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Allemagne : Plus de 400 000 réfugiés sont en emploi

Le point sur | publié le : 11.11.2019 | Marion Leo

De 2015 à 2018, près de 1,6 million de réfugiés sont arrivés en Allemagne. Leur intégration sur le marché du travail se déroule mieux que prévu, estime aujourd’hui l’institut IAB.

Il y a plus de quatre ans, en août 2015, la chancelière allemande Angela Merkel, évoquant les défis posés par l’arrivée de plusieurs centaines de milliers de demandeurs d’asile en provenance de Syrie, mais aussi d’Afghanistan et d’autres régions du monde via la route des Balkans, avait lancé une petite phrase qui allait entrer dans l’histoire : « Wir schaffen das ! » (Nous allons y arriver !). Destinée à rassurer les citoyens sur la capacité d’intégration du pays, cette antienne avait divisé en profondeur la société allemande. Aujourd’hui, les derniers chiffres du rapport sur l’immigration, publié en septembre 2019 par l’IAB, l’Institut de recherche sur le marché de l’emploi, semblent donner raison à la chancelière. « Il est encore trop tôt pour dire si nous y sommes arrivés. Mais nous observons une tendance positive », indique ainsi Yuliya Kosyakova, membre de l’unité de recherche sur l’immigration au sein de l’institut IAB, qui rappelle que près de 1,6 million de demandeurs d’asile fuyant les guerres et les persécutions sont arrivés de 2015 à 2018 en Allemagne, la plupart d’entre eux en 2015. Et d’ajouter : « L’intégration des réfugiés sur le marché du travail se déroule mieux que prévu. »

Un taux d’emploi en constante hausse

Le taux d’emploi des réfugiés en âge de travailler, arrivés depuis 2015 en provenance des huit principaux pays d’origine des demandeurs d’asile (Syrie, Afghanistan, Irak, Érythrée, Pakistan, Nigeria, Somalie et Iran) n’a ainsi cessé de progresser, passant de 9 % en 2016 à 21 % en 2017, puis à 35 % en 2018. « En octobre 2019, ce taux devrait atteindre 40 % », précise la chercheuse. Cela représente environ 410 000 personnes. Parmi elles, un très grand nombre travaille comme intérimaires et exerce souvent une activité simple et faiblement rémunérée, notamment dans les secteurs de la restauration, de la sécurité, du nettoyage, du bâtiment ou encore des soins. Mais environ 50 % des réfugiés actifs sont également employés en tant que travailleurs qualifiés ou spécialistes. « C’est un chiffre étonnamment élevé si l’on considère que seulement un réfugié sur cinq a obtenu une qualification professionnelle ou un diplôme universitaire avant de fuir son pays », précise son collègue Herbert Brücker, qui dirige l’unité de recherche sur l’immigration au sein de l’IAB. Selon lui, cela peut s’expliquer par le fait que de nombreux réfugiés avaient des emplois relativement qualifiés dans leur pays d’origine sans pour autant avoir de diplôme. « Dans des pays comme la Syrie, il n’existe pas d’apprentissage pour les mécaniciens automobiles comme le nôtre. On apprend sur le tas. »

Selon les deux chercheurs de l’IAB, l’intégration des réfugiés sur le marché du travail est meilleure que prévu car elle progresse un peu plus rapidement que lors des précédents afflux de réfugiés, notamment ceux en provenance d’ex-Yougoslavie dans les années 1990 – et cela malgré des conditions de départ en 2015 très difficiles. Traumatismes liés à la guerre et la fuite, procédures de demande d’asile longues en raison de l’arrivée massive de réfugiés dans un laps de temps réduit, difficultés linguistiques… rien ne laissait présager une évolution positive rapide.

Pénurie de main-d’œuvre

Mais plusieurs éléments ont joué favorablement dans l’intégration des réfugiés. À commencer par la bonne santé de l’économie allemande, confrontée à une pénurie croissante de main-d’œuvre. À cela s’ajoute une série de mesures prises par le gouvernement de grande coalition : levée provisoire de la règle de « préférence nationale » qui oblige l’agence pour l’emploi à proposer un poste vacant à un ressortissant allemand ou originaire de l’UE durant un délai de 15 mois avant de pouvoir proposer l’emploi à un réfugié (cette clause a permis aux réfugiés d’être employés comme intérimaires), investissements massifs dans les cours de langue et les cours d’intégration. Sans oublier l’engagement personnel des réfugiés, de nombreux acteurs de la société civile et des entreprises, notamment des PME.

Mais selon Yuliya Kosyakova, de nombreux obstacles se dressent encore sur le chemin des réfugiés n’ayant toujours pas d’emploi : nombre d’entre eux n’ont pas encore pu suivre un cours de langue, n’ont aucune qualification, se heurtent aux lenteurs du système de reconnaissance du droit d’asile ou souffrent de l’obligation de rester dans le lieu de résidence fixé par les Länder. À cela s’ajoute le ralentissement de l’économie allemande. En septembre dernier, plus de 31 500 réfugiés ont perdu leur emploi, a averti l’Agence fédérale pour l’emploi (BA). Daniel Terzenbach, en charge de l’intégration des réfugiés sur le marché du travail au sein de la direction du BA, a d’ailleurs appelé les entreprises et les autorités à « trouver immédiatement un autre emploi pour les réfugiés au chômage ».

Auteur

  • Marion Leo