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Sur le terrain

Espagne : CEPSA fait revenir les jeunes expatriés

Sur le terrain | publié le : 27.05.2019 | Valérie Demon

La crise économique de 2008 a fait des ravages au-delà des Pyrénées, poussant des milliers d’Espagnols à partir travailler hors d’Espagne. La compagnie pétrolière Cepsa a mis en place le premier plan d’initiative privée pour les aider à rentrer.

« Tu songes à rentrer en Espagne ? Chez Cepsa, nous t’attendons. » Le message, inscrit sur la page web de la multinationale espagnole Cepsa (Compañía Española de Petróleos S.A.), se veut pionnier en Espagne. C’est la première fois qu’une grande entreprise se lance dans l’aide au retour des jeunes émigrés, partis pendant la crise économique, entre 2008 et 2014. Le programme de cette compagnie pétrolière, intitulé « Talent’s back », est issu d’un constat. « Deux millions d’Espagnols sont partis travailler à l’étranger, en raison de la crise et du manque d’opportunités ici », rappelle Beatriz Serrano, responsable de l’attraction des talents chez Cepsa. Le tout alors « que l’Espagne a formé ces jeunes dans des universités et des écoles de commerce solides. Nous devions leur offrir une chance de rentrer », ajoute-t-elle, avant de reconnaître que « c’était dur de voir ces jeunes partir. “Talent’s back” est une manière de leur tendre à la main alors que nous ne pouvions pas leur donner leur chance durant la crise ».

Sans compter que Cepsa s’est rendu compte que certains profils devenaient difficiles à trouver sur le marché du travail local, comme le rappelait récemment Carlos Morán, le directeur des ressources humaines de Cepsa, lors d’une émission de radio.

La préoccupation de Cepsa a rencontré celle de l’association Volvemos, créée en 2016 par trois jeunes Espagnols, afin d’aider des compatriotes à rentrer chez eux en faisant le lien entre travailleurs, entreprises et administration. « La fuite des cerveaux pendant la crise économique a été vécue comme un traumatisme », analyse Raul Gil Benito, l’un des fondateurs de Volvemos, lui-même parti en Allemagne en 2012 et revenu en 2015 à Madrid. Aujourd’hui, comme le site de Volvemos est très visité de l’étranger, les offres d’emploi de Cepsa – une trentaine actuellement – y sont également publiées.

Des atouts supplémentaires

Cepsa offre un petit « plus » à ceux qui viennent de l’étranger rejoindre ses rangs : l’entreprise paie le billet d’avion du retour, le déménagement et une dizaine de jours à l’hôtel pour trouver un logement. Pour l’instant, un ingénieur, candidat au retour, est déjà revenu après avoir passé six ans à Munich.

Ces jeunes émigrés présentent des avantages pour Cepsa. « Ils sont sortis de leur zone de confort en partant à l’étranger, ils ont su dépasser les barrières culturelles et possèdent des bonnes capacités d’adaptation », détaille Beatriz Serrano. Ouverts d’esprit, ces profils sont également plus flexibles. Cerise sur le gâteau, « ils possèdent un réseau de contacts étoffé », ajoute cette spécialiste. Enfin, si « la famille, le climat, la qualité de vie aident aussi ces Espagnols à revenir », c’est surtout, dans un contexte d’embellie économique et d’amélioration du marché de l’emploi, la perspective d’un contrat à durée indéterminée et d’un salaire en ligne avec leurs attentes qui semble pousser certains à rentrer.

Plan du gouvernement

Cette initiative de Cepsa intervient au moment où le gouvernement socialiste a lancé, en mars dernier, un plan de retour, doté de 24 millions d’euros. Au programme, la mise en place de réseaux entre entreprises et émigrés, l’accès aux aides d’Eures (la plateforme européenne de mobilité professionnelle), une facilité d’accès à des espaces de coworking, une aide au transfert d’entreprises en Espagne…

Des perspectives de retour, donc, mais surtout, des signes de reconnaissance pour tous ces jeunes très qualifiés, estime Raul Gil Benito, de l’association Volvemos, qui collabore avec plus d’une dizaine de régions afin de mettre en place les mesures gouvernementales. Mais il souhaite une évolution des perceptions concernant les départs et les retours. « Lorsque tous ceux qui veulent revenir l’auront fait, nous pourrons de nouveau parler d’un véritable itinéraire de mobilité, dit-il. Nous sommes un pays d’émigration et d’immigration. Pendant la crise, les jeunes disaient qu’on les mettait dehors. Nous défendons l’idée qu’émigrer, au moins pour un temps et quelles que soient les causes, est un acte positif professionnellement et personnellement ».

Auteur

  • Valérie Demon