Alors que la loi Pacte renforce la présence des administrateurs salariés aux conseils d’administration, ce livre de deux enseignants en économie interroge les limites de cette forme d’implication des salariés à la gouvernance de l’entreprise. Une critique intéressante de la participation, sur fond de RSE.
Depuis les années 1990 et surtout la crise de 2008, « l’incertitude sur les évolutions économiques et les risques environnementaux a entraîné l’émergence d’un paradigme de la précaution, par lequel les entreprises doivent elles-mêmes tenir compte des conséquences sociétales de leur activité », notent les auteurs de ce livre sur l’évolution de la participation. D’où cette pression politique obligeant les grands groupes à faire rentrer des salariés dans leur conseil d’administration (CA). Mais cette législation est-elle suffisante face aux enjeux de RSE ? C’est la question de fond à laquelle cet ouvrage synthétique tente de répondre. Sous un angle économique un peu sec, les deux enseignants passent en revue l’évolution des formes de participation des salariés en France, comparées avec d’autres pays d’Europe ou anglo-saxons : participation aux bénéfices, actionnariat salarié – pour lequel ils émettent des réserves quant au pouvoir réel sur les décisions stratégiques – jusqu’aux législations poussant à la codétermination, répandue en Allemagne et timide en France.
Si cette présence d’administrateurs salariés au CA « peut sembler la forme de participation la plus aboutie », rien à voir avec le rôle de contre-pouvoir des syndicats, selon eux : même en Allemagne, « la possibilité de blocage des décisions reste assez théorique ». En matière de RSE, ils se montrent critiques : « Cette représentation formelle des salariés à la table du conseil ne suffit pas à asseoir la responsabilité sociétale des entreprises. » Et d’illustrer leur propos avec le scandale de Volkswagen qui, « malgré un conseil de surveillance composé de la moitié de salariés », n’a pas empêché l’entreprise de truquer les résultats de ses moteurs en matière de pollution… Des quotas de femmes dans les conseils à la loi Pacte, les auteurs se montrent très sceptiques sur l’impact des lois françaises. En termes de participation, cet enjeu majeur de la RSE devrait selon eux irriguer toute l’entreprise : « Il convient d’y associer des mécanismes constants de partage informel, un dialogue constant avec les élus, des dispositifs de participation financière et la représentation au sein du conseil. » Une critique un brin académique mais qui le mérite d’être claire sur les mirages de la gouvernance partagée.