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Mathilde Le Coz ; Jean Pralong : Du côté de la recherche

Chroniques | publié le : 07.10.2019 | Mathilde Le Coz, Jean Pralong

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Mathilde Le Coz ; Jean Pralong : Du côté de la recherche

Crédit photo Mathilde Le Coz, Jean Pralong

Touche pas à mon POC

Les grandes entreprises ont de l’expérience, de l’expertise et une stabilité rassurante pour leurs clients. Revers de cette médaille : une structuration rigide, un goût très modéré pour le risque et une appétence limitée pour la créativité. Les startups présentent plus d’agilité mais moins de stabilité, et la capacité à faire beaucoup avec peu de ressources. C’est pourquoi la collaboration entre ces contraires est à la fois séduisante, délicate et, finalement, frustrante. Il ne s’agit pas d’organisations complémentaires, mais de cultures opposées.

Efficacité et légitimité

La mise en place des POC (Proof of concept) est une source de frustration bien identifiée pour les deux parties. Les jeunes pousses s’y engagent avec ambition, acceptent parfois une rémunération inférieure à leurs attentes ou investissent dans des améliorations pour s’adapter aux contraintes de leurs clients. Les grandes entreprises vivent ces POC de façon très différente : pour elles, ce n’est pas l’efficacité, mais la légitimité que l’on teste. Il ne s’agit pas de savoir si la solution fonctionne, mais de construire son image et sa crédibilité dans les équipes. La créativité de la startup se confronte alors à l’aversion au risque des grandes entreprises.

Penser gagnant-gagnant

L’hypothèse de base ne doit pas être de rechercher un accord gagnant-gagnant mais, plus en amont, qu’un accord gagnant-gagnant est possible et nécessaire. Le projet doit être construit dans cette perspective qui inclut un rapport au temps et à la bienveillance. Les grands groupes ne sont guère habitués à s’adapter à leurs fournisseurs. Or l’acculturation à d’autres formes de travail fait partie du bénéfice de la collaboration. On pourra donc, côté grands comptes, en profiter pour revisiter et questionner les procédures d’achat. On y découvrira sans doute qu’elles visent à établir la légitimité du fournisseur plutôt que son efficacité.

Penser pilote plutôt que POC

Pour la majorité des startups, ce n’est pas le concept qu’il faut tester – il a déjà été validé dans des étapes antérieures – mais son déploiement. Ce n’est pas la solution, c’est son appropriation par les process, les équipes et les routines en place. Faire un POC, c’est attendre de la startup qu’elle fasse la preuve de son utilité. Faire un pilote, c’est observer les difficultés localement pour les dépasser ensuite à plus grande échelle. Les entreprises sont très habituées à piloter le changement en mode projet. Elles savent où vont se situer les attentes et les résistances, où faire porter les efforts et les accompagnements. Elles connaissent les pratiques qui fonctionnent. Les parcours d’immersion dans les startups permettent, en amont, d’acculturer des collaborateurs qui feront de bons traducteurs entre les deux univers en présence.

Le pilotage du mode projet suggère de poser des objectifs quantitatifs. L’exercice est central, puisqu’il fournira les critères qui serviront de juge pour continuer l’expérience. On attend d’une nouvelle solution qu’elle fasse mieux que les process en vigueur. Mais « combien » mieux ? Entre progrès réalistes et progrès révolutionnaires, les bons indicateurs sont délicats à trouver. Plus délicat encore est de s’assurer ce que l’on mesure : les différences de performance sont-elles l’effet de la nouvelle solution, ou d’autres événements ? Difficile de tester une solution censée révolutionner le sourcing quand le marché s’assèche ou les critères de sélection se durcissent.

Enfin, le pilote n’est pas un test de faisabilité. Engager un pilote, c’est avoir vérifié que les coûts du déploiement étaient bien disponibles.

Auteur

  • Mathilde Le Coz, Jean Pralong