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Management : L’entretien annuel d’évaluation, un art d’exécution

Le point sur | publié le : 17.12.2018 | Irène Lopez

« Dépassé » pour les uns, « indispensable » pour les autres, l’entretien annuel d’évaluation reste une pratique pour 60 % des entreprises privées françaises. La tendance est néanmoins à l’expérimentation d’alternatives, plus ou moins concluantes. Les exemples venus de l’étranger séduisent mais ont du mal à trouver leur mise en œuvre dans la culture française. État de l’art des pratiques existantes.

L’entretien annuel, tradition ancrée depuis les années 2000 dans les entreprises françaises, a son utilité. 71 % des managers français estiment que ces modalités d’évaluation ont été très utiles pour leurs équipes selon une étude IDC/Cornerstone. C’est donc un moment profitable mais auquel le collaborateur semble se rendre avec des pieds de plomb puisqu’ils sont moins nombreux à penser qu’il s’agit d’un moment motivant. L’exercice est même qualifié de stressant par 33 % des salariés. À noter que cet exercice est plus anxiogène pour les salariés les plus jeunes (69 % des 18-24 ans estiment qu’il constitue un moment stressant) et pour les femmes (42 %).

Bien qu’optionnel, il est considéré comme le rendez-vous incontournable entre l’employeur et le salarié. Il permet de faire le point sur les compétences et résultats du collaborateur par rapport aux objectifs fixés en début d’année. Pour que ce rendez-vous soit réussi, il convient de suivre quelques conseils. Le premier est de bien préparer cet entretien. Cela peut paraître banal mais selon Rose-Marine Ponsot, vice-présidente de Syntec conseil en recrutement, pour Cadremploi.fr : « Les managers ont trop souvent tendance à ne préparer l’entretien d’évaluation que quelques jours à l’avance. Or, mener à bien un tel rendez-vous nécessite du travail et de la réflexion en amont. Le manager devra faire l’effort de reprendre les évaluations antérieures de son interlocuteur et de vérifier si les objectifs définis l’année précédente ont été atteints. Un entretien d’évaluation se prépare toute l’année ! »

La liste des points positifs et négatifs

Le moment le plus délicat est lorsque le manager devra effectuer le bilan de l’année 2018, autrement dit lister les points positifs de la collaboration et ceux qui ont été moins satisfaisants. Dans ce cas, il existe une parade. « Laisser le collaborateur faire sa propre analyse, suggère Vincent Dicecca, responsable du domaine management au sein de CSP Formation. Le plus souvent, il aborde lui-même les écueils rencontrés, les points d’amélioration. » Le fait que le collaborateur évoque lui-même les points négatifs évite qu’il les considère comme des griefs. Le dernier conseil donné par Cadremploi est de ne pas utiliser l’entretien annuel d’évaluation pour aborder le sujet d’une augmentation de rémunération. Il est préférable de lui dédier un rendez-vous spécifique. L’entretien annuel doit être le plus libre possible. Or, le collaborateur pourrait, par exemple, minimiser un problème de peur de ne pas avoir d’augmentation et, par conséquent, biaiser la discussion. Ce que confirment les résultats d’un sondage BVA : « Les salariés déclarent que le plus souvent, l’entretien n’a permis/ou ne permet pas d’évoquer une évolution de carrière (55 %) ni les questions financières (31 %). »

De vives critiques

Aujourd’hui, les entretiens annuels d’évaluation sont de plus en plus décriés selon la dernière étude sur le management et la performance (2017) du cabinet Deloitte. 58 % des cadres interrogés considèrent que les entretiens traditionnels ne favorisent pas l’engagement des collaborateurs et n’aboutissent pas à de meilleurs résultats. 85 % des entreprises interrogées ont l’intention de le faire évoluer. Certaines sociétés ont même mis totalement fin à l’entretien annuel d’évaluation. Deux reproches principaux émergent. Le premier repose sur le rythme de l’entreprise : ce rendez-vous annuel est par essence en discordance avec l’ère des cycles courts et de l’instantanéité. La seconde critique a trait à son caractère contraignant et formel : il peut être perçu comme une source de stress et aboutir à une baisse de motivation.

Un compromis

Et si tout n’était pas noir ou blanc ? Et si l’évaluation annuelle n’était qu’une question d’aménagement ? L’entretien « solennel » pourrait être complété par des échanges plus fréquents. Inutile de bloquer une date sur l’agenda, des outils collaboratifs existent pour simplifier la démarche. Ils permettent de déposer avis et remarques à tout moment et de conserver la trace des échanges. Quoi de plus naturel d’oublier ce qui s’est passé au mois de janvier, onze mois plus tard ? L’historique des discussions virtuelles permet de préparer l’entretien annuel. La masse de données recueillies est d’autant plus précieuse qu’elle permet de prendre la température de l’ensemble des collaborateurs et de corriger le tir de certaines décisions internes. Les équipes de Cornerstone OnDemand, éditeur de logiciel, concluent : « Quoi qu’il en soit, le management, c’est tous les jours, et non une seule fois dans l’année. Les responsables d’équipe doivent veiller à garder une qualité d’échange constante, qu’ils maintiennent ou non le sacro-saint entretien annuel ! »

Auteur

  • Irène Lopez