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Handicap : les entreprises ne jouent pas le jeu…

Les clés | À lire | publié le : 09.09.2019 | Lydie Colder

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Handicap : les entreprises ne jouent pas le jeu…

Crédit photo Lydie Colder

Malgré les quotas, les entreprises restent trop rétives à l’emploi des personnes handicapées, pointe la sociologue Anne Revillard dans son livre sur les politiques handicap. Outre un bilan mitigé, la sociologue les appelle à sortir du déni et propose des pistes ambitieuses.

Non-discrimination, quotas : malgré l’arsenal juridique pour encourager l’emploi des personnes handicapées, ces dernières « souffrent d’une marginalité persistante face au monde du travail », rappelle Anne Revillard dans son livre sur les politiques handicap et l’emploi, paru aux presses de Sciences Po. Et de citer ces chiffres accablants : sur 2,8 millions de personnes reconnues handicapées, seules 35 % sont en emploi, et le taux de chômage reste deux fois supérieur à la moyenne nationale. Synthétique, son ouvrage dresse un état des lieux critique des dispositifs existants : discriminations à l’embauche « persistantes », emploi protégé (Esat, entreprises adaptées) efficace mais offrant peu de passerelles en milieu ouvert, manque de moyens des réseaux pour l’insertion et le maintien dans l’emploi (Cap emploi-Sameth). Bien que louables, ils seraient « foisonnants » et « trop peu évalués », selon la sociologue.

Stratégies d’évitement

Au cœur du livre : la fameuse obligation d’emploi (6 % de travailleurs handicapés dans les entreprises d’au moins 20 salariés), sous peine d’une pénalité à verser à l’Agefiph pour le privé. De quoi pousser les grands groupes à signer des accords handicap, efficaces mais peu nombreux selon l’auteure. Anne Revillard pointe là aussi le manque d’évaluation « de cette obligation pourtant centrale ». Ou les stratégies de contournement des entreprises, comme la préférence donnée à la sous-traitance aux ESAT plutôt qu’à l’embauche. Des faits connus. Le propos est plus intéressant sur le problème de l’obligation de maintien en emploi en cas d’inaptitude (TMS, maladies psychiques en essor). Qui se traduirait dans les faits par des licenciements, « parfois à moindre coût », plutôt que par des reclassements ou des adaptations de postes, selon l’auteure. Un déni qui ne saurait durer, car « la dégradation des conditions de travail et le vieillissement de la population active augmentent le risque de problèmes de santé invalidants chez les personnes en emploi », alerte la chercheuse.

Normaliser le handicap

Pour sortir de l’impasse, Anne Revillard livre des pistes concrètes pour changer la donne. À lire : une réflexion assez intéressante sur les stéréotypes liés au handicap, ni victime, ni héros. Si former le management est nécessaire, « ces transformations engagent des dispositifs matériels, des changements dans l’organisation spatiale et temporelle du travail et des procédures claires sur les demandes et le suivi des aménagements ». Un défi de taille, vu par une bonne experte du sujet.

Auteur

  • Lydie Colder