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Sur le terrain

Formation : Les salariés de La Chaussette de France ont réappris leur métier

Sur le terrain | publié le : 18.02.2019 | Lucie Tanneau

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Formation : Les salariés de La Chaussette de France ont réappris leur métier

Crédit photo Lucie Tanneau

Après avoir travaillé uniquement pour la grande distribution, le fabricant de chaussettes Tismail a décidé de créer sa propre marque. Une stratégie qui nécessite des compétences nouvelles.

Quand Benoit Seguin a accepté de reprendre la direction de l’usine de fabrication de chaussettes Tismail il y a neuf ans, son entourage l’a traité de fou. « La chaussette n’est pas un marché porteur », l’ont-ils prévenu. Mais made in France oblige, la production troyenne se porte plutôt bien. « Si l’on n’avait pas revu notre modèle économique, on serait mort, on a dû se poser des questions, et bouger », corrige ce dirigeant de 39 ans. Auparavant, Tismail fournissait la grande distribution. Depuis cinq ans, l’entreprise troyenne a imaginé sa propre marque, commercialisée d’abord en vente directe sur Internet, et distribuée désormais dans certaines enseignes partenaires (Intersport, Vieux campeur… soit 700 boutiques en France et 300 en Europe). La première Chaussette de France était une chaussette technique pour skieur. Elle existe désormais pour les randonneurs, coureurs et pour la vie de tous les jours. « C’est un marché de niche, mais la grande distribution nous assure les volumes, et on fait nos marges avec La Chaussette de France », résume Benoit Seguin. Alors que le personnel tourne en 3x8, le volume reste nécessaire, mais la chaussette maison gagne des parts de marché.

Des savoir-faire perdus

Sauf que pour travailler les fils de cachemire, de soie, et imaginer un design plus travaillé, voire personnalisé, pour le lancement de la marque, les 48 salariés ont dû quasiment réapprendre leur métier de base, celui de technicien régleur de métier à tricoter. « Nous avons mis en place des formations en interne avec le soutien d’Opcalia textile », souligne le directeur. « Ce sont des techniciens régleurs qui ont été formés par l’Opca pour former eux-mêmes ensuite, dans nos locaux à Troyes, les bonnetiers au réglage des machines », détaille Benoit Seguin. Au total, 600 heures de formation par an ont été financées. « Nous avons aussi été obligés d’aller chercher du personnel assez loin, notamment en Afrique du Nord et en Turquie, car on ne parvient plus à trouver de la main-d’œuvre formée et motivée en France. » Avec la désindustrialisation textile de ces trente dernières années et les fermetures d’usines, les écoles spécialisées ont fermé. « J’ai déjà fait un aller-retour à Istanbul pour un entretien d’embauche », avoue-t-il. Plus de 700 000 euros ont été investis depuis cinq ans pour modifier les façons de travailler, diversifier les matières premières et rénover l’outil de production. « On n’a pas d’actionnaire, donc on est libre : on réinvestit tous les bénéfices », résume le Troyen, créateur, dans sa précédente expérience professionnelle, d’une start-up à l’origine d’un textile technique dédié aux seniors.

Nouvelles compétences

Pour se faire une place sur le marché, La Chaussette de France a également été contrainte de s’entourer de spécialistes. Pour dessiner le produit, Benoit Seguin a fait appel au designer Gérald Viossat. « Je l’ai rencontré par hasard sur un salon en Allemagne, mais il est très implanté dans l’outdoor, donc il connaît la technicité. » C’est lui qui dessine les modèles réalisés ensuite en usine. Un collaborateur a aussi été recruté pour assurer les photographies dans la ligne « funky-funny » de la nouvelle marque et le community management. Enfin, un commercial a été embauché, à Annecy, pour démarcher les stations de ski et leur proposer des produits personnalisés. Courchevel et Val Thorens ont notamment leurs chaussettes à leurs noms. Depuis deux ans, Tismail s’est aussi entouré d’une agence de relations publiques parisienne. « Nous sommes fabricants de chaussettes, pas communicants ou distributeurs : il nous fallait des professionnels à chaque étape », justifie le dirigeant. « Ces nouvelles compétences, qui complètent celles que nous avions en interne, permettent de positionner la marque sur son marché. » Aujourd’hui, le carnet de commandes est rempli pour une année et demie. Et plus de 200 000 euros d’investissement sont prévus cette année avec un objectif de croissance de 30 % à 40 % pour la marque maison, La Chaussette de France.

Auteur

  • Lucie Tanneau