Les grandes sociétés françaises qui ont mis en place des politiques inclusives en direction des LGBT+ ont souvent trouvé leur inspiration à l’étranger.
Les membres de l’Autre Cercle n’en font pas mystère. Lorsqu’ils ont sollicité des professionnels dans les entreprises pour devenir rôles modèles et accroître ainsi la visibilité des LGBT+ au travail, ils ont rencontré bien des hésitations, quand ce n’étaient pas des refus ou des stratégies de contournement. Ainsi, certaines personnes LGBT+ approchées préféraient concourir pour la catégorie « Allié », brouillant ainsi les pistes puisqu’elle inclut des hétérosexuels se positionnant en faveur de l’inclusivité dans leur entreprise… Autant dire qu’en France, l’idée de vivre son orientation sexuelle en toute sérénité au travail n’est pas encore évidente.
D’ailleurs, sur les 60 rôles modèles de la liste de l’Autre Cercle, la moitié sont issus d’entreprises d’origine américaine, britannique ou du Nord de l’Europe. En France, pas de Tim Cook, PDG d’Apple et premier grand patron américain à avoir fait son coming out en 2014, et qui a pris, en 2015, la tête des 8 000 salariés du groupe au défilé de la Gay Pride, à San Francisco. Pas de Christopher Bailey, CEO et directeur général de la création chez Burberry, premier PDG ouvertement LGBT des sociétés de l’indice FTSE 100, l’équivalent du CAC 40 au Royaume-Uni. Et pas non plus d’Inga Beale, l’ancienne présidente des Lloyds, ouvertement bisexuelle.
Le monde des affaires anglo-saxon apparaît autrement plus accueillant pour les personnes LGBT+. Question de tradition, avec une ouverture plus grande sur les thématiques de discrimination et d’égalité que la culture européenne. Question de société, au sens où les communautés, quelles qu’elles soient, n’ont pas peur de se voir reprocher, comme c’est le cas en France, un esprit « communautaire ». Question d’initiative privée, également, les entreprises anglo-saxonnes prenant elles-mêmes des dispositions en interne, sans attendre une loi. D’autant qu’aux États-Unis, l’Equality Act, le projet de loi visant à amender le Civil Rights Act en interdisant la discrimination sur la base de l’orientation sexuelle et l’identité de genre (en plus de la couleur de peau, etc.), n’a été déposé devant les parlementaires qu’en mars 2019, malgré les appels d’Apple, mais aussi de Microsoft, Amazon, eBay, IBM, Facebook, Twitter, Visa, Mastercard, Intel, Netflix…
En matière d’initiatives privées, l’organisation OUTstanding, basée à Londres, publie tous les ans depuis 2013 une liste mondiale de rôles modèles LGBT+ dans les entreprises. Si les sociétés anglo-saxonnes y sont bien représentées, la liste, qui mettait l’an dernier en avant 230 personnes, issues de 43 secteurs d’activité différents, comprenait des rôles modèles situés dans 21 pays. La France y apparaît même depuis quelques années, grâce à BNP Paribas, dont le directeur général, Jean-Laurent Bonaffé, est un allié de longue date des personnes LGBT+.
D’ailleurs, si plus d’une centaine de grands groupes et de PME ont signé la Charte d’engagement LGBT+ de l’Autre Cercle depuis son lancement, en 2013, et qu’Orange, AXA, Sodexo, BNP Paribas, EDF, L’Oréal, Schneider Electric et LVMH entre autres, soutiennent les normes de conduite établies par les Nations unies pour lutter contre la discrimination à l’égard des LGBT+, certaines multinationales ont trouvé leur inspiration en dehors de nos frontières. En lançant des réseaux de soutien à l’intérieur de l’organisation, en incitant les collaborateurs à se porter volontaires pour des actions de solidarité envers les LGBT+ ou tout simplement en appliquant une politique d’inclusivité rigoureuse et une tolérance zéro vis-à-vis de toute discrimination liée à l’orientation sexuelle. Ainsi, la filiale américaine de Sodexo a lancé, en 2012, PRIDE, un programme grâce auquel les salariés peuvent participer à des efforts de conscientisation et des levées de fonds en faveur des LGBT+ pendant la « semaine des fiertés ». L’Oréal, qui dispose d’un institut de recherche sur cette thématique, figure régulièrement en bonne place dans les palmarès des sociétés implantées aux États-Unis et défendant l’égalité des personnes LGBT+. Enfin, LVMH, qui a fait défiler, chez Louis Vuitton, des mannequins transgenres, soutient un grand nombre d’actions visant à aider les personnes LGBT+ outre-Atlantique.