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Les clés

Un enfer d’inattention

Les clés | À lire | publié le : 10.06.2019 | Irène Lopez

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Un enfer d’inattention

Crédit photo Irène Lopez

Jusqu’à 5 heures devant son smartphone. Et 30 activations par heure éveillée. L’appareil nous appelle, nous happe, nous possède. Et si nous étions devenus des poissons rouges noyés dans l’océan des réseaux sociaux et Internet ?

Avons-nous une mémoire de poisson rouge ? Le petit vertébré aquatique tourne dans son bocal. Il semble redécouvrir le monde à chaque tour. Les ingénieurs de Google ont réussi à calculer la durée maximale de son attention : 8 secondes. Ces mêmes ingénieurs ont évalué la durée d’attention de la génération des Millennials, celle qui a grandi avec les écrans connectés : 9 secondes ! Nous sommes devenus des poissons rouges. Notre bocal ? Les écrans.

Une étude du Journal of Social and Clinical Psychology évalue à 30 minutes le temps maximum d’exposition aux réseaux sociaux et aux écrans d’Internet au-delà duquel apparaît une menace pour la santé mentale. D’après cette étude, le cas de Bruno Patino, l’auteur est désespéré, tant sa pratique quotidienne est celle d’une dépendance aux signaux qui encombrent l’écran de son téléphone. Il avoue : « Nous sommes tous sur le chemin de l’addiction : enfants, jeunes, adultes. Pour ceux qui ont cru à l’utopie numérique, dont je fais partie, le temps des regrets est arrivé. Ainsi de Tim Berners Lee, “l’inventeur” du web, qui essaie désormais de créer un contre-Internet pour annihiler sa création première. L’utopie, pourtant, était belle, qui rassemblait, en une communion identique, adeptes de Teilhard de Chardin ou libertaires californiens sous acide. » Voilà pour la confession. Il y aurait ainsi 480 000 tweets, 2,4 millions de snaps, 973 000 connexions sur Facebook ou encore 18 millions de SMS échangés chaque minute dans le monde. Documenté par de nombreux chiffres, exemples et anecdotes, ce livre est « passionnant ».

La servitude numérique

Le modèle qu’ont construit les nouveaux empires est celui d’un esclavage. Au cœur du réacteur, nul déterminisme technologique, mais un projet qui traduit la mutation d’un nouveau capitaliste : l’économie de l’attention. Il s’agit d’augmenter la productivité du temps pour en extraire encore plus de valeur. Après avoir réduit l’espace, il s’agit d’étendre le temps tout en le comprimant, et de créer un instantané infini. L’accélération générale a remplacé l’habitude par l’attention, et la satisfaction par l’addiction. Et les algorithmes sont aujourd’hui les machines-outils de cette économie… Cette économie de l’attention détruit, peu à peu, nos repères. Notre rapport aux médias, à l’espace public, au savoir, à la vérité, à l’information, rien n’échappe à l’économie de l’attention qui préfère les réflexes à la réflexion et les passions à la raison. Les lumières philosophiques s’éteignent au profit des signaux numériques.

Spécialiste des médias et des questions numériques, Bruno Patino a écrit plusieurs essais sur la relation qui lie les hommes et les réseaux numériques. Dites non à l’addiction, à la surveillance de votre cerveau par les plus grandes multinationales. Reprenez le contrôle de votre vie et de votre liberté. À lire sans appareil numérique à portée de main.

Auteur

  • Irène Lopez