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Informatique RH : Les logiciels de paie font leur mue

Le point sur | publié le : 01.07.2019 | Xavier Biseul

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Informatique RH : Les logiciels de paie font leur mue

Crédit photo Xavier Biseul

Généralisation du mode SaaS, arrivée de nouveaux entrants, extension de la couverture fonctionnelle… Le marché de la paie, longtemps ronronnant, est en pleine ébullition.

La France championne du monde de la feuille de paie. Notre pays arrive encore en tête de l’édition 2019 du baromètre de NGA Human Resources, devant l’Italie, la Belgique et l’Allemagne. Qu’il s’agisse du nombre de données variables, du mode de calcul proprement dit, du volume de déclarations sociales obligatoires ou du poids du réglementaire, l’Hexagone est quasiment en tête sur tous les critères. De l’avis des gestionnaires de paie, le bulletin simplifié, le mal nommé, n’a fait qu’ajouter de la complexité.

Cette complexité n’est pas sans incidence sur le marché des logiciels de paie. Le passage au mode SaaS (Software as a Service), qui permet de fluidifier les mises à jour réglementaires sans faire appel à un prestataire, s’en est trouvé accéléré. Les autres avantages du cloud sont connus. À la différence d’un modèle de licence (on-premise), l’entreprise n’a plus de serveur à administrer et à sécuriser, de logiciel à déployer et à maintenir ou de données à sauvegarder. Avec le SaaS, ces dernières sont accessibles n’importe où n’importe quand, y compris sur les terminaux mobiles.

Le SaaS a gagné

Pour Jérôme Ricard, product marketing manager de solutions HCM chez Cegid, « s’il y avait encore un débat il y a cinq ans entre le SaaS versus le on-premise, il n’existe plus aujourd’hui ». Le SaaS a gagné par KO. Cegid ne propose d’ailleurs plus que des solutions SaaS à ses prospects. De même, ADP ne commercialise plus sa solution on-premise, Zadig Hypervision, et se contente de la maintenir auprès de son importante base installée. Tous les efforts de R&D du géant américain se reportent sur Decidium, sa solution en mode SaaS.

Alors que le SaaS était souvent associé aux PME et ETI, il permet d’homogénéiser les pratiques au sein des groupes aux multiples filiales, avance Nathalie Gasset, product marketing manager chez ADP qui intervient dans plus de 140 pays. « L’entreprise ne contracte qu’avec un seul fournisseur. Et si sa volonté avec le on-premise est de garder le contrôle du système, elle peut avec le SaaS ne retenir que les nouvelles fonctionnalités de son choix. Elle sera même moins dépendante qu’avec un prestataire assurant les développements spécifiques et la maintenance. »

Il restera toujours des entreprises réfractaires au cloud pour des raisons de sécurité, de culture ou d’extrême spécification de la paie, mais elles se font rares. Pour Laura Chikli, product marketing manager RH Sage, même l’argument sécuritaire n’est pas recevable. « L’on-premise n’est pas un gage d’une meilleure sécurisation des données, au contraire. » Effectivement, un spécialiste du numérique assurera a priori une protection plus élevée qu’une entreprise dont la sécurité n’est pas le cœur de métier.

En tout cas, tous les entrants de ce marché de la paie sont nativement en mode SaaS. C’est peu dire que l’on assiste à un foisonnement de nouveaux acteurs sur un marché hexagonal déjà particulièrement fragmenté. Une génération de start-up spécialisées, comme PayFit, NewDeal ou Global Payroll, bousculent les acteurs établis en reprenant la (vieille) promesse de simplifier la paie. PayFit qui vient de lever 70 millions d’euros a créé son propre métalangage, le JetLang, pour « coder » le Code du travail. Pour son cofondateur, Firmin Zocchetto, il s’agit de cacher toute la complexité du droit du travail et des conventions collectives derrière une interface intuitive utilisable par des non-gestionnaires de paie. « L’interface est effectivement intuitive, mais il manque beaucoup de fonctionnalités pourtant évidentes comme l’extraction sous Excel ou les états et les contrôles automatiques, tempère Brankiça Pavlovic, directrice de projet chez Pay Job. C’est rédhibitoire pour des entreprises de plus de 300 salariés. »

Des interfaces « user friendly »

D’autres entrants explorent de nouvelles niches. « En modélisant les règles légales mais aussi conventionnelles, Silae a réalisé un hold-up sur le marché des experts-comptables, poursuit Brankiça Pavlovic. Un expert-comptable travaille avec des clients évoluant dans différents secteurs d’activité. Il doit parfois gérer jusqu’à 50 conventions collectives. » GlobePayroll accompagne les PME et les ETI dans l’internationalisation de leur paie tandis que Newext RH propose des services d’externalisation RH à la carte.

L’arrivée de cette nouvelle vague d’éditeurs a incité les acteurs historiques comme SAP, Oracle ou Meta4 à rendre leurs interfaces plus ergonomiques et « user friendly ». « Avant, elles étaient conçues dans une logique informatique et il fallait des journées de formation pour prendre en main l’outil », se rappelle Brankiça Pavlovic. L’autre tendance lourde, c’est l’extension du périmètre fonctionnel. Jusqu’alors, un logiciel de paie se contentait de calculer le salaire, d’éditer des bulletins, puis de faire la post-paie (les déclarations sociales). Aujourd’hui, il doit proposer d’autres fonctionnalités comme la gestion des notes de frais ou la pose de congés. « La paie et la pose de congés sont assez proches, note Claire-Marie de Vulliod, director and market leader HR Tech chez Teknowlogy. Un éditeur peut ensuite aller vers la gestion des temps, un marché occupé par des experts, puis la gestion des notes de frais et celle de la rémunération. » Cet élargissement de la couverture fonctionnelle s’accompagne d’une tendance au self-service. « En mettant à disposition un portail pour la pose des congés, on déporte la saisie administrative sur les collaborateurs et les managers », reprend Claire-Marie de Vulliod.

Autre sujet prioritaire à ses yeux : la refonte de l’architecture du SIRH. « Au fil des acquisitions, des groupes se sont retrouvés avec plusieurs logiciels de paie auxquels se sont greffées différentes briques RH. Leur interfaçage est source d’erreurs et de pannes. » A minima, un logiciel de paie doit communiquer avec la gestion des temps et des activités (GTA), la gestion des talents et le système comptable. Connues pour leur fiabilité et leur fraîcheur, les données de paie alimentent aussi le module de parcours d’intégration (onboarding). La plupart des éditeurs proposent des interfaces de programmation pour assurer l’interopérabilité de leur solution avec des systèmes tiers.

Pour les cinq prochaines années, l’enjeu sera d’améliorer l’automatisation des contrôles avec l’apport de l’intelligence artificielle. Un moyen de pallier la pénurie d’experts de la paie sur le marché dont la valeur ajoutée consiste à identifier les points de régression, de non-conformité et parfois de forcer le calcul de la paie car l’outil a été mal paramétré.

Auteur

  • Xavier Biseul