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Numérique : Des solutions pour faire face à la pénurie de compétences

Le point sur | publié le : 18.03.2019 | Laurence Estival

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Numérique : Des solutions pour faire face à la pénurie de compétences

Crédit photo Laurence Estival

Face au manque de compétences sur les métiers du numérique, les entreprises ont appris à jongler pour dénicher les candidats, quitte à les former elles-mêmes. Une diversification des profils qui est aussi devenue pour elles une source de créativité

Data scientists, spécialistes du machine learning, UX designers, chefs de projet cybersécurité, développeurs front-end ou full-stack… La liste des métiers liés au numérique et à la transition digitale des entreprises ne cesse de s’allonger, au fur et à mesure de l’évolution des technologies. « Tout va tellement vite qu’il est de plus en plus difficile de cerner les compétences qui ont le vent en poupe », remarque Daniel Hansberger, directeur du cabinet de recrutement Clémentine, spécialiste du numérique, traduisant le sentiment général : alors que, selon la Dares et France Stratégie, 110 000 emplois devraient être créés d’ici 2022 dans ce secteur, les entreprises qui gèrent déjà la pénurie de profils doivent de plus apprendre à piloter leur recrutement dans le brouillard faute d’indicateurs fiables sur les emplois de demain et en raison d’une obsolescence rapide des savoir-faire.

Première piste : diversifier les écoles et universités cibles. « Le fossé entre les formations proposées aux étudiants et les besoins des entreprises commencent à se résorber », rappelle Neila Hamadache, déléguée à la formation de Syntec Numérique (syndicat professionnel des entreprises de services du numérique). « Les écoles mais aussi les universités ont fait de très gros efforts, remarque également Christelle Pradier, directrice recrutement France de Sopra Steria. L’implication des entreprises dans les cursus et l’accueil de stagiaires et d’apprentis a aussi contribué à faire bouger les lignes. » Laurent Benazera, directeur recrutement d’Open, est un peu plus réservé sur l’inflation des cursus centrés sur l’intelligence artificielle : « Ils correspondent à un nombre relativement limité de postes alors que les recruteurs souhaitent avant tout attirer à eux des développeurs agiles et curieux, capables d’acquérir demain des connaissances dans de nouveaux langages… »

Retour sur les bancs de l’école

C’est d’ailleurs pour permettre à ceux déjà en poste de franchir le pas que la plupart des entreprises se sont dotées ou ont développé leurs propres formations. « Nous consacrons à la formation continue 4,5 % de notre masse salariale, détaille Jihane Baciocchini, directrice du recrutement pour Capgemini en France. Et si nous proposons des programmes sur les nouvelles technologies, nous avons aussi développé une offre sur le leadership ou la conduite de projet pour renforcer les compétences comportementales des consultants. » Même discours chez le groupe d’ingénierie Segula technologies, particulièrement actif sur l’usine du futur : « Devant la difficulté de recruter des candidats ayant une double compétence technique, une connaissance d’un secteur particulier et rodés au travail en équipe, nous avons développé des formations internes, adaptées à nos besoins », met en avant Franck Bonhomme, directeur du recrutement. Avis aux entreprises : « Il existe déjà beaucoup de briques sur le marché qui ne demandent qu’à être assemblées », précise Laurent Benazera.

Sur le marché des formations intra-entreprises, les catalogues des organismes commencent aussi à prendre de l’épaisseur. En témoignent les programmes organisés sous forme de poupées russes conçus par Télécom Évolution. « Il y a une réelle demande, du plus pointu au plus général, mentionne Geneviève Metz, la directrice de la formation continue. Chaque grand thème – intelligence artificielle et big data, système de transport intelligent et mobilité, cybersécurité – se compose de différents cursus allant du Mooc au mastère en passant par les certificats d’études spécialisés. » De quoi armer à la fois les futurs experts mais aussi des responsables de la transformation numérique des entreprises maîtrisant les enjeux pour convaincre les dirigeants de la pertinence de leurs propositions et parlant le même langage que les spécialistes pour ensuite les mettre en œuvre.

Bienvenue aux candidats à la reconversion

Dernier étage de la fusée : l’accueil de candidats en reconversion, avec une priorité donnée aux profils plutôt juniors bac + 5 ayant suivi un cursus scientifique auxquels sont proposés, souvent en partenariat avec Pôle emploi, des POE (préparation opérationnelle à l’emploi) de 400 heures. « Les premières expériences ayant été concluantes, nous avons progressivement élargi cette possibilité à d’autres profils et notamment à des jeunes de niveau bac + 3, voire dans certains cas à ceux qui n’avaient pas fait d’études supérieures mais qui avaient un fort potentiel en nous appuyant sur l’expérience de Simplon.co* en matière d’insertion de personnes éloignées de l’emploi », mentionne Jihane Baciocchini.

« Tous les profils sont les bienvenus car, au fur et à mesure que nous avançons, nous avons besoin de compétences juridiques, par exemple, dans le domaine de la cybersécurité ou de linguistes pour améliorer les performances de nos chatbots », illustre Christelle Pradier, directrice du recrutement chez Sopra Steria. Globalement, ces salariés en reconversion représentent déjà un quart des recrutements chez Sopra Steria et 600 personnes l’année dernière chez Capgemini, contre 200, il y a encore deux ans. Et si cette montée en puissance de l’accueil de demandeurs d’emploi en reconversion contribue à résorber la pénurie de compétences, « elle est aussi un moyen pour nous de recruter des profils différents de ceux dont nous avons l’habitude et de nous enrichir pour être toujours plus innovants », conclut Christelle Pradier. Dont acte…

Des dispositifs pour faciliter les reconversions

Si le secteur du numérique s’ouvre de plus en plus aux reconversions, c’est aussi parce que les passerelles avec d’autres domaines sont aujourd’hui plus simples à envisager. « Les métiers du numérique, sauf quelques cas particuliers, sont globalement de moins en moins techniques et les entreprises recherchent des profils de plus en plus créatifs qui ont à la fois l’envie, le courage et la volonté de prendre ce nouveau départ », pointe Laurent Benazera, le directeur du recrutement d’Open. Aux dispositifs tels les POE pour les candidats venant d’univers proches s’ajoutent aussi le programme 10 000 formations au numérique dédiées aux moins de 26 ans et demandeurs d’emploi ayant un niveau de qualification inférieur au bac dans le cadre du PIC (Plan d’investissement dans les compétences). Objectif : leur proposer des formations longues et opérationnelles de 800 heures dans les plus de 750 programmes labellisés par la « grande école du numérique » qui couvre un nombre de domaines croissant. En témoigne la reconnaissance que vient d’obtenir le programme « Développeur-se data et intelligence artificielle » de l’école IA Microsoft lancée par la multinationale en partenariat avec Simplon.co qui envisage de créer neuf nouveaux centres d’ici juin prochain.

* Simplon.co est une entreprise sociale agréée solidaire (ESUS) qui propose des formations gratuites aux métiers du numérique.

Auteur

  • Laurence Estival