logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Le point sur

Démarche collaborative : Enedis a coconstruit son accord en mode partenariat

Le point sur | publié le : 03.06.2019 | G. S. M.

Plutôt que d’imposer des règles strictes pour assurer le respect du droit à la déconnexion, Enedis a mis en œuvre une démarche globale basée sur le volontariat. Après des premiers résultats positifs en 2018, un déploiement à l’échelle nationale est en cours.

En charge du réseau de distribution d’électricité, Enedis vit depuis plusieurs années une double mutation technologique : l’une liée au déploiement du compteur Linky, l’autre à la digitalisation qui touche tous ses métiers. Parmi les plus impactés figurent ceux liés à la relation client et aux fonctions support (RH, gestion, comptabilité). « Ces nouveaux outils numériques, en particulier l’utilisation des messageries professionnelles, posent également la question de la porosité entre vie professionnelle et vie privée », note Michaële Guégan, directrice en charge des RH, de la transformation et de la sécurité d’Enedis.

Plutôt que d’adopter des stratégies « défensives » fondées sur des chartes et se traduisant par des journées sans e-mail, voire, par l’impossibilité d’accéder aux serveurs en dehors des heures ouvrables, elle a choisi une approche pédagogique reposant sur trois leviers : une forte impulsion managériale basée sur l’exemplarité ; le volontariat ; et le déploiement d’une démarche en mode collaboratif et pilotée depuis le local, au plus près des besoins, afin de l’adapter aux modes de fonctionnement des salariés et des collectifs de chaque entité. Une initiative loin des évidences, reconnaît Michaële Guégan : « C’est une démarche qui prend du temps, nous en sommes conscients, et nous nous sommes donné un horizon de deux à trois ans pour faire évoluer les pratiques durablement car c’est un sujet qui ne fait pas d’emblée consensus. »

Un accord sur le droit à la déconnexion a été conclu en mars 2018 avec les organisations syndicales. Sur la base d’un diagnostic sur les temps de connexion montrant « une grande différence de pratiques entre les équipes opérationnelles et l’encadrement », un travail de coconstruction s’est alors engagé. Il a impliqué les partenaires sociaux, les managers et le cabinet Master. Spécialisé dans l’usage des outils numériques, il a formé les salariés volontaires. Ils ont été sensibilisés au respect des frontières entre la vie professionnelle et la vie privée mais aussi à la rédaction des e-mails et au choix des destinataires – faut-il toujours répondre à tous ? Cette phase a aussi permis d’alerter sur l’importance des messages « discourtois »… « Ce qui est intéressant, note Michaële Guégan, c’est que cette démarche permet non seulement de responsabiliser chacun sur ses propres usages mais aussi d’être plus respectueux des usages du numérique en collectif comme limiter la consultation de sa messagerie en réunion et respecter les plages collectives comme les plages personnelles. Gérer sa messagerie est une compétence comme une autre, qui doit s’apprendre. »

Responsabilisation des équipes

Le cabinet Master a aussi fourni un outil, MasterMail, qui permet de réguler l’arrivée et l’envoi des e-mails. Chaque salarié choisit durant certaines plages horaires de n’en recevoir aucun, à l’exception des messages urgents, et il peut signaler à son correspondant le caractère intempestif ou « discourtois » de ses e-mails, voire les bloquer. Cet outil permet aussi de consulter les statistiques sur l’usage de la messagerie. La direction dispose de son côté de données globales et anonymes. En parallèle, un comité de pilotage a été installé, au niveau national et local. Il réunit toutes les parties prenantes (représentants du personnel, salariés volontaires, médecine du travail, consultants du cabinet Master ainsi que la direction des RH), afin, précise Michaële Guégan, « de vérifier que le déploiement se déroule conformément à l’esprit de l’accord ».

Baisse de 20 % du nombre de e-mails

Un déploiement test de la démarche et de l’outil a eu lieu en 2018 sur la direction régionale Alpes. Un premier bilan fait état d’une « réduction progressive du volume de e-mails émis, de l’ordre de 20 % ». Depuis, d’autres unités ont adopté le dispositif et des salariés volontaires se sont lancés dans la démarche. Pour accompagner cette diffusion, un réseau de 300 « facilitateurs » a été mis sur pied afin de mieux prendre en compte le contexte local dans la mise en œuvre de la démarche. Dans chacune des entités impliquées se met aussi en place un comité de pilotage local qui reprend le même fonctionnement que celui institué au niveau national.

Si elle table à la mi-2019 sur une diffusion de la démarche dans la moitié des 30 entités que compte Enedis, Michaële Guégan tient à rappeler qu’elle s’insère dans un processus bien plus large : « Notre accord sur le droit à la déconnexion s’inscrit dans une approche globale qui intègre également l’accord sur le travail à distance, l’accompagnement du management sur la responsabilisation des équipes mais aussi les nouveaux environnements de travail, et les nouveaux modes de travail collaboratifs (méthode agile…) et tout cela, afin de développer la créativité, le partage et l’innovation tout en améliorant la performance collective. » De quoi toujours garder en ligne de mire cette imbrication étroite entre individuel et collectif.

Auteur

  • G. S. M.