Dans le but de lutter contre le tabagisme passif, le Code de la santé publique prévoit une interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif et notamment sur les lieux de travail. À cet effet, le principe d’interdiction de fumer doit d’ailleurs faire l’objet d’une signalisation apparente. En cas de manquement, l’employeur est susceptible d’encourir des sanctions pénales. De même, et se fondant sur l’obligation de sécurité de résultat pesant sur l’employeur, la Cour de cassation a pu juger qu’un employeur pouvait engager sa responsabilité vis-à-vis d’un salarié exposé au tabagisme passif, même si sa santé ne s’en est pas trouvée altérée.
Une exposition véritable du salarié est-elle nécessaire ?
Une salariée, embauchée en qualité de secrétaire logistique en juin 2004, prenait acte de la rupture de son contrat de travail quelques années plus tard. Outre les griefs reprochés à son employeur à l’origine de la cessation des relations contractuelles, la salariée sollicitait également des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat tiré du non-respect de l’interdiction de fumer. L’intéressée faisait valoir devant les juridictions du fond que l’entreprise n’avait pas imposé le respect absolu de la loi Evin visant l’interdiction de fumer dans les locaux de travail et dans ceux couverts et fermés affectés à l’ensemble des salariés. L’employeur admettait pour sa part qu’il avait laissé certains clients fumer dans l’entreprise, mais dans des locaux où la salariée n’avait jamais été affectée. Ces faits étaient corroborés par les attestations produites aux débats par la demanderesse elle-même. La cour d’appel, relevant qu’il n’existait aucun préjudice direct subi par l’intéressée en relation avec la faute commise, la déboutait de sa demande. La Cour de cassation, par un arrêt du 15 mai 2019, confirme la position des juges du fond. Si le non-respect de la loi Evin par l’employeur ne peut être discuté en termes de gradation – il y a ou il n’y a pas de manquement –, celui-ci ne saurait mécaniquement entraîner un préjudice pour la salariée. Il s’agit alors de démontrer pour cette dernière qu’elle avait réellement été exposée au tabagisme passif. Dans la mesure où les clients de l’entreprise ne fumaient que dans l’entrepôt, lieu où la salariée ne travaillait pas, les Hauts magistrats en déduisent qu’aucun manquement suffisamment grave de l’employeur pour justifier une prise d’acte ne peut être relevé. Bien plus, le manquement relevé ne permet pas non plus à la salariée de bénéficier du versement de dommages et intérêts dès lors qu’aucun préjudice direct n’était démontré.