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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Chroniques | publié le : 17.06.2019 | Denis Monneuse

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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Crédit photo Denis Monneuse

Est-ce bon de travailler en musique ?

Peut-on bien travailler en écoutant de la musique ? Cette question fait débat entre les chercheurs, mais aussi entre les salariés dans les entreprises. Je me souviens par exemple d’un nouveau directeur des opérations d’une entreprise industrielle qui avait interdit la musique dans les ateliers de maintenance car il soupçonnait celle-ci de nuire à la concentration des techniciens, donc d’accroître les erreurs et de diminuer leur productivité. Je ne sais pas si l’arrêt de la musique avait réellement permis d’augmenter les cadences et d’améliorer la qualité du travail, mais elle avait suscité en tout cas une grande vague de mécontentement de la part des salariés concernés. Pour ces techniciens, leur nouveau directeur méconnaissait leurs conditions de travail en mettant ainsi fin de manière autoritaire à une sorte d’avantage acquis. Ils plaidaient que le plaisir que leur apportait la musique les aidait à tenir le coup.

Du côté des chercheurs, les partisans de la musique au travail estiment qu’elle peut faciliter l’apprentissage et aider à réguler les émotions et à réduire le stress. De l’autre côté, les opposants craignent qu’elle n’affecte négativement la concentration, accroisse les tensions et encourage les comportements agressifs.

Mieux connaître l’effet du travail en musique est important car ce phénomène semble de plus en plus courant. Il n’est pas rare dans les open spaces par exemple de voir de nombreux salariés avec un casque sur les oreilles. Les deux tiers des salariés écouteraient au moins de temps en temps de la musique au travail, si l’on en croit certaines études.

Kathleen Keeler et Jose Cortina, tous deux chercheurs à l’université de Virginie, font avancer le débat à travers un article qu’ils viennent de publier dans la revue Academy of Management Review (1). Ils se demandent quel lien il peut y avoir entre l’écoute de la musique et la performance au travail en s’appuyant sur les nombreuses études qui ont montré qu’écouter de la musique est tout sauf neutre : la musique influence notre comportement de manière physique, affective et cognitive sans que l’on ne s’en rende nécessairement compte.

Pour ces deux chercheurs, c’est avant tout le choix de la musique qui compte. De même que les magasins et les restaurants choisissent le type de musique de fond en fonction des comportements qu’ils veulent induire chez les consommateurs (manger rapidement, acheter de préférence tel type de produit…), les caractéristiques de la musique au travail sont à choisir en fonction de ce qu’on en attend. Une musique à consonance négative devrait aider à se focaliser sur une tâche et éviter les distractions, tandis qu’une musique à consonance positive devrait accroître la créativité. De même, une musique lente et à faible volume serait positive pour la créativité, tandis qu’une musique plus rapide et à plus haut volume pourrait aider à résoudre des tâches complexes grâce à un plus haut niveau d’attention.

Le problème est qu’en espace partagé, les salariés ayant des tâches différentes à accomplir, il serait difficile de mettre tout le monde d’accord sur le type et le volume de la musique à mettre en toile de fond. Il est sans doute préférable que chacun vienne avec ses écouteurs : à chacun sa musique selon ses besoins !

Auteur

  • Denis Monneuse