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Sur le terrain

Management : Aramisauto mise sur le « comment » plutôt que sur les résultats

Sur le terrain | publié le : 03.06.2019 | Lys Zohin

Le leader français de la vente automobile en ligne a mis en place depuis deux ans un nouveau mode de gestion des ressources humaines, inspiré des méthodes du lean management. Les effets sont palpables, avec, notamment des délais de livraison des véhicules ramenés d’un mois à dix jours.

Antoine Vicquery, entré chez Aramisauto (500 salariés) il y a cinq ans comme responsable d’agence et devenu directeur régional pour la Bretagne, s’en souvient très bien. « Il n’y a pas eu d’annonce tonitruante sur la nouvelle méthode de management, dit-il, mais je me suis vite rendu compte d’une chose. Lors des visites de la hiérarchie dans mon agence, on me parlait de moins en moins de résultats et de plus en plus de freins à lever pour atteindre ces résultats, avec clairement une envie de comprendre les problèmes sur le terrain. »

En place depuis deux ans et inspirée du lean management – une méthode qui vise l’amélioration des performances de l’entreprise par le développement de tous les salariés en recherchant les conditions idéales de fonctionnement –, la solution choisie par Aramisauto « renverse l’autorité », souligne Brigitte Schifano, la DRH, car elle est « fondée sur l’écoute, la confiance et le respect ». Pour Antoine Vicquery, le changement est de taille. Il a connu l’ancienne méthode de management, très descendante, où les « chefs » donnaient leurs directives, très déconnectées du terrain, dans l’objectif d’atteindre les résultats. « Les salariés se sont rendu compte qu’on s’intéressait à eux et ont tout de suite adhéré », relève Antoine Vicquery.

Depuis le début de l’aventure, ils n’hésitent plus à proposer des solutions pour résoudre les problèmes qu’ils ont pu rencontrer, quitte, même, à se tromper, puisque le nouvel état d’esprit de l’entreprise se fonde sur le test and learn. Autrement dit, on tire des leçons de toutes les expérimentations, y compris celles qui s’avèrent être un échec.

Indicateurs de moyens

Fini donc, ce que Brigitte Schifano appelle le command and control. Oubliées, les « descentes » de chefs venus vérifier si tout va bien et surtout pointer ce qui ne va pas… « Ils viennent sur le terrain observer le travail des commerciaux, par exemple, et s’enquièrent de leurs difficultés concrètes, au quotidien », explique Antoine Vicquery. Le tout avec bienveillance et en proposant, si nécessaire, des formations et de l’accompagnement. « Nous avons maintenant des indicateurs de moyens et c’est très puissant, indique le directeur régional, d’autant que notre principe de base, c’est qu’un collaborateur ne fait jamais exprès de mal faire. »

« La première chose qui m’a surprise lorsque je suis arrivée chez Aramisauto, se souvient Clémence Roynette, chargée de recrutement au sein de la société depuis à peine deux ans, c’est la bienveillance et la transparence. Le fait qu’on dise “bienvenus aux problèmes” », s’exclame-t-elle. Ainsi, lors de ses premiers pas, elle avait mal publié une annonce pour un poste à pourvoir. Le résultat ? Une poignée de CV reçus seulement, ce qui a suscité un grand étonnement de sa part et de celle de sa hiérarchie. « Mais cela a été accueilli avec un grand sourire ! », dit-elle. Ses collègues lui ont expliqué comment faire la manœuvre correctement… « Même si c’était une faute d’inattention, je me suis sentie écoutée et aidée », conclut-elle. Pour aller dans le même sens, Antoine Vicquery évoque un incident récent. « Nous nous faisons un devoir de livrer les véhicules en un temps record. Or nous avons constaté un retard dans une livraison. En analysant les évènements qui avaient conduit à ce retard, nous avons identifié un problème, tout bête : le nouveau logiciel qu’utilisait le collaborateur avait été mal paramétré, et en conséquence, les documents qu’il envoyait pour la livraison étaient automatiquement mis de côté par le système », explique-t-il. Avec l’aide de tous, ce problème, d’ordre technique et administratif, a pu être corrigé. « Le collaborateur était non seulement soulagé, mais en plus, sa confiance dans l’équipe et le management s’en est trouvée renforcée », se félicite Antoine Vicquery. « Ce n’est jamais la personne qui est incriminée mais le “poste” ou le process », précise Clémence Roynette. De quoi également renforcer la confiance en soi de chacun des collaborateurs.

Instaurer la confiance

Précisément, « le manager est finalement quelqu’un dont le rôle essentiel, voire unique, est d’instaurer la confiance », assure la DRH d’Aramisauto. Une inclinaison psychologique qui prend des formes variées. Ainsi, Clémence Roynette n’a pas caché, lors de son entretien d’embauche, qu’elle avait de l’ambition et voulait vite évoluer vers un poste plus élevé. « À l’occasion de mon entretien annuel, en mai 2018, j’ai dit à mon manager que je voulais son poste, lui-même étant appelé à évoluer, dit-elle spontanément. Nous nous parlons très franchement. » À l’écoute, son manager lui fait cependant valoir qu’elle avait encore des choses à apprendre. Il a conçu pour elle un parcours ad apté, à base de formations mais aussi d’invitations à des réunions stratégiques, afin qu’elle puisse réellement se préparer. « J’ai accepté ce qu’il disait et je lui ai fait confiance, déclare la jeune femme. Et au lieu de prendre le poste au 1er décembre 2018 comme je le souhaitais, je le prends au 1er juillet de cette année, dans de bien meilleures conditions. Mon manager a eu entièrement raison », se réjouit-elle. Si elle n’a pas connu l’ancienne méthode de management chez Aramisauto, elle a toutefois expérimenté ce type de gestion humaine dans d’autres organisations de travail…

Et c’est d’ailleurs pour cela qu’elle est partie. « Je ne faisais pas confiance à ma hiérarchie, avoue-t-elle, et je me doutais que je n’arriverais à rien en matière d’évolution de carrière chez mon ancien employeur. »

« La moyenne d’âge de nos collaborateurs est de 28 ans, pointe Brigitte Schifano. Ces jeunes ne sont pas impressionnés par les titres ni les fonctions. En revanche, ils veulent être guidés et aidés par leur manager. » Depuis la mise en place de ce nouveau mode de management, non seulement les enquêtes de satisfaction des collaborateurs sont au beau fixe, mais les clients en voient également l’impact, grâce à une efficacité et d’une performance accrues. « Alors qu’auparavant, nos délais de livraison étaient d’un mois, nous les avons réduits à moins de dix jours, souligne la DRH. Notre prochaine étape est de raccourcir ce délai de trois jours seulement ! »

Auteur

  • Lys Zohin