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« Une entreprise créant un CFA s’engage au moins pour cinq ans »

L’actualité | publié le : 21.10.2019 | Benjamin d’Alguerre

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« Une entreprise créant un CFA s’engage au moins pour cinq ans »

Crédit photo Benjamin d’Alguerre

Une soixantaine de CFA d’entreprises seraient dans les tuyaux selon le ministère du Travail. Le groupe Nicollin en a inauguré deux début octobre, Adecco lance le sien ce lundi. Le CFA d’entreprise peut-il constituer un modèle durable ? Entretien avec Gilles Pouligny et Saly Kourouma, DGA formation continue et directrice du développement de l’offre de services B to B au sein du Groupe IGS.

Quel intérêt une entreprise peut-elle trouver à créer son propre CFA ?

Saly Kourouma : En premier lieu, une entreprise peut y trouver une solution face à ses difficultés de recrutement sur des métiers en tension. Dans le cadre de la guerre des talents qui se joue en ce moment même, le CFA d’entreprise est une possible opportunité pour les employeurs de pouvoir disposer de compétences qu’elle ne trouverait pas – ou plus difficilement – ailleurs. Je pense par exemple aux métiers de la data : les entreprises courent après les data scientists, mais d’une part, l’offre existante est insuffisante, et, d’autre part, elle n’est souvent pas assez spécialisée. Ce n’est pas la même chose que d’exercer cette profession dans un grand groupe hôtelier ou dans un cabinet RH. Sur un autre plan, ces CFA peuvent constituer une opportunité pour les employeurs d’attirer des candidats vers des métiers peu attirants, à condition qu’ils sachent investir sur une pédagogie innovante en contact direct avec les métiers proposés.

Gilles Pouligny : au Groupe IGS, où nous pratiquons déjà le conseil aux employeurs pour la création de classes d’entreprises, nous constatons qu’une entreprise qui place la communication autour de sa marque employeur et des métiers qui existent en son sein rencontre moins de problèmes de sourcing et de recrutement pour dénicher les bons candidats que d’autres.

Quels investissements l’ouverture d’un CFA d’entreprise peut-elle représenter pour l’entreprise en question ?

S. K. : Créer un CFA pour créer un CFA n’a aucun sens. L’entreprise intéressée doit mener une réflexion en amont sur tout ce que ça implique. Quelle pédagogie proposer ? Nous rencontrons parfois des entreprises qui confondent leur projet de CFA avec leur plan de développement des compétences. Or, on ne forme pas un jeune apprenti comme on forme un salarié adulte. Un formateur n’est pas forcément un enseignant. Dans un premier temps, il peut être intéressant de développer un CFA « hors les murs », en s’appuyant sur des organismes de formation expérimentés avant, éventuellement, de réinternaliser le CFA. Ensuite, il faut garder à l’esprit que la création d’un CFA d’entreprise ne doit pas seulement répondre à des questions d’opportunité de moyen terme. Mener un jeune au diplôme peut prendre un, deux ou trois ans. Une entreprise créant son CFA doit avoir conscience qu’elle s’engage au moins pour cinq ans.

Ne risque-t-on pas de voir apparaître des diplômes ultra-spécialisés, correspondant aux besoins d’une entreprise à un instant T, non monnayable par leur titulaire ailleurs ? Ou des entreprises ne se lançant dans la création d’un CFA interne que motivées par les coûts-contrats ?

G. P. : Il y aura forcément des opportunistes, mais les risques sont limités. Ce n’est pas le tout de créer un CFA. Les fondamentaux comptent. Les établissements qui attireront du public seront ceux qui garantiront l’employabilité des jeunes sur le long terme. Et France Compétences met en place des garde-fous. Nous attendons d’ailleurs les 32 critères de qualité qui remplaceront le Datadock et s’imposeront aux CFA.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre