Alors que les restructurations de la SNCF se poursuivent avec l’ouverture à la concurrence du rail en 2020, ce livre publié sous l’égide du Comité central du groupe public ferroviaire (ex-CCE) entend valoriser les savoir-faire des cheminots : dans ce recueil de témoignages, une trentaine d’entre eux racontent leur travail au quotidien : chauffeurs de TGV, contrôleurs, agents de maintenance, aiguilleurs, caténairistes, électriciens… Si les récits sont inégaux, on y apprend beaucoup sur la technicité de certains métiers (agent spécialisé « dans les freins ») mais aussi sur des conditions de travail parfois difficiles : horaires décalés des conducteurs de train, travail de nuit et astreintes des « brigades » de maintenance…

Au fil des témoignages transparaît parfois le malaise de la flexibilité qui gagne du terrain : « Au début de ma carrière, aucun cheminot n’émettait l’hypothèse de quitter la SNCF. Aujourd’hui, je ne sais pas si on peut en dire autant », raconte une conductrice de TER, expliquant que ses horaires peuvent désormais changer d’un jour à l’autre. Le livre illustre aussi une rentabilité qui gagne du terrain : polyvalence des tâches qui s’accroît, prime sur objectifs de vente pour les guichetiers, personnels moins formés. « Beaucoup de mes collègues finissent par être débordés, tombent malades, font des dépressions ou même quittent la SNCF », affirme un agent de manœuvre dans le fret. La sous-traitance gagnerait aussi du terrain, mettant les agents dans une position difficile. Comme ce technicien d’entretien des voies, qui dit qu’un tiers de cette activité est désormais sous-traitée. Et se sent « pris entre deux feux », entre garder son emploi et s’assurer que les travaux d’entretien soient bien faits. Car, selon lui, « la plupart de ces salariés ne connaissent pas leur travail ». Un brin inquiétant… Des paroles de cheminots parfois éclairantes, mais qui laissent un peu sur sa faim. Le livre eut mérité au moins quelques pages expliquant les grandes réorganisations en cours à la SNCF.