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L’entreprise en 2019 : la disruption ou la détestation !

Chroniques | publié le : 11.02.2019 |

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L’entreprise en 2019 : la disruption ou la détestation !

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Martin Richer Management & RSE

Les attentes qui s’exercent vis-à-vis de l’entreprise sont grandes, démesurées peut-être. Le politique ouvre les grilles et les dorures du château de Versailles en espérant emplois, technologies, ressources fiscales. Les citoyens attendent un job rémunérateur, plaisant et stable, pour eux et pour leurs enfants… alors que l’âge du premier CDI atteint désormais 28 ans (contre 22 ans en 2001) et se confond presque avec l’âge du premier enfant (28,5 ans).

Face à ces attentes, la réalité de l’entreprise est amère. Elle fait face à une crise de défiance sans précédent, qui met en cause sa légitimité, nourrit le ressentiment social et alimente la contestation parfois violente de notre système économique, comme en témoignent ces trois constats que j’extrais du 10e Baromètre de la confiance du Cevipof, publié le 16 janvier.

• L’indice de confiance des Français envers les grandes entreprises privées est tombé à 36 %, perdant encore 4 points cette année pour atteindre son plus bas niveau depuis 2011. Envers les banques, il n’est que de 27 %, son plus bas niveau depuis 2013.

• Presque trois quarts des Français (72 % ; en progression de 2 points par rapport à l’année précédente) sont d’accord avec l’affirmation selon laquelle « l’économie actuelle profite aux patrons aux dépens de ceux qui travaillent », ce qui illustre la vigueur de notre modèle social de confrontation.

• En conséquence, une proportion record de Français pensent que le système capitaliste doit être réformé en profondeur (49 % contre 40 % en 2009). À ces 49 %, s’ajoutent 41 % qui estiment qu’il doit être « réformé sur quelques points ». Seuls 6 % se contentent d’un statu quo.

Essayons, sans nous en laisser compter ni conter, de mieux comprendre les origines de ce divorce entre les citoyens et l’entreprise. Toutes les communautés de travail ne sont pas soumises à la même défiance. Savez-vous quelle est l’organisation qui emporte le meilleur « score de confiance » avec 78 % ? C’est une organisation dans laquelle la souffrance au travail se manifeste fortement : l’hôpital. Deux organisations très hiérarchisées viennent ensuite, l’armée et la police avec chacune 74 % de confiance. Malgré les critiques qui lui sont adressées, entre blues des professeurs et funestes classements PISA, les Français placent une grande confiance (69 %) dans l’école. Même une organisation aussi bureaucratique et calamiteuse que la Sécurité sociale emporte un score de 65 % !

Quel est le point commun entre ces organisations qui sont les chouchous de nos concitoyens ? Elles sont toutes des institutions publiques, qui portent des valeurs fortes (l’engagement, le dévouement, l’attention aux autres) et démontrent le sens de l’intérêt général. Elles incarnent les préoccupations premières des Français, la santé, la protection, le soin, la connaissance, la sécurité.

Est-ce à dire que le divorce est consommé ? Non, car deux autres organisations font elles aussi partie de ce « carré magique » de celles qui dépassent 60 % de confiance. Il s’agit des associations (63 %) et surtout des PME, qui se placent tout en haut de la liste des préférences avec 78 %. On peut en déduire que deux valeurs sont appréciées des Français :

• le sens de l’intérêt général, incarné par les institutions mentionnées précédemment comme par les associations ;

• le dynamisme entrepreneurial et l’ancrage territorial pratiqués par les PME.

Pour éviter de sombrer dans l’aversion, les grandes entreprises doivent se saisir de ces deux valeurs. C’est le moment : le rapport Notat-Senard et la loi Pacte les incitent à intégrer les enjeux sociétaux et environnementaux pour définir leur raison d’être ; le management agile, l’intrapreneuriat, les partenariats avec les start-up et les organisations « responsabilisantes » sont à leurs portes… C’est à l’entreprise de choisir : la disruption ou la détestation.