. 01/06/2016, n° 14-19.702).

Pour satisfaire à son devoir de prévention, l’employeur doit en effet justifier avoir pris toutes les mesures nécessaires pour prévenir la situation au titre de laquelle la santé et la sécurité du collaborateur seraient menacées. Sur ce dernier point, l’information et la formation du personnel sont retenues comme un des indicateurs justifiant l’absence de manquement par l’employeur à son obligation de sécurité. En matière de restructuration, la mise en place d’« un plan global de prévention des risques psychosociaux comportant notamment un dispositif d’écoute et d’accompagnement ainsi qu’un dispositif d’évaluation des conditions de vie au travail et de formation des managers » a pu être jugée suffisante (Cass. soc. 22/10/2015 n° 14-20.173).

Outre la prévention, l’employeur qui, « informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser », est réputé avoir satisfait à ses obligations (Cass. soc. 05/10/2016, n° 15-20.140). Les juges appellent donc l’employeur à un devoir d’action, mais surtout d’efficacité. Les mesures prises doivent permettre de protéger la victime des faits rapportés et faire cesser effectivement la situation de risque. Obligation de prévention, d’action, mais également d’enquête. Par une jurisprudence récente, une entreprise a été sanctionnée pour avoir conditionné l’ouverture d’une enquête interne à la preuve par le salarié de faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral. L’obligation générale de sécurité impose qu’une enquête interne soit engagée même si les conditions spécifiques de sa mise en cause au vu de l’interdiction des agissements de harcèlement moral n’étaient pas réunies (Cass.soc. 27/11/2019, n° 18-10.551). La conformité de votre processus d’enquête interne et de gestion des risques psychosociaux devra être analysée à la lumière de ces jurisprudences.

Auteur

  • Yvan William