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« Il faut clarifier toutes les règles liées à l’absence » ?

Le point sur | publié le : 28.10.2019 | Audrey Pelé

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« Il faut clarifier toutes les règles liées à l’absence » ?

Crédit photo Audrey Pelé

Pour Fabien Piazzon, auteur de Absentéisme : l’alerte rouge. Panser et repenser le travail1, le manager doit se questionner et peut agir pour réduire l’absentéisme dans les équipes.

Aujourd’hui, les entreprises ont-elles pris à bras-le-corps le problème de l’absentéisme ?

Oui, il y a une vraie prise de conscience du fait qu’il freine le fonctionnement des entreprises. Il est d’autant plus important qu’il est le révélateur des dysfonctionnements professionnels. On le sait, le travail est en pleine révolution, en perpétuel changement (sur les modes de travail, la mondialisation, la transformation digitale, etc.). Tout bouge, tout change pour les salariés comme pour les employeurs qui sont tous contraints sans cesse de s’adapter. Et c’est justement quand cette transformation n’est pas maîtrisée que cela génère des tensions en lien direct avec l’absentéisme. Comment allez-vous manager des salariés qui travaillent depuis quinze ans et à qui, pour des raisons de concurrence, on va demander de venir travailler le dimanche, par exemple ? Beaucoup trouvent un « défaut » des managers pour expliquer l’absentéisme au travail. Mais on ne peut pas les incriminer car ils subissent eux-mêmes ces transformations avec lesquelles ils doivent composer. Et quand ils arrivent à changer leurs pratiques, les transformations réussissent et l’absentéisme baisse.

Que peuvent faire les entreprises pour réduire l’absentéisme ?

Elles doivent commencer par le mesurer. Elles peuvent construire des indicateurs pour l’analyser et proposer des pistes d’amélioration. Ses causes résultent de trois principaux facteurs : la santé personnelle du salarié (grippe, cancer, etc.), la souffrance physique et psychique en lien avec l’activité professionnelle (mal de dos chronique, troubles musculo-squelettiques, etc.), et le désengagement, qui n’est pas cause d’absence mais l’aggrave. Ensuite, l’entreprise doit sortir de la fatalité : non, les absents ne sont pas tous des tire-au-flanc et oui, on peut diminuer l’absentéisme. Pour cela, on enquête, on questionne. On étudie les facteurs d’absence intrinsèque à l’organisation qui seront différents d’une société à une autre et d’un service à un autre. On aura alors une cartographie de l’absentéisme pour aider l’entreprise à comprendre les axes prioritaires d’investigation et d’actions.

Quelles doivent alors être les réponses les plus adaptées ?

Je recommande toujours de commencer par clarifier toutes les règles liées à l’absence. Il faut rappeler, à tous, que toute absence est cadrée par des obligations et des droits, que les salariés doivent informer de leurs absences dans les 24 heures, par exemple. Ensuite l’entreprise doit s’assurer que les managers réalisent (et qu’ils ont les capacités pour) un entretien de retour au poste. Si personne ne vient voir le concerné, cela laisse à penser que ce n’est pas important. Au contraire, il faut lui expliquer que son absence a impacté le travail (il a été remplacé ou son boulot a été absorbé par telle équipe, etc.) sans le culpabiliser. En amont, les managers peuvent aussi téléphoner au salarié absent pendant une longue durée pour prendre de ses nouvelles. Rien qu’en faisant cela, on démystifie l’absence et on peut travailler sur des actions qui baissent l’absentéisme.

Peut-on également agir par la prévention ?

Oui, c’est le maître mot. Il faut mettre en place des actions de prévention en fonction des causes identifiées. Si on constate plus de 20 % d’accidents du travail dans les absences dans son entreprise, il faut agir. Je pense à l’usure physique des salariés, ceux qui font des gestes trop répétés, par exemple, et qui conduisent à des troubles musculosquelettiques. On constate d’ailleurs que la grande majorité des absents souffrent physiquement ou psychiquement de leur boulot. Il faut adapter leurs conditions de travail pour renverser la tendance. Une entreprise dans une phase de transformation de ses métiers par exemple, devra avoir une communication claire envers les salariés, les accompagner pour qu’ils comprennent où ils vont. S’ils adhèrent, ils seront engagés et il y aura moins d’absentéisme. Enfin, on ne doit pas focaliser ses actions et sa communication autour des absents mais on doit s’intéresser aux salariés présents. C’est eux que l’on doit écouter pour éviter qu’ils succombent à l’absence.

(1) Éditions Débats Publics (collection Ayming Institute), décembre 2018.

Auteur

  • Audrey Pelé