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Sur le terrain

Question de droit : L’absence de dommages et intérêts pour résistance abusive en l’absence de mauvaise foi de l’employeur

Sur le terrain | publié le : 18.11.2019 | Laurent Beljean

L’autorité de la chose jugée n’est que relative et ne vaut que pour le litige et les parties au procès sur lesquelles elle s’exerce.

Il en résulte qu’un employeur peut refuser contre vents et marées de suivre l’interprétation du juge prud’homal sur telle ou telle problématique, dès lors qu’il fait face à une pluralité de dossiers individuels.

Cette attitude peut-elle conduire le juge à constater une résistance abusive dans l’application de ces décisions ?

Un salarié travaillant dans une entreprise de fabrication de produits alimentaires avait saisi la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir un rappel de prime d’ancienneté, outre le versement de dommages-intérêts pour résistance abusive de son employeur.

L’intéressé considérait en effet que le retard dans le versement de cette somme d’argent tenait au fait que l’employeur refusait d’appliquer correctement les dispositions conventionnelles, ce qui caractérisait une violation volontaire de son obligation et ainsi une résistance abusive dont il entendait obtenir réparation. À l’appui de cette demande, le salarié versait aux débats plusieurs décisions rendues par la même juridiction à l’encontre de son employeur le condamnant déjà à un rappel de prime sur le même fondement.

De son côté, l’employeur faisait valoir que le retard dans l’exécution d’une obligation de paiement d’une somme d’argent ne pouvait s’apprécier qu’au regard des intérêts de retard. Ainsi, faute d’avoir démontré la mauvaise foi de l’employeur ou un préjudice distinct du retard de paiement, le salarié devait être débouté de sa demande.

Le conseil de prud’hommes faisait droit à la demande de dommages-intérêts du salarié, considérant qu’au vu des pièces versées aux débats et en particulier les jugements récents rendus par la juridiction sur la même problématique concernant l’année précédente, l’employeur avait fait preuve de résistance abusive.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 6 novembre 2019, vient censurer cette décision. Les Hauts magistrats ont estimé que les juges du fond n’avaient pas caractérisé l’existence pour le salarié d’un préjudice indépendant du retard apporté au paiement par l’employeur et causé par sa mauvaise foi.

Cette décision apparaît cohérente. Toute autre solution aurait abouti à empêcher un employeur de défendre sa position en justice, cette dernière fut-elle vouée à l’échec.

Il en aurait été autrement en cas d’action collective en interprétation d’un accord collectif, la décision s’imposant alors à la partie succombant une fois passée en force de chose jugée.

Auteur

  • Laurent Beljean