René Bagorski, président de l’Afref* et corédacteur du rapport « Les opérateurs de compétences : transformer la formation professionnelle pour répondre aux enjeux de compétences ».
Une grande partie de nos préconisations a été retenue. Avec Jean-Marie Marx, nous avions fait le pari du dialogue social en laissant les partenaires sociaux en charge de créer ces opérateurs de compétences selon des champs cohérents, quitte à ce que le ministère du Travail, en dernier ressort, soit l’arbitre final. Ce qu’il a d’ailleurs fait en demandant aux partenaires sociaux qui avaient transmis des projets d’accords jugés trop bancals de revoir leur copie. Globalement, les 11 Opco agréés le 1er avril dernier s’inscrivent dans le canevas de nos travaux. Avec quelques bémols, toutefois. Par exemple, les branches du sport ont rejoint l’Afdas (Opco de la culture, de la communication et des médias) alors qu’elles auraient pu faire le choix de la Cohésion sociale pour tenir compte de la dimension associative et pas uniquement professionnelle des activités couvertes par ce secteur. Je m’étonne aussi que le champ de l’ex-Opca Intergros (commerce de gros) soit désormais dans le périmètre des services à forte intensité de main-d’œuvre (Opco ESSFIMO) alors que les métiers couverts concernent la logistique et le transport. On aurait très bien pu les imaginer rejoindre la Mobilité ou le Commerce. Certains choix de branches peuvent interroger mais n’ont rien de choquant pour autant.
Dans le rapport, nous avions insisté sur la nécessité de préserver les réseaux de proximité développés par les deux ex-Opca interpro (Agefos PME et Opcalia). Dans le travail de constitution de ces deux Opco, certains intérêts particuliers ont trop pesé dans les débats, mais il ne m’appartient pas de commenter les péripéties passées. J’espère juste que la gouvernance des deux nouveaux Opco ne sacrifiera ni ces réseaux de proximité ni leurs collaborateurs, dont la valeur ajoutée auprès des branches, des entreprises et des salariés est énorme.
Notre rapport maintenait le distinguo entre ces deux secteurs. Nous imaginions d’un côté un Opco coiffant un certain nombre de professions réglementées du secteur de la santé qui aurait pu constituer un outil efficace pour répondre aux grands enjeux médicaux de notre temps (le vieillissement, la grande dépendance…) indifféremment du statut lucratif/non lucratif des établissements ; de l’autre un opérateur de compétences couvrant une grande partie du périmètre de l’économie sociale et solidaire (ESS). Je note cependant que rien, dans les arrêtés du ministère du Travail, ne fixe de date limite d’agrément des deux Opco ou de demande de rapprochement futur.
Je n’en suis pas certain. La plupart des Opca ont entamé un gros travail dès le mois de septembre 2018 pour être au rendez-vous au 1er avril. Il existe des structures au sein desquelles les préfigurateurs ont été désignés pour que l’opérateur de compétences soit en ordre de marche le plus rapidement possible. Ailleurs, ce fut plus difficile, mais le gouvernement a cependant notifié son objectif de ne pas voir de « trou » dans le système en 2019.
* Association de réflexion et d’échange sur la formation.