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Sur le terrain

Égalite professionnelle : Des ateliers pour apprendre aux femmes à négocier leur salaire

Sur le terrain | publié le : 21.01.2019 | Dominique Perez

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Égalite professionnelle : Des ateliers pour apprendre aux femmes à négocier leur salaire

Crédit photo Dominique Perez

Combattre les inégalités salariales en donnant des clefs pour mieux négocier : tel est le pari de la chaire RSE d’Audencia École de Management, qui s’est donné pour objectif de former 5 000 femmes à l’horizon 2020.

« La manière dont on va gérer la question de la négociation salariale commence, pour moi, dès l’origine, quand on entre dans sa première entreprise. Dès le départ, je n’ai pas su faire. Je ne me suis pas sentie en position de force. » Marie, cadre dans les ressources humaines, est assise dans une salle de cours d’Audencia École de Management à Nantes. Des femmes de tous âges et de toutes fonctions sont venues chercher des réponses pour mieux négocier leur salaire dans cet atelier de « Négo-Training » qui leur est destiné. Une initiative unique en France, initiée par Nantes Métropole et la chaire RS de l’école. Étudiantes, salariées, ou en recherche d’emploi… la seule condition pour participer est d’être une femme.

Le tour de table révèle le même malaise. Manque de légitimité, freins que l’on se donne en perspective d’une maternité… les témoignages traduisent un sentiment d’injustice, voire un début de honte. Face à elles, Christine Naschberger, professeure RH à Audencia, et Joëlle Durand, salariée d’entreprise, venue pour s’initier à l’animation de cette formation de trois heures. Bénévoles, comme toutes les animatrices de ces ateliers gratuits. Un petit test, sur smartphone, permet de mesurer ses connaissances. Quel est l’écart de salaire entre hommes et femmes ? Quelles sont les prétentions salariales des jeunes diplômées par rapport à leurs homologues masculins ? Quelles sont les différences entre les pensions de retraite des hommes et des femmes ? Cette mise au point préalable suscite des réactions. 23 % d’écart de salaire, ce n’est pas anodin. Si la plupart des femmes présentes ont déjà une expérience professionnelle, deux étudiantes viennent dans une approche « préventive », avant leurs premières négociations. Elles sont cependant minoritaires dans les ateliers. En trois heures, prises de paroles, jeux de rôle, conseils pratiques vont permettre de repartir avec des outils et une prise de conscience aux résultats assez spectaculaires : 64 % des femmes après la formation se sentent « confiantes ou plutôt confiantes pour demander une augmentation ou une promotion ». Elles sont seulement 10 % avant l’atelier.

L’interlocuteur n’est pas un adversaire

Lucie, âgée de 31 ans, cadre dans la communication, informée par une annonce sur LinkedIn, reconnaît qu’elle a du chemin à parcourir avant de se faire reconnaître à sa juste valeur : « J’ai beaucoup de difficultés. Il m’est même arrivé de devoir choisir entre deux jobs, et de prendre celui dont la rémunération était plus basse de 700 euros, car je craignais que l’emploi le mieux payé soit une occasion pour l’entreprise de m’exploiter… » Mais d’où viennent ces freins ? « Nous avons intégré certains messages depuis l’enfance, analyse Lucie. Dont celui de ne pas réclamer… » Une attitude qui semble avoir peu évolué d’une génération à l’autre : « Nous avons le sentiment que l’on a ce que l’on mérite, que l’on doit se contenter de ce que l’on a, et que cela ne se fait pas de demander », analyse Maryse, 50 ans, en recherche d’emploi. Contactée après la formation, elle reconnaît qu’elle a mieux géré les deux entretiens d’embauche qu’elle a décrochés entre-temps, même si elle n’a pas été retenue. « Lors des jeux de rôle, j’ai pu prendre conscience qu’il suffit finalement de demander simplement les choses et de ne pas considérer que son interlocuteur est un adversaire. » Miraculeux ? « On ne s’attendait pas à rencontrer un tel succès, reconnaît Anne-Laure Guineheuf, responsable du pôle Research & Business de la chaire RSE d’Audencia. Mais des ateliers se dégage une énergie positive, les femmes se rendent compte qu’elles peuvent être actrices du changement, il y a un phénomène certain d’entraînement des unes et des autres. »

1 700 femmes inscrites

En décembre 2018

• 813 femmes ont été formées, pour 1 700 inscrites et 700 en liste d’attente. Un tiers des femmes formées souhaitent former à leur tour.

• 54 % des femmes, 6 mois après leur formation, ont négocié dans le cadre de leur poste actuel ou dans le cadre d’un entretien d’embauche.

• Parmi les femmes qui ont négocié, seules 7 % n’ont rien obtenu.

• 39 % des femmes qui ont négocié ont obtenu une augmentation de salaire, 16 % une prime et 10 % une promotion interne.

• L’objectif est de former 5 000 femmes d’ici 2020.

Auteur

  • Dominique Perez