Dire qu’ils sont satisfaits serait en dessous de la réalité. Pour les responsables de l’agence d’intérim Synergie de Saint-Herblain, près de Nantes, spécialisée dans les métiers du BTP, le recrutement et la formation de dix réfugiés depuis septembre dernier est une réussite totale. À l’origine de l’aventure, une quête de candidats dans une région, les Pays de la Loire, qui connaît le plus bas taux de chômage au niveau national. « Tous les métiers du bâtiment sont pénuriques, constate Michaël Augereau, le responsable de l’agence. Nous pourrions aujourd’hui placer vingt candidats qualifiés dans chacun de nos domaines d’activité. Nous cherchons des solutions et nous nous sommes tournés vers les centres de formation. C’est à l’occasion d’une visite à l’Afpa de Saint-Herblain que nous avons découvert le programme Hope. » Ce dispositif permet l’insertion professionnelle de personnes ayant la protection internationale, et en cours de régularisation. « Nous nous sommes positionnés auprès du FAF.TT, qui est porteur du projet, pour accompagner un groupe, témoigne Dominique Legoff-Garnier, responsable de la mission insertion de Synergie. Les personnes sont identifiées par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFFI), et dirigées vers Pôle emploi, qui organise des séances d’information avec les personnes concernées. Deux sociétés étaient présentes, l’une de l’industrie navale et nous. Nous avons présenté le métier et la formation de maçon coffreur bancheur, et les personnes ont ensuite choisi les entreprises qui les intéressaient. »

Neuf Soudanais et un Syrien ont opté pour Synergie, après un entretien individuel, et ont ainsi constitué le groupe.

« Il y avait au début le frein de la langue, poursuit la responsable. Certains avaient déjà travaillé dans le bâtiment… mais nous devions être sûrs qu’ils comprenaient bien la proposition. » Le 26 septembre dernier, tous étaient présents pour le premier jour de formation, prévue en deux étapes. L’une, dans le cadre d’une POEC de 400 heures, dont la moitié était consacrée à l’apprentissage de la langue, et l’autre à la théorie et pratique du métier, avec deux formateurs de l’Afpa ; 70 heures de stage en entreprise ont complété cette première phase.

« L’entreprise est impactée positivement par cette expérience, explique Michael Augereau, directeur de l’agence.

Ponctualité, motivation… toutes les entreprises qui ont choisi de prendre un stagiaire nous ont fait des retours tellement positifs que certains y seront certainement recrutés en CDI à la fin du parcours. Tous ont obtenu leur DCL (diplôme de compétence en langue). »

Les employeurs se sont positionnés pour reprendre les mêmes stagiaires au cours de la deuxième phase, qui a débuté le 18 décembre. Objectif : l’obtention du CQP (certificat de qualification professionnelle) de maçon coffreur bancheur préparé sous contrat de développement professionnel intérimaire (CDPI). S’engager dans un tel dispositif n’est cependant pas « juste » se préoccuper de l’aspect insertion professionnelle. « Il faut être prêt à investir du temps, des moyens humains pour accompagner les réfugiés aussi bien sur des problématiques administratives que sociales », souligne le directeur de l’agence.

La découverte des arcanes administratives, comme lors de la validation en France de permis de conduire obtenus à l’étranger, n’étant pas la plus simple.

Mais au bout du compte, c’est l’aventure humaine qui semble la plus marquante. « Pour nous, qui avons du mal à trouver des candidats motivés par nos métiers, c’est une vraie bouffée d’oxygène », souligne Fanny Maillou, consultante commerciale, qui s’est fortement impliquée. Matchs de foot, soirées organisées avec l’Afpa… Les liens vont au-delà du strict point de vue professionnel. L’aventure va certainement se poursuivre : l’intégration d’un nouveau groupe, pour une formation d’étancheur, est à l’étude.