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Addictologie : Ces entreprises qui aident à se passer du tabac

Le point sur | publié le : 04.11.2019 | Valérie Auribault

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Addictologie : Ces entreprises qui aident à se passer du tabac

Crédit photo Valérie Auribault

Pour la quatrième année consécutive, Santé publique France lance le Mois sans tabac en novembre. De plus en plus, les entreprises s’impliquent et s’entourent d’experts afin d’encourager leurs salariés à renoncer à la cigarette. Outre les retombées sur la santé, l’impact économique est réel.

« En novembre, on arrête ensemble. » C’est le slogan de Santé publique France pour annoncer aux entreprises et à leurs salariés que c’est le mois où l’on s’oxygène et où l’on se serre les coudes. Le mois où l’on guette celui ou celle qui va fléchir pour mieux l’encourager. Car en novembre, pas question de flancher. Il s’agit de relever le défi face à la cigarette. Lancée en 2016 par Santé publique France, l’agence nationale en charge de la santé publique, cette opération Mois sans tabac est renouvelée ce mois-ci pour la quatrième année consécutive. « Dès que nous avons eu connaissance du projet, nous avons souhaité nous y associer, indique le docteur Hugues Leloix, médecin coordinateur au sein du groupe Peugeot PSA. Depuis, nous y participons tous les ans. L’efficacité de la démarche est significative. Dans nos divers services, y compris au sein de nos usines de production, grâce à cette manifestation, une ou plusieurs personnes ont arrêté de fumer. L’opération vise à démontrer à chaque fumeur qu’il est en capacité de se passer du tabac. Car ce mois sans tabac est une première étape vers l’arrêt total. »

Un défi collectif

La France compte aujourd’hui 16 millions de fumeurs mais 60 % d’entre eux souhaiteraient arrêter la cigarette, selon les chiffres de Santé publique France. Ballotés entre tentatives, échecs et découragement. Pourtant, en moins de deux ans, la France a enregistré une baisse historique du tabagisme : 1,6 million de fumeurs en moins. Et la campagne Mois sans tabac, notamment au sein des entreprises, n’est pas étrangère à cette baisse. Arrêter de fumer à plusieurs s’avère nettement plus facile. « 34 % des actifs fument quotidiennement. Pour les entreprises, la cigarette est moins impactante que l’alcool ou les stupéfiants car c’est une addiction qui ne modifie pas le comportement, souligne Alexis Peschard, addictologue et fondateur du cabinet GAE Conseil. De plus, fumer est un choix très personnel. Il est donc difficile pour les entreprises de s’immiscer dans la vie privée de leurs salariés. Pendant longtemps, celles-ci ont été moins sensibles à cette problématique. » La campagne nationale menée en novembre a fait évoluer les mentalités. « Aujourd’hui, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à s’associer à l’opération. Et cet accompagnement des salariés facilite l’arrêt car le défi est collectif. Il est plus simple d’arrêter avec son collègue que seul. Y compris en cas de rechute », poursuit Alexis Peschard. La durée du challenge permet d’éprouver son endurance. Un mois durant lequel les salariés vont être coachés, accompagnés, suivis et récupérés en cas de renoncement face à l’appel de la nicotine.

Informer et accompagner

Un mois d’accompagnement des salariés fumeurs, voire davantage. Car les sociétés prennent le pas de plus en plus tôt. « Nous avons commencé dès le 1er octobre afin de préparer au mieux les salariés intéressés par cette action », souligne Audrey Lemaire, chargée de communication au sein de l’association Adixio. Celle-ci intervient au sein des entreprises La Poste et Orange. Les 30 septembre et 1er octobre derniers, le service courrier-colis de La Poste à Strasbourg a organisé une journée autour des risques cardiovasculaires avec plusieurs intervenants tels que la Fédération française de cardiologie et des acteurs médico-sociaux pouvant répondre aux interrogations nombreuses des salariés. « Lors des conférences et des ateliers, les échanges sont fructueux, remarque Audrey Lemaire. L’objectif est d’expliquer les impacts du tabac sur la santé et de faire prendre conscience des implications de la cigarette. Tout cela de façon ludique et sans être moralisateur. Ces interventions se veulent positives et déculpabilisantes. Nous cherchons davantage à encourager les salariés à réfléchir sur leur consommation et sur le produit en lui-même. »

Patchs, substituts nicotiniques, cigarette électronique, à chacun sa stratégie et sa technique pour parvenir à renoncer à son addiction. Mais souvent, ce sont les conséquences du sevrage qui inquiètent. Prise de poids, stress, irritabilité, insomnies… « Beaucoup de salariés se posent des questions par rapport aux effets du sevrage, du tabagisme passif, des conséquences sur l’alimentation et l’éventuelle prise de poids, constate le docteur Geneviève Thiaucourt, médecin du travail chez Saint-Gobain. Certains d’entre eux se renseignent en amont avant de décider d’une prise en charge plus globale avec un tabacologue. » La peur de la prise de poids est le premier motif d’abandon. « L’activité physique a tendance, ces dernières années, à diminuer. Y compris chez les enfants. Nous avons donc mis en place un programme de sensibilisation sur plusieurs années. Celle-ci peut parfaitement se coupler avec l’arrêt du tabac », souligne Hugues Leloix.

Mais au-delà de la santé, l’impact est aussi économique pour l’entreprise. Le cancer, les maladies respiratoires et cardiovasculaires sont parmi les premières conséquences du tabac. Celui-ci est à l’origine d’arrêts de travail prolongés qui peuvent impactés durablement l’entreprise.

Prise en charge

« De plus en plus, les sociétés prennent en compte la problématique du tabac dans leur contrat d’assurance avec la prise en charge de solutions de sevrage pour leurs salariés, explique Carine Kessaci, directrice marketing et promotion des services chez Malakoff Médéric Humanis. Certaines ont été proactives sur les problématiques liées aux addictions et s’en sont saisies avec beaucoup de courage. » La formation et la sensibilisation des managers et des services RH sont également à prendre en compte. « Être vigilant et à l’écoute de ses équipes fait partie du rôle du manager, estime Carine Kessaci. Il faut savoir détecter les signaux et choisir la conduite à tenir sans être intrusif. »

Au final, pour ceux qui ont sauté le pas et réussi le pari, la satisfaction est grande. « Je suis ravie d’avoir partagé cette épreuve avec le groupe qui a suivi le programme. Cela n’a pas été simple », se souvient Béatrice qui a arrêté de fumer depuis un an grâce au programme complet mis en place par son entreprise : coach motivationnel, sophrologue, diététicienne, coach sportif. Depuis Béatrice a retrouvé le goût… du sport. « Je cours tous les dimanches une heure quand le temps le permet et cela me fait un bien fou. »

En 2016, l’événement avait remporté un premier succès avec 180 000 personnes inscrites au mouvement. Ils étaient 241 000 en 2018. « Aujourd’hui, le rendez-vous Mois sans tabac est institutionnalisé. Les interventions s’effectuent selon les réussites et les échecs constatés l’année précédente et l’on agit en fonction, afin d’avoir le plus d’impact possible », conclut Carine Kessaci. Rendez-vous fin novembre pour savoir combien de salariés ont écrasé leur dernière cigarette.

Auteur

  • Valérie Auribault