L’Union européenne vient d’adopter une directive pour protéger les lanceurs d’alerte. D’ici à deux ans, elle sera transposée dans les droits nationaux des États membres. Mais une abondante jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) existe déjà sur le sujet.
La loi est parfois un outil de communication politique. La problématique centrale sur le lanceur d’alerte n’est pas dans la pesée du mot législatif. Face à des situations d’illégalité flagrante, le droit fondamental apporte l’obligation de se démarquer. La question est de savoir à partir de quel degré un salarié ou un fonctionnaire peut transgresser l’autorité hiérarchique et enfreindre le secret professionnel. Pour trancher cela, nous n’avons jamais rien fait de mieux qu’un débat contradictoire face à un juge.
La Cour européenne des droits de l’homme a publié plus de 250 arrêts pour trancher des situations impliquant ce qu’on nomme aujourd’hui des lanceurs d’alerte. Il existe une masse de jurisprudence beaucoup plus large, solide et protectrice que ne l’est la loi française. Un des arrêts de principe, l’arrêt Guja, date de 2008. La méthode de raisonnement de la CEDH fait aussi jurisprudence. Six critères ont été posés : l’intérêt public des informations, leur authenticité, l’existence d’autres moyens pour procéder à la divulgation, les dommages causés à l’employeur, la motivation du salarié et la sévérité de la sanction.
Il est long d’y arriver, car il faut avoir épuisé toutes les voies de recours internes (tribunal, cour d’appel et de cassation). En revanche, un arrêt a une force supérieure à la loi et peut être utilisé immédiatement et par toute personne devant l’ensemble des tribunaux de 47 États du Conseil de l’Europe.