logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Sur le terrain

Formation : Lacoste monte au filet

Sur le terrain | publié le : 07.01.2019 | Lucie Tanneau

Image

Formation : Lacoste monte au filet

Crédit photo Lucie Tanneau

Pour faire perdurer un savoir-faire textile en voie de disparition et lutter contre les difficultés de recrutement, Lacoste a créé une école en interne : la Lacoste Manufacturing Academy.

Il est l’inventeur du célèbre polo de tennis. Lorsque René Lacoste fonde son entreprise, à Troyes en 1933, la recette du succès se base sur l’innovation et le savoir-faire textile développé dans la région. Mais avec le déclin de cette industrie en France depuis les années 80 et la disparition des formations en bonneterie, en couture ou en teinturerie, le recrutement de personnel formé est devenu un challenge pour les DRH. C’est le cas notamment chez Lacoste. Confrontée à une vague de départs en retraite, l’entreprise au crocodile a dû trouver une solution : elle a décidé de créer, fin 2016, dans ses locaux historiques de Troyes, la Lacoste Manufacturing Academy.

« Nous avons un appareil industriel intégré : nous partons du fil pour produire un produit fini. Nous le tricotons, nous le teignons et nous l’assemblons en confection en faisant appel à des métiers pour lesquels les structures de formation se raréfient », présente Mathieu Bouvot, directeur des ressources humaines industrie France. « Nous avons donc souhaité nous engager dans le développement de personnel formé, afin de faire perdurer ce savoir-faire français, tant reconnu à l’international », poursuit-il. La société a investi entre trois et quatre millions d’euros dans la création de cette école particulière.

Un bon dosage entre théorie et mise en pratique

Dans le cadre d’une préparation opérationnelle à l’emploi (POE), représentant 399 heures de formation, les élèves apprennent les métiers clés de l’entreprise. « Nous formons nos propres collaborateurs au métier de formateur et nous en recrutons à l’externe », détaille le DRH. Des retraités ont notamment été rappelés pour transmettre leur savoir-faire. Situé dans l’établissement troyen de la rue de Verdun, un atelier dédié permet de former les élèves en conditions réelles sur les techniques de tricotage. Un second atelier permet d’apprendre les gestes de la confection, au sein de l’usine des Gayettes, le siège historique. Une salle de classe a aussi été aménagée pour l’apprentissage de la teinture. « L’intérêt de la formation réside dans le bon dosage entre théorie et mise en pratique en conditions réelles, sur un outil industriel à la pointe de l’innovation », se félicite Mathieu Bouvot. Car piloter un métier à tisser capable de tricoter 60 rangées de 1 600 mailles à la vitesse de 30 tours par minute, ça ne s’invente pas. Sans cette école, Lacoste aurait été contraint de rechercher ce savoir-faire ailleurs alors qu’une grande partie de la production de la marque est déjà délocalisée. Sur les 30 millions de pièces vendues dans le monde chaque année, seulement 600 000 sont fabriquées en France.

Recrutement par simulation

Depuis l’ouverture de l’école, en janvier 2017, 47 élèves ont reçu leur certificat de qualification professionnelle. Des demandeurs d’emploi ou salariés en reconversion et des collaborateurs en interne. « Les demandeurs d’emploi souhaitant suivre la formation ont des profils très variés, jeunes et moins jeunes, la plupart sans expérience préalable dans les métiers du textile », reconnaît Mathieu Bouvot. « Ils sont recrutés avec l’aide de Pôle emploi en étant évalués par la méthode de recrutement par simulation (MRS). Ceux réussissant cette étape sont invités à une visite de nos installations. L’entretien avec un binôme RH/opérationnel constitue la dernière étape de sélection », présente le DRH, très impliqué dans la création de la structure. Ce sont en effet les services RH qui ont organisé la formation et travaillé à la développer en faisant le lien notamment avec Pôle emploi pour trouver les candidats et avec le conseil régional du Grand Est et l’Opca du secteur (Opcalia branche textile-mode-cuir). L’Academy est aussi ouverte aux entreprises extérieures qui souhaiteraient bénéficier de ses structures. « À l’issue de la formation de trois mois, les élèves ont la possibilité d’être embauchés par Lacoste en contrat de professionnalisation pour finaliser leur formation, puis d’être intégrés à 100 % en production », détaille Mathieu Bouvot.

Les 47 personnes qui ont d’ores et déjà fini la formation et leur contrat de professionnalisation ont, depuis, rejoint les 400 salariés des ateliers troyens de Lacoste (en plus des 300 en logistique). « Nous prévoyons d’intégrer plus de 40 nouveaux collaborateurs dans les prochains mois », poursuit aussi le DRH. De nouveaux venus qui défendront à leur tour le savoir-faire français des bonnetiers.

Auteur

  • Lucie Tanneau